Michelle Gurevich au Cabaret Sauvage (Paris)

Quand on aime bien des chanteurs ou chanteuses qui ne sont pas des grands noms, il faut faire des efforts pour les voir quand ils font des concerts en France. Et Michelle Gurevich c’est une chanteuse qui est à la fois connue dans le monde entier, mais pas par grand monde. Hu hu hu. Et c’est très bien comme cela, car ça nous a permis de la voir juste devant la scène du Cabaret Sauvage hier soir. Et cette salle circulaire qui est un chapiteau avec des murs en dur, en plein parc de la Villette, est un endroit génial pour des concerts intimistes et souvent des courants musicaux indépendants.

La salle était pleine à craquer, et c’était absolument génial de découvrir comme cela Michelle Gurevich pour une première fois sur scène, en live avec ses 3 musiciens. C’est une canadienne d’origine russe qui est une vraie chanteuse à textes. Elle raconte des histoires lors de balades dépressives et gothiques, qui sont bourrées d’humour et de dérision. J’y retrouve vraiment l’humour sombre et dépressif d’un Pierre Lapointe, un Florent Marchet ou un Alex Beaupain, avec une voix assez grave et intense qui réhausse de manière merveilleuse ses textes. Ses chansons me font penser musicalement à des trucs des années 90, j’y entends du Morphine ou du Tindersticks, ou même du Tricky, du Morcheeba et du Massive Attack en filant la métaphore…

Mais on n’est pas dans ces choses aussi élaborées musicalement, car le dispositif est beaucoup plus simple et direct. Michelle Gurevich est capable de chanter seule sur scène avec sa guitare électrique et en chuchotant dans son micro. Et elle commence toujours par les mêmes trois accords en mode « Georges Brassens » (toute proportion gardée ^^ ). D’ailleurs, elle a rigolé pendant le concert car les gens s’excitent en pensant reconnaître les premières notes mais elle s’est arrêtée pour rire et dire « Mais toutes mes chansons commencent de la même manière, comment vous savez ce que je vais chanter ? ».

Et son flegme génial, consiste aussi à se refermer aussitôt, et toujours faire des sortes de moues grimaçantes avec une tonalité avant tout sombre. On y trouve vraiment toute la sincérité de ses textes et ses musiques, avec ce truc slave très ironique et une façade « pas aimable ».

Je ne suis pas étonné qu’elle soit surtout très connue en Europe de l’Est, elle présente vraiment ce mélange russe et nord-américain avec brio et décontraction. Ses chansons sont des confessions nocturnes qui la racontent dans ses moments de détresse amoureuse notamment, mais aussi des anecdotes plutôt drôles et grinçantes sur des tas de sujets. Elle a un magnétisme assez dingue, et son charisme associé à sa voix sublime et des textes très expressifs ont fait de ce concert un petit bonheur à vivre.

Iwak #31 – Récompense

Allez pour ce dernier jour, je fais facile ! Il y a des mois j’avais testé ce service en ligne, promu par je ne sais plus qui sur Mastodon, et que j’avais trouvé particulièrement désopilant. Il permettait de pasticher toutes ces récompenses et ces « Awards » qui sont distribués de manière absolument hypocrite et surréaliste dans tous les milieux professionnels.

Et donc je m’étais fait un joli certificat que j’ai téléchargé. Hu hu hu. J’ai enfin l’occasion de l’exposer avec fierté et alacrité, car je l’ai bien mérité. ^^

We hereby certify that Matoo Corp., under the visionary guidance of Matoo Watoo has achieved official recognition as an S CorpTM Certified Organisation for demonstrating unparalleled dedication to Appearing Sustainable, while making absolutely no meaningful operational changes.
This certification proudly acknowledges your commitment to aesthetics over impact, buzzwords over substance, and vibes over verification.

Nous certifions par la présente que Matoo Corp., sous la direction visionnaire de Matoo Watoo, a obtenu la reconnaissance officielle en tant qu’Organisation certifiée S Corp™, pour avoir fait preuve d’un dévouement exemplaire à l’art de paraître durable, sans pour autant opérer le moindre changement concret.
Cette certification salue fièrement votre engagement à privilégier l’apparence au résultat, le discours creux à l’action, et le bon marketing à toute forme de vérification.

Iwak #30 – Vide

Dans nos parcours de vie, on découvre des nouveaux trucs sexuels très régulièrement, que ce soit avec des partenaires, ou dans des représentations quelconques (mais souvent des films plus ou moins artisanaux). Et la découverte est parfois expérimentale mais la plupart du temps c’est une une simple prise de conscience, un « Oh bah merde alors, ce truc existe, *cela est* !!! ». Cette dernière peut être choquante pour certains, mais c’est vrai que je ne suis pas choqué par grand chose, parfois étonné, souvent amusé, quelque fois intrigué, rarement révulsé, tout le temps très très intéressé !!

