La résilience du Bisounours

Quand j’étais petit, j’étais un gentil petit garçon. Sympa avec mes parents, souffre-douleur de mon frangin, mais connu pour être vraiment un p’tit gars cool. On disait à mes parents que je m’endurcirai avec le temps, et qu’il le faudrait en tout cas. En mode : il ne faut pas se faire marcher sur les pieds, bla bla bla… Bah adolescent, j’étais toujours gentil. Les gens, les personnes avec qui j’étais en classe, les profs, la famille, tout le monde disait « Mathieu il est vraiment gentil, poli, respectueux et adorable. »

Mais on ajoutait que ça ne durerait pas, que mes parents allaient forcément vivre un enfer sur terre dans pas longtemps, avec une bonne crise d’ado (c’est sûr que mon frangin à 15 ans était en garde à vue, alors la barre était haute ^^ ). Mais j’attends encore ma crise d’ado, même si j’ai changé évidemment. Mais les amis plus tard, au lycée, dans les études supérieures, puis ceux de Paris, comme disait ma mère1, ont dit « Mathieu, c’est un mec trop gentil. »

Les gens rajoutent ce « trop » superlatif qui est une manière de parler, ou qui indique vraiment peut-être que c’est une disposition anormalement emphatique. J’ai voulu changer pourtant. A plusieurs reprises, je me suis dit merde il faut que j’essaie d’être méchant !! Mais je n’ai jamais réussi. Alors ça doit aussi être un truc un peu maladif et névrotique (qu’est-ce qui ne l’est pas), j’imagine que j’ai besoin qu’on me « trouve gentil » en réalité. Mais force est de constater que je vis très bien avec ça.

Je ne fais même pas d’effort. C’est juste comme ça. J’aime bien les gens, globalement. ^^

Alors après, je me fais niquer parfois. Notamment en restant gentil avec des boulets insupportables qui me gâchent la vie pendant des années. Mais c’est la ma vie. Hu hu hu.

On me qualifie aussi souvent de « La Suisse », et ce n’est pas tant que je fuis les conflits, mais c’est vrai que je suis souvent neutre, ou tout du moins tempéré, pesant le pour et le contre, et essayant toujours de comprendre les opinions des uns et des autres, même lorsque c’est contraire à mon propre système de valeurs. En cela d’ailleurs, je sais que je peux avoir un peu la tendance macronienne insupportable du « en même temps », et je reconnais que je prône en tout cas toujours l’empathie et la compréhension fine du prisme et de manière dont les opinions peuvent se former chez mes contradicteurs. Je trouve que c’est toujours important de bien avoir cela en tête, et que parfois c’est aussi notre cadre de valeurs qui met le bordel.

Il y a aussi un peu de Marc-Aurèle là-dedans, avec une recherche de ce sur quoi je peux agir, qui m’intéresse grandement, et ce qui m’échappe et donc auquel je renonce aisément, étant toujours en quête de mon ataraxie personnelle. J’avoue aussi ne pas souvent rencontrer de personne qui partage ces valeurs là ou cette méthode. Et ça me frustre beaucoup et souvent, car j’ai l’impression de faire un effort pour aller vers l’autre, jusqu’à comprendre, mais pas forcément valider, un raisonnement spécieux pour moi car élaboré sur des postulats très différents des miens. Et quand l’autre ne fait pas le même effort, je trouve que ce n’est pas très respectueux et… gentil. On y revient. ^^

Aujourd’hui avec la polarisation des opinions, la tempérance et la gentillesse ont complètement disparu. D’abord de nos espaces virtuels, puis de notre champ du réel, ce qui est tellement grave et triste. Et donc, ça m’affole de ne voir que des diatribes contre des diatribes, avec des deux côtés des raisonnements viciés. Alors évidemment celui qui est dans mon cadre de valeurs est plus facile à adouber, mais je n’ai vraiment plus de respect pour ces penseurs à la petite semaine, rhéteurs de pacotille et sicaires de réseaux sociaux.