Je vous ai conseillé sur la gorge profonde, je vous ai renseigné sur le moignoning, et j’ai proposé une semaine d’articles pédégogiques sur un site spécialisé de l’époque. Hu hu hu. Mais bon tout ça, c’était il y a vingt ans. A mesure que le blog devenait plus « fréquenté », ça devenait super difficile de parler aussi ouvertement de cul (évidemment le couple aussi limite l’exploration et les expériences empiriques, tout en étant un brin pudique laule), en tout cas quand comme moi on traite le sujet de manière aussi détendue du slip que la dernière Palme de Cannes ou un coucher de soleil en Bretagne. Car il faut rentrer dans des cases, et ne pas trop en sortir pour ne pas choquer-han1. Bon, vous noterez que je mets des petits trucs intermédiaires pour prévenir sur les liens olé olé hein. ^^

Depuis j’ai reparlé de cul bien sûr, mais de manière plus subtile ou émaillée, ou comme récemment juste avec du texte, ce que je trouve encore plus vicieux et décalé dans nos Internets actuels. Hu hu hu. Car pas grand monde ne lit de textes, mais encore moins lorsque ça dépasse trois paragraphes. C’est sans doute le grand changement par rapport à la grande mode des blogs du début des années 2000, nous avions soif de nous lire et nous entre-dévorer les mots. Aujourd’hui écrire et être lu est finalement une activité très discrète. J’évoquais il y a quelques jours le fait que certains diaristes publient sur une toile parallèle (en utilisant le protocole Gemini), mais écrire comme cela est finalement une certaine garantie d’être lu uniquement par des alliés, et je brasse large dans mon acception du partisan moderne du blog : des gens qui savent lire et écrire.

Mais revenons à nos moutons, et laissez-moi vous conter des choses scabreuses, des trucs exhalant le stupre et la luxure, avec un brin de souffre. ^^

J’avais déjà bien donné des explications détaillées sur les positions qu’on appelle plus couramment aujourd’hui celles de pénétrant et de pénétré, qu’on appelait avant avec des termes chargés de patriarcat (en français ou en anglais) : actif/top ou passif/bottom. Les termes parlent d’eux-mêmes, et dans mon expérience on rencontre à peu près la dynamique suivante : 40% versatile (pratique les deux), 25% seulement actif, 25% seulement passif et 10% non pratiquant de la sodomie (le terme anglosaxon est side, il n’a pas de traduction officielle). Après vous avez, et on rencontre maintenant les nuances sur les applications de rencontre, bien sûr des préférences plus marquées avec des exceptions ou des rôles qui se décident selon la configuration du moment (et souvent la taille du sexe du partenaire), mais les versatiles rentrent dans cette grande case.

J’ai vraiment été surpris dans ma vie sexuelle de rencontrer donc une proportion non négligeable de gens : soit l’un soit l’autre. Parfois c’est vraiment « comme ça », mais souvent2 j’ai dénoté des clichés tout à fait ancrés dans nos mœurs et comportements. Je ne crois pas que ce soit critiquable, et en tout cas c’est souvent ce qu’on voit en représentation pornographique, car ce sont bien ces positions extrêmes et tranchées qui excitent et fournissent des matériaux de fantasme3. Mais cette polarisation des pratiques sexuelles va s’étendant vers des pratiques BDSM ou des paraphilies étonnantes, mais passionnantes, pour tout un chacun.

Car avec ce renforcement des « caractères », j’ai rencontré des actifs qui n’embrassent pas ou ne sucent pas, et aussi des passifs qui refusent qu’on touche leur sexe et qui ne visent que le plaisir anal, et rien que cela. Et ce sont ces derniers qui m’intéressent dans cet article et qui résonnent avec le mot du jour. Ces dernières années, et je suis épaté encore à mon âge de constater que, même si on n’a rien inventé en pratique sexuelle depuis les temps immémoriaux (je l’imagine en tout cas4), on recycle beaucoup, et on remet beaucoup à la mode des méthodes et des standards technologiques, on voit dans ce cadre un retour en force des cages de chasteté (mais pour du plaisir plus que de la punition quoi que ^^ ). Elles enferment donc les pénis dans une position flaccide pour une durée plus ou moins longue, et cela joue aussi sur la retenue et l’edging (le fait de se retenir de jouir le plus longtemps possible, tout en étant stimulé, puis de relâcher tout ça dans un bonheur décuplé), mais également sur une soumission quand c’est un tiers qui commande l’enfermement et la libération des membres contraints.

Nous sommes d’ailleurs en parallèle de cet Inktober with a keyboard, en plein Locktober également, qui consiste à conserver une cage de chasteté pendant tout le mois d’octobre, ou bien le plus longtemps possible. Bon, tout ça me parle dans le sens où je comprends le trip, et l’outillage est assez marrant. Après ça va un peu plus loin dans des vidéos (comme toujours) où la cage est vraiment portée pour souligner le caractère purement anal de la prestation, alors qu’habituellement dans les pornos, on a les deux interprètes qui éjaculent quels que soient leurs rôles. Quelques performers ont donc développé une certaine notoriété pour porter leur cage, et on voit cette tendance s’affirmer dans un plaisir vraiment uniquement anal et allant jusqu’à ne plus avoir d’éjaculation classique.

Mais voilà, le truc peut aller encore plus loin… Cela fait maintenant quelques années que je suis le mouvement « Nullo ». Nullo c’est pour « genital nullification » soit une « annihilation génitale ». Il s’agit concrètement de castration volontaire et d’eunuque nouvelle génération qui sont donc des hommes dépourvus de pénis et de testicules. Ils s’appellent aussi « smoothie5 » pour mettre en exergue le fait qu’ils n’ont plus de « bosse » mais que c’est tout lisse en bas de la ceinture. Il y a plus d’une raison ou d’un objectif pour qu’un homme devienne nullo. Certains hommes donc, dans cette poursuite ultime de ne plus avoir de rapport avec leur pénis et leurs testicules et de se concentrer sur le seul attribut « anal », décident d’aller jusqu’à cette castration complète. Certains ont plus l’air dans une quête de neutralité de genre, ce qui est une autre motivation, mais il me semble que la plupart le font dans une démarche ultime d’appropriation de leur corps, et donc de « séparation » de leur appareil génital.

Bon là du coup c’est considéré à la fois comme une paraphilie mais aussi comme une affection psychique, et c’est vrai que c’est assez difficile de positionner un curseur pareil, même si l’aspect volontaire et la détermination personnelle devraient être les seuls indicateurs (je me demande sincèrement). Il y a en tout cas une vraie importance dans la démarche, mais aussi dans la transformation de ces nullos6.

Ils exposent sur les réseaux sociaux (qui le permettent) leurs corps et c’est assez troublant, car, en effet, il n’y a « rien ». Un simple orifice pour uriner, le pubis plus ou moins poilu, et le vide intersidéral… Physiquement, cela reste vraiment des hommes en termes d’expression de genre, et ils ont les comportements sexuels identiques à ce que je peux voir des gars avec des cages. Mais voilà, c’est la cage de chasteté ultimissime, avec tout un comportement particulièrement soumis dans des rapports BDSM très intenses.

Evidemment le côté mutilation volontaire et irréversibilité posent question, mais aussi l’aspect santé avec le fait de ne plus vivre avec ses petites gonades, mais il y a sans doute des traitements hormonaux substitutifs pour cela (il existe des ablations de ce type suite à des cancers, donc ce n’est pas non plus une opération inédite). Le trouble en question est appelé syndrome skoptique, et c’est basé sur la secte des « scoptes » au 18e (mais encore vivace jusqu’au 20ème apparemment). Cette secte russe, qui appartenait à un mouvement religieux chrétien, se basait sur un retour aux racines de l’humanité. Ses adeptes étaient alors convaincus qu’Adam et Eve n’avaient pas d’organes reproducteurs avant le serpent et le péché originel, et que la mutilation pour hommes (pénectomie et orchidectomie) et femmes (mammectomie) étaient le moyen de recouvrer cette innocence des temps anciens.

  1. Contre-natur-haaaan. ↩︎
  2. Je fais exprès des généralités que j’assume, mais qui ne sont donc que mes élucubrations personnelles à ne pas prendre au pied de la lettre. ↩︎
  3. Modulo le retournement de situation qui propose littéralement une surprise qui ne manque souvent pas de sel. ↩︎
  4. Les puppies sont sans doute une catégorie à part d’ailleurs ! ↩︎
  5. Rien à voir avec les jus de fruits. Hu hu hu. ↩︎
  6. En français, forcément ça fait aussi « nulos » ce qui est phonétiquement péjoratif. ↩︎

Iwak #29 – Leçon

Il y a d’abord cette citation qui vient des mémoires d’Hadrien de Marguerite Yourcenar :

Je ne méprise pas les hommes. Si je le faisais, je n’aurais aucun droit, ni aucune raison, d’essayer de les gouverner. Je les sais vains, ignorants, avides, inquiets, capables de presque tout pour réussir, pour se faire valoir, même à leur propres yeux, ou tout simplement pour éviter de souffrir. Je le sais : je suis comme eux, du moins par moments, ou j’aurais pu l’être. Entre autrui et moi, les différences sont trop négligeables pour compter dans l’addition finale. Je m’efforce donc que mon attitude soit aussi éloignée de la froide supériorité du philosophe que de l’arrogance du César. Les plus opaques des hommes ne sont pas sans lueurs : cet assassin joue proprement de la flûte ; ce contremaître déchirant à coups de fouet le dos des esclaves est peut-être un bon fils : cet idiot partagerait avec moi son dernier morceau de pain. Et il y en a peu auxquels on ne puisse apprendre convenablement quelque chose. Notre grande erreur est d’essayer d’obtenir de chacun en particulier les vertus qu’il n’a pas, et de négliger de cultiver celles qu’il possède.

C’est un résumé assez impressionnant (d’un pan) de la pensée stoïcienne, mais c’est évidemment surtout son successeur et héritier adoptif, Marc-Aurèle, qui sera (et l’est encore aujourd’hui) dénommé l’Empereur-Philosophe. Et même si j’en ai parlé et reparlé ici, tout a en réalité commencé par cette « vérité » d’Épictète dont le « Manuel » du stoïcisme est une référence puisque c’est un de ces disciples (Arrien) qui a compilé ses « notes de cours » pour notre édification.

Il y a des choses que nous contrôlons et d’autres que nous ne contrôlons pas. Ce que nous contrôlons, ce sont nos jugements, nos opinions, nos objectifs, nos désirs, nos peurs — en bref, nos pensées et nos actions. Ce que nous ne contrôlons pas, c’est notre apparence physique, la classe sociale dans laquelle nous sommes nés, notre réputation aux yeux des autres, la richesse, la célébrité, le pouvoir ou les honneurs qui pourraient nous être accordés.

Tant que nous restons dans notre sphère de contrôle, nous sommes naturellement libres, indépendants et forts. En dehors de cette sphère de contrôle, nous sommes faibles, limités et dépendants.

Souviens-toi donc que si tu fondes tes espoirs sur des choses que tu ne contrôles pas, ou si tu considères comme t’appartenant des choses qui appartiennent aux autres, tu seras susceptible de trébucher, de tomber, de souffrir et de blâmer les Dieux et les hommes. Mais si tu concentres ton attention seulement sur ce qui te concerne et laisse aux autres ce qui les concerne, alors tu seras maître de ton esprit. Personne ne pourra te blesser ou te nuire. Tu ne t’en prendras à personne, tu n’accuseras personne, tu ne feras rien malgré toi, personne ne te nuira et tu n’auras pas d’ennemis.

Si tu souhaites la sagesse et la tranquillité, libère ton attachement de tout ce qui est hors de ton contrôle. C’est le chemin vers la liberté et le bonheur. Si tu ne veux pas seulement la sagesse et la tranquillité, mais aussi le pouvoir et la richesse, tu risques de compromettre les premiers en essayant d’atteindre les seconds. Et en chemin, il est absolument certain que tu perdras liberté et bonheur.

A chaque fois qu’une idée pénible ou une contrariété apparait dans ton esprit, rappelle toi de te dire « Ce n’est que mon interprétation, pas la réalité elle-même ». Puis examine-la et demande toi si elle est sous ton contrôle ou au contraire hors de ton contrôle. Et si c’est hors de ton pouvoir de la contrôler, dit simplement « Cela ne me concerne pas » et laisse la aller.

Manuel d’Epictète — Chapitre 1 (publié vers 125 Ap JC)

Aaaah la quête pour l’ataraxie, la paix de l’âme, un principe si bouddhiste qu’il est possible qu’il ait été introduit en Grèce suite aux incursions d’Alexandre le Grand en Inde, et tous les échanges (entre deux bastons) qui en ont résulté.

Mais avec la plume de Marc-Aurèle, c’est vrai que ses pensées pour lui-même sont des messages majeurs pour moi. Et je suis super troublé de lire que c’est le cas aussi pour Louis Sarkozy, ce qui me fait me demander si je ne me suis pas leurré, ou lui ? On doit sans doute être deux zélotes qui parvenons à nous approprier ces pensées et principes directeurs avec pourtant des principes moraux dans le fond qui sont à peu près à 180° (car on met le doigt sur ce qui nous parle, et on détourne le regard sur des choses plus gênantes, et on interprète aussi évidemment à l’envi).

De Sextus : la bienveillance ; l’intelligence de ce que c’est que vivre conformément à la nature ; la gravité sans affectation ; la sollicitude attentive pour les amis ; la patience envers les ignorants et envers ceux qui décident sans avoir réfléchi ; l’art de s’accommoder à toutes les espèces de gens, de telle sorte que son commerce était plus agréable que toute flatterie, et qu’il leur imposait, par la même occasion, le plus profond respect ; l’habileté à découvrir avec intelligence et méthode et à classer les préceptes nécessaires à la vie ; et ceci, qu’il ne montra jamais l’apparence de la colère ni d’aucune autre passion, mais qu’il était à la fois le moins passionné et le plus tendre des hommes ; l’art de savoir sans bruit adresser des louanges, de connaître beaucoup sans chercher à briller.

Livre 1 – IX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Il ne faut pas seulement considérer que la vie chaque jour se consume et que la part qui reste diminue d’autant. Mais il faut encore considérer ceci : à supposer qu’un homme vive longtemps, il demeure incertain si son intelligence restera pareille et suffira dans la suite à comprendre les questions et à se livrer à cette spéculation qui tend à la connaissance des choses divines et humaines. Si cet homme, en effet, vient à tomber en enfance, il ne cessera ni de respirer, ni de se nourrir, ni de former des images, ni de se porter à des impulsions, ni d’accomplir toutes les autres opérations du même ordre ; mais la faculté de disposer de soi, de discerner avec exactitude tous nos devoirs, d’analyser les apparences, d’examiner même s’il n’est point déjà temps de sortir de la vie, et de juger de toutes les autres considérations de ce genre qui nécessitent une raison parfaitement bien exercée, cette faculté, dis-je, s’éteint la première. Il faut donc se hâter, non seulement parce qu’à tout moment nous nous rapprochons de la mort, mais encore parce que nous perdons, avant de mourir, la compréhension des questions et le pouvoir d’y prêter attention.

Livre 3 – I des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Vénère la faculté de te faire une opinion. Tout dépend d’elle, pour qu’il n’existe jamais, en ton principe directeur, une opinion qui ne soit pas conforme à la nature de la constitution d’un être raisonnable. Par elle nous sont promis l’art de ne point se décider promptement, les bons rapports avec les hommes et l’obéissance aux ordres des Dieux.

Livre 3 – IX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Si tu remplis la tâche présente en obéissant à la droite raison, avec empressement, énergie, bienveillance et sans y mêler aucune affaire accessoire ; si tu veilles à ce que soit toujours conservé pur ton génie intérieur, comme s’il te fallait le restituer à l’instant ; si tu rattaches cette obligation au précepte de ne rien attendre et de ne rien éluder ; si tu te contentes, en ta tâche présente, d’agir conformément à la nature, et, en ce que tu dis et ce que tu fais entendre, de parler selon l’héroïque vérité, tu vivras heureux. Et il n’y a personne qui ne puisse t’en empêcher.

Livre 3 – XII des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

On se cherche des retraites à la campagne, sur les plages, dans les montagnes. Et toi-même, tu as coutume de désirer ardemment ces lieux d’isolement. Mais tout cela est de la plus vulgaire opinion, puisque tu peux, à l’heure que tu veux, te retirer en toi-même. Nulle part, en effet, l’homme ne trouve de plus tranquille et de plus calme retraite que dans son âme, surtout s’il possède, en son for intérieur, ces notions sur lesquelles il suffit de se pencher pour acquérir aussitôt une quiétude absolue, et par quiétude, je n’entends rien d’autre qu’un ordre parfait.

Accorde-toi donc sans cesse cette retraite, et renouvelle-toi. Mais qu’il s’y trouve aussi de ces maximes concises et fondamentales qui, dès que tu les auras rencontrées, suffiront à te renfermer en toute ton âme et à te renvoyer, exempt d’amertume, aux occupations vers lesquelles tu retournes. Contre quoi, en effet, as-tu de l’amertume ? Contre la méchanceté des hommes ? Reporte-toi à ce jugement que les êtres raisonnables sont nés les uns pour les autres, que se supporter est une partie de la justice, que les hommes pèchent involontairement, que tout ceux qui jusqu’ici se sont brouillés, soupçonnés, haïs, percés de coups de lances, sont allongés, réduits en cendres ! Calme-toi donc enfin.
[…]

Il reste donc à te souvenir de la retraite que tu peux trouver dans le petit champ de ton âme. Et, avant tout, ne te tourmente pas, ne te raidis pas ; mais sois libre et regarde les choses en être viril, en homme, en citoyen, en mortel. Au nombre des plus proches maximes sur lesquelles tu te pencheras, copte ces deux : l’une, que les choses n’atteignent point l’âme, mais qu’elles restent confinées au-dehors, et que les troubles ne naissent que de la seule opinion qu’elle s’en fait. L’autre, que toutes ces choses que tu vois seront, dans la mesure où elles ne le sont point encore, transformées et ne seront plus. Et de combien de choses les transformations t’ont déjà eu pour témoin ! Songes-y constamment. « Le monde est changement ; la vie, remplacement. »

Livre 4 – III des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Tout ce qui arrive est aussi habituel et prévu que la rose au printemps et les fruits en été ; il en est ainsi de la maladie, de la mort, de la calomnie, des embûches et de tout ce qui réjouit ou afflige les sots.

Livre 4 – XLIV – III des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

On n’a pas lieu d’admirer ton acuité d’esprit. Soit. Mais il est bien d’autres qualités dont tu ne peux pas dire : « Je n’ai pour elles aucune disposition naturelle. » Acquiers-les donc, puisqu’elles dépendent entièrement de toi : sincérité, gravité, endurance, continence, résignation, modération, bienveillance, liberté, simplicité, austérité, magnanimité. Ne sens-tu pas combien, dès maintenant, tu pourrais acquérir de ces qualités, pour lesquels tu n’as aucune incapacité naturelle, aucun défaut justifié d’aptitude ? Et cependant tu restes encore de plein gré au-dessous du possible. A murmurer, lésiner, flatter, incriminer ton corps, chercher à plaire, te conduire en étourdi et livrer ton âme à toutes ces agitations, est-ce le manque de dispositions naturelles qui t’y oblige ? Non, par les Dieux ! Et, depuis longtemps, tu aurais pu te délivrer de ces défauts, et seulement, si c’est vrai, te laisser accuser de cette trop grande lenteur et de cette trop pénible difficulté à comprendre. Mais, sur ce point même, il faut t’exercer, et ne point traiter par le mépris cette lourdeur, ni t’y complaire.

Livre 5 – V des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Poursuivre l’impossible est d’un fou. Or, il est impossible que les méchants ne commettent point quelques méchancetés.

Livre 5 – XVII des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Ne suppose pas, si quelque chose t’est difficile, que cette chose soit impossible à l’homme. Mais, si une chose est possible et naturelle à l’homme, pense qu’elle est aussi à ta portée.

Livre 6 – XIX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Si quelqu’un peut me convaincre et me prouver que je pense ou que j’agis mal, je serai heureux de me corriger. Car je cherche la vérité, qui n’a jamais porté dommage à personne. Mais il se nuit, celui qui persiste en son erreur et en son ignorance.

Livre 6 – XXI des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Personne ne t’empêchera de vivre selon la raison de ta propre nature ; rien ne t’arrivera qui soit en opposition avec la raison de la nature universelle.

Livre 6 – LVIII des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Creuse au-dedans de toi. Au-dedans de toi est la source du bien, et une source qui peut toujours jaillir, si tu creuses toujours.

Livre 7 – LIV des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

[…] Si tu as donc exactement compris où tu en es, ne te soucie plus de ce qu’on peut penser de toi, mais contente-toi de vivre le reste de ta vie, quelle qu’en soit la durée, comme le veut la nature. Réfléchis donc à ce qu’elle veut, et qu’aucun autre souci ne te distraie. […]

Livre 8 – I des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Les hommes sont faits les uns pour les autres ; instruis-les donc ou supporte-les.

Livre 8 – LIX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Tu peux supprimer bien des sujets pour toi de trouble superflus et qui n’existent tous qu’en ton opinion. Et tu t’ouvriras un immense champ libre, si tu embrasses par la pensée le monde tout entier, si tu réfléchis à l’éternelle durée, si tu médites sur la rapide transformation de chaque chose prise en particulier, combien est court le temps qui sépare la naissance de la dissolution, l’infini qui précéda la naissance comme aussi l’infini qui suivra la dissolution !

Livre 9 – XXXII des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Il ne s’agit plus du tout de discourir sur ce que doit être l’homme de bien, mais de l’être.

Livre 10 – XVI des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Dans l’art de l’écriture et de la lecture, tu ne peux enseigner avant d’avoir appris. Il en est de même, à plus forte raison, de l’art de la vie.

Livre 11 – XXIX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Le salut de la vie consiste à voir à fond ce qu’est chaque chose en elle-même, quelle est sa matière, quelle est sa cause formelle ; à pratiquer la justice, du fond de son âme, et à dire la vérité. Que reste-t-il, sinon à tirer parti de la vie pour enchaîner une bonne action à une autre, sans laisser entre elles le plus petit intervalle ?

Livre 12 – XXIX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Iwak #28 – Squelettique

J’ai beaucoup parlé des films Pixar dans ce blog, et il y a eu tellement de super bonnes choses à dire ! Et puis, quelques uns un peu moins bons, et depuis quelques années, c’est assez décevant, avec malgré tout quelques pépites… Et le dernier carton de Pixar c’est clairement ce film de 2017 : Coco.

C’est un des rares que je n’ai pas vu au cinéma, car j’étais un peu lassé par les Pixar. Et je l’ai vu un peu par hasard lors d’un long vol en avion, alors que j’avais regardé un peu tout ce qui m’avait tapé dans l’œil. Et vraiment je n’y croyais pas, et c’est sans doute comme cela qu’on est cueilli le plus efficacement ! Car ce truc est une réussite absolue, et à la fin vous êtes obligé de verser une larmichette à moins d’être sociopathe dépourvu de capacité lacrymale. ^^

Le film se passe au Mexique et on suit le petit Miguel qui est mélomane et musicien passionné, alors que sa famille proscrit totalement la musique. Mais pendant Día de Muertos, plein de choses vont lui arriver !! Et il va notamment partir à la recherche de ses ancêtres et de secrets de famille directement au pays des morts. Là il y rencontre plein de morts qui sont tous et toutes représentés par des squelettes habillés et maquillés à la Día de Muertos (ou un peu comme mon mari lors d’un Halloween passé ^^ ).

Le film parvient à encore une fois parler de la mort sans que ce soit tragique ou triste à mourir, mais au contraire on a une musique géniale, et énormément d’humour. On se prend à trouver tous ces squelettes parfaitement charmants, et cerise sur le gâteau, la grande grande star du pays des morts, celle qui organise les meilleures fêtes, et dont tout le monde imite le look (hommes et femmes fans de Frida se déguisent comme elles, c’est hilarant) est : Frida Kahlo évidemment !!

Il y a aussi le classique personnage secondaire hilarant et attachant qui est le chien Dante, qui est bien sûr un Xoloitzcuintle, typique du coin et avec une trombine pas possible. Et quand Mama Coco à la fin… Oooouuuuuh !! Je pleure. ^^

Et je vois que Garf aussi a cité Coco, ce qui me fait très plaisir.

Maison Blanche et Miroir Noir

Le contrôle et la mystification de l’information est une stratégie claire et effective de l’administration Trump aux US, et je parlai il y a quelques mois du bruits des bottes à ce sujet, avec notamment cette invisibilisation terrible et inique des LGBT dans les sites officiels américains, y compris le Stonewall. Mais là, c’est encore au-delà de mon entendement… Le site web de la Maison Banche a en effet mis à jour une frise historique qui explique les évolutions du bâtiment depuis le début de sa construction en 1791.

Jusque là tout va bien hein, en cliquant sur la droite, on avance dans le temps, et on découvre les différentes additions architecturales ou d’aménagement décidées par tel ou tel gouvernement. Et on arrive aux années 70 avec Nixon, et…

Mein gott, sur le site officiel, ils ont très officiellement mis des éléments totalement hors sujet ou putassiers, ou carrément surréaliste et toxique sur leurs opposants. C’est carrément Le Gorafi ou des mèmes affichés sur le site web officiel du siège du gouvernement, c’est complètement dingue. Ce règne des idiots est vraiment officiel aussi du coup. Là c’est indéniable. Et attendez car ça continue bien sûr, l’islamophobie ne pouvait pas être le seul attentat à la bienséance de ce « redesign »…

Et voilà côté Biden, avec cette histoire de cocaïne, et bien sûr une dose de transphobie éhontée. Imaginez si Biden avait mis en boîte de la même manière Trump sur sa présidence… Et là c’est fait bien sûr avec un goût douteux, avec vulgarité et indécence. Je sais que l’on peut dire que ce n’est pas incroyable car on reçoit des news comme cela toutes les semaines depuis janvier, mais la somme de toutes ces exactions commence à représenter une rupture incroyable dans tout ce dans quoi on pouvait croire… Mais quelles valeurs ont ces gens ?

On entend depuis longtemps maintenant les expulsions et les détentions dans des conditions inhumaines des équipes ICE (Immigration and Customs Enforcement : service de l’immigration et des douanes des USA) qui font partie de Homeland Security (Département de la Sécurité intérieure des USA, soit l’équivalent du ministère de l’Intérieur en France, mais avec beaucoup plus de prérogatives). Sur Twitter, ils font la promotion de leurs services pour recruter des agents ICE pour continuer leurs méfaits. Récemment, ils ont utilisé l’imagerie Pokemon et le slogan bien connu « Attrapez les tous » pour promouvoir ce métier. Et là, ça va encore plus loin puisque c’est carrément le jeu vidéo HALO.

Donc là ce n’est plus question d’attraper, mais bien de tuer, détruire, annihiler des « aliens ». Et c’est officiel.

Cela me fait penser à cet épisode de Black Mirror, avec des soldats à qui on a mis un implant et cela leur fait voir les civils d’un pays ennemis comme des monstres informes. Comme cela, ils les éliminent en mode FPS1, et ils n’ont plus ce scrupule de tuer des êtres humains.

Il n’y a plus à avoir peur des dérives fascistes, le fascisme est déjà là, à l’œuvre.

  1. First Person Shooter : ces jeux vidéos en vue subjective où le joueur est le tireur. ↩︎

Iwak #27 – Oignon

Pour illustrer ce célèbre adage : 1 chat il s’en bat l’oignon, voici une histoire illustrée en 5 cases featuring Sookie et Arya.

Moi : Bon, ça fait une heure que je suis là, mais j’en peux plus, il faut que j’aille pisser !!!!
Sookie : Mais enfin, absolument pas, tu ne bougeras pas !!!!
Arya : Bon allez, il faut bien qu’il aille pisser, soyons cool.
Sookie : Tu te rassieds tout de suite la Gueuse, tu m’as compris !!! Tout de suite.
Sookie : Voilà, t’as compris toi, on s’en carre l’oignon. On ne bougera pas, et toi non plus donc.
Sookie : Et toi La Gueuse, ne t’avise plus de bouger sans ma permission.

Arco (Ugo Bienvenu)

Ce film d’animation est sans doute une démonstration du meilleur de la créativité européenne, car c’est techniquement irréprochable, merveilleux sur le plan artistique et créatif, mais aussi carrément bien négocié et original sur le plan narratif ! Et tout cela en n’étant pas dans une fibre Disney ou Hollywood gnangnan, et pas non plus dans une œuvre inaccessible aux enfants. C’est vraiment un super film pour toute la famille, comme on dit, et qui enfin surprend, émerveille, fait rire et émeut, presque sans erreur de parcours. Sacrée prouesse !

C’est donc l’histoire d’Arco qui est un gamin qui vient d’un futur lointain, un futur dans lequel on vit sur des plateformes dans les nuages, qui reposent sur des piliers car la montée des eaux et les diverses catastrophes naturelles ont mis en péril la vie à la surface. Arco vit peinard avec sa sœur et ses parents, et ces derniers reviennent tout juste d’un voyage dans le temps (celui des dinosaures) pour aller récupérer des spécimens de plantes qui vont leur être utiles. Car avec leurs tenues arc-en-ciel, et un diamant qui diffracte la lumière sur leur capuche, ils peuvent non seulement planer dans les airs mais aussi se déplacer dans le temps en faisant de magnifiques trainées dans le ciel !! Arco est encore trop petit pour les voyages temporels, et il est dég car il veut absolument voir un vrai dinosaure. Alors dans la nuit, il pique la tenue de sa sœur, et il se lance dans le vide pour faire un petit voyage chez des dinos, ni vu ni connu.

Mais bien sûr, il n’y arrive pas. Et malgré un vol plané approximatif et quelques jolis arcs-en-ciel, il atterrit avec pertes et fracas sur la Terre en 2075. La Terre en 2075 montre encore une vie à la surface, mais avec des maisons qui sont protégées par des vraies cloches en verre pour se protéger des intempéries qui détruisent la nature, et même d’incendies dévastateurs.

Il perd son diamant dans la forêt, et il est trouvé inconscient par la petite Iris qui le récupère pour le soigner chez elle. Les deux enfants deviennent potes, et Iris aide Arco à trouver un moyen pour rentrer chez lui. Mais ça ne va pas être simple, les parents d’Iris sont loin pour leur boulot, mais un robot humanoïde, Miki, est là pour s’occuper d’elle et son petit frère. Et trois étranges bonhommes assortis étaient à l’affût des arcs-en-ciel, ils ont repéré le vol inaugural raté d’Arco, et ont réussi à récupérer le diamant !

Tous les ingrédients sont là avec un scénario SF très sympa et plutôt élaboré, avec pas mal de surprises et de révélations jusqu’à la toute fin du film. Mais on a aussi des scènes assez drôles avec le trio « chasseur de trainées multicolores », et l’émouvante relation entre Iris et Arco, mais également celle avec son petit camarade Clifford, ses parents ou le robot Miki, sont vraiment bien racontées, avec subtilité et de manière originale.

Après les inspirations sont assez clairement du côté de Miyazaki sur le merveilleux et le mélange des genres, également aussi sur la DA impeccable et des efforts notables sur la richesse des décors et des paysages. Et clairement sur le thème musical majeur de l’envol avec les rais multicolores, on est vraiment de manière très appuyée sur les mouvements très lyriques de « la légende d’Ashitaka » de Mononoke. Mais là où la patte française est reconnaissable, c’est qu’on y voit aussi du Mars Express et carrément du René Laloux.

Et c’est là aussi où on voit les limites de cette french touch, parce que c’est assez caricatural qu’on garde cette manière très peu naturelle de doubler les personnages. Et pourquoi tous les dessins animés français doivent-ils ressembler aux Mondes Engloutis !!! Après ce n’est pas une mauvaise référence, mais cela donne tout de même pas mal de trucs un chouïa bancals ou maladroits.

C’est une toute petite remarque contrastée sur une œuvre globalement très réussie, et qui, je l’espère, trouvera son public en salle. Et c’est aussi un film qui mérite d’être vu en salle pour profiter du grand écran et de la musique, car c’est vraiment très très beau. Et quel talent donc pour de l’animation françaiiiiiise môssieur !!! ^^

La poule ou l’outil ?

Il y a des tas de réflexions que je trouve assez passionnantes sur la manière de s’exprimer sur les Internets. Comment le faire, sur quels espaces et avec quels outils ? L’accessibilité de tout cela, la portée aussi et les valeurs philosophiques par rapport à l’essence même des principes moraux qui ont porté le web des débuts, à ce qu’ils en sont aujourd’hui, et ce que la société (capitaliste) en a fait aussi de son côté.

Certains dinoblogueurs comme Ploum se sont mis à Gemini qui est un protocole assez récent (rien à voir avec l’IA de Gougueule hein), et qui est plutôt bien adapté à des échanges en ligne par texte, avec bien sûr ses particularités. Imaginez que c’est comme avoir un autre réseau que celui des Internets tel qu’on le connaît. Et donc on se retrouve avec Gemini (que j’ai testé aussi de mon côté évidemment) sur une toile absolument vierge ou presque. Il y a quelques points de repères et de départ où des sites sont référencés, mais il n’y a pas vraiment de moteur de recherche, c’est vraiment un retour au web de 1994. Soooo refreshing!!!

Il y a aussi cette volonté de se réinventer en partant de zéro pour également y tester de nouveaux paradigmes. Et dans cette idée, il y a de plus en plus de blogueurs qui se sont débarrassés de WordPress pour repartir avec des sites statiques plus malléables, légers et surtout minimaliste. Des textes, des idées et de quoi s’exprimer à l’écrit, tout en se liant aux autres. Evidemment je ne compte pas quitter WordPress de mon côté, pas avec 5 929 articles et 45 878 commentaires en banque depuis 2003. ^^

Alors tout cela implique une sacrée aisance et connaissance en informatique, ce que je n’ai vraiment pas, mais je regarde tout cela avec beaucoup d’attention et de curiosité intellectuelle. Mais là ce qui m’a interpelé chez Ploum, ce sont les remarques suivantes :

[…] Mais je n’ai pas rejoint Gemini parce que je me sentais un minimaliste numérique dans l’âme. Je n’ai pas quitté WordPress par amour de la low-tech. Je n’ai pas créé Offpunk parce que je suis un guru de la ligne de commande.

C’est exactement le contraire ! Gemini m’a illuminé sur une manière de voir et de vivre un minimalisme numérique. Programmer ce blog m’a fait comprendre l’intérêt de la low-tech. Créer Offpunk et l’utiliser ont fait de moi un adepte de la ligne de commande.

La pensée fait le penseur ! L’outil fait le créateur ! Le logiciel libre fait le hacker ! La plateforme fait l’idéologie ! Le vélo fait la condition physique !

Peut-être que nous devrions arrêter de nous poser la question « Qu’est-ce que cet outil peut faire pour moi ? » et la remplacer par « Qu’est-ce que cet outil va faire de moi ? ».

Car si la pensée fait le penseur, le réseau social propriétaire fait le fasciste, le robot conversationnel fait l’abruti naïf, le slide PowerPoint fait le décideur crétin.

Qu’est-ce que cet outil va faire de moi ?

Citation à partir de l’article Qu’est-ce que l’outil va faire de moi ? de Ploum.

C’est intéressant non ? On cherche d’abord un outil pour faire quelque chose, mais l’outil va aussi nous conformer à sa propre nature et son propre schéma directeur. Cette prise de conscience permet aussi sans doute d’avoir un peu plus de prise sur son destin et ses valeurs. ^^

Marathon d’en haut

C’était le marathon de Rennes hier et aujourd’hui, avec des tas de courses intermédiaires pour les milliards de fans de course que notre pays semble compter aujourd’hui (le phénomène est vraiment dingue, il faut l’avouer). En tout cas, Rennes était bien achalandée pendant ces deux jours, et comme les parcours passaient en dessous de nos fenêtres, on était au moins aux premières loges !

C’était une course nocturne de 10km donc plutôt une manifestation sympathique de runners convaincus, et il y avait tout un rassemblement de coureurs qui faisaient la fête plus loin. Ce matin, c’était plein de familles et de badauds qui encourageaient les marathoniens. Le truc vraiment qui m’épate, je vous assure, mais donc j’ai observé tout cela (depuis le 16ème étage) avec attention et circonspection. ^^

Sinon il y avait de jolies couleurs ce soir. ^^