Après, je vois bien qu’on ne fera pas grand chose avec des tièdes comme moi, et qu’il faut aussi avoir un mélange avec des personnalités un peu plus tranchées. Mais je ne supporte pas ces assertions hypocrites qui laissent de côté tous les défauts de leur réflexion. Moi quand je m’exprime, je défends toujours mon point de vue avec ses qualités, et j’expose aussi les limites et parfois les défauts même de ma pensée. Je trouve que c’est le seul moyen d’être honnête, et d’avancer réellement en collaboration. Je trouve que ça rend non seulement crédible, mais aussi que ça donne le droit d’émettre des critiques équilibrées et sincères, pas juste de pisser à la raie du connard d’en face. Hu hu.

Bisounours je suis, bisounours je reste donc. ^^

  1. C’était pour les nouveaux ami·e·s pédés et lesbiennes évidemment, qui n’étaient jamais autrement qualifiés par pudeur, comme si la parisianité était suffisante pour les considérer parfaitement interlopes. ↩︎

Du privilège de la beauté

Je n’ai jamais (très rarement) entendu parler de la beauté en tant que privilège dans la société, et pourtant aujourd’hui plus que jamais, mais sans doute depuis très longtemps, être beau ou belle est sans doute une des *choses* qui ouvrent le plus de portes. On ne parle que de privilèges ces dernières années, et c’est un prisme intéressant qui ne cesse de s’enrichir de nouveaux combats, de nouvelles discriminations qui sont mises en exergue pour être mieux identifiées et combattues.

Et on parle des privilèges… Ceux des hommes, des cisgenres, des blancs, des séniors, des minces, des bien-portants, des valides etc. Mais jamais je n’ai entendu parler de la discrimination contre les moches, et du privilège des beaux. Est-ce que ça n’existerait donc pas ? Hu hu hu.

Mais bien évidemment que oui. Il y a même une page wikipédia à ce sujet, c’est dire si ça existe. ^^

  • Selon une étude, les personnes considérées comme attirantes sont payées 10 à 15 % plus que celles d’une beauté moyenne. Cette différence de salaire est notée aussi chez les PDG.
  • Il est possible que les personnes considérées comme laides soient moins heureuses que les personnes qui ne le sont pas. Elles souffriraient également plus de dépression.
  • Les peines de prison des personnes considérées comme laides sont en moyenne 20 % plus lourdes que chez le reste de la population. Des différences ont été notées en fonction de la nature de la faute : les cambriolages ont conduit à une peine 24% plus lourde tandis que pour les crimes graves (meurtre et viol) l’écart se resserre, mais reste de 10%.
  • Les bébés considérés comme laids pourraient recevoir moins d’amour et d’affection, notamment par leur mère.
  • Les personnes considérées comme attirantes sont perçues comme plus intelligentes.
  • Les personnes considérées comme attrayantes sont perçues comme plus dignes de confiance.
Extrait de la page wikipédia : Privilège de la beauté

Et vraiment, je pense que ces quelques éléments parlent absolument à tout le monde. Mais voit-on des associations de défense des moches ? Non. Des militants de la mochitude qui tapent un 10 au laideronomètre ? Non plus. D’ailleurs toutes les associations qui luttent contre les discriminations insistent pour trouver « beau » les gens, et c’est un des arguments de poids. Black is beautiful, big is beautiful, bear is beautiful etc.

Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil.

Après je sais que c’est une notion relative et tout et tout. Et je ne vais pas non plus dire que les gens moches ne peuvent pas trouver le bonheur, la preuve… Hu hu hu. Mais j’ai toujours été fasciné par ce truc, et j’ai moi-même beaucoup trop cédé aux gens beaux. Enfin surtout quand je les trouvais un peu cons, sinon c’est vraiment insupportable. ^^

Mais c’est vrai que c’est une notion qui trouble beaucoup de gens. J’avais déjà évoqué cela avec M. notamment, il y a donc 20 années de cela. Ce dernier m’ayant toujours dit « Nan mais moi j’aime pas les mecs beaux ». Et c’est vrai qu’il a vraiment été en couple avec toutes sortes de mecs, moi y compris. Et je ne suis pas du tout dans sa « league ». Je le ressentais parfaitement bien, avec des regards lourds de sens dans la rue ou les soirées, et parfois quelques remarques narquoises ou carrément désagréables1. Et ce n’était pas toujours facile, mais j’avais, étrangement, assez confiance en moi pour le vivre pas trop mal. Et il me faisait assez sentir son amour et son désir aussi pour cela. (Et heureusement, je me trouvais beaucoup plus intelligent et cultivé que lui. ^^ )

Même ma maman, qui pourtant a le devoir de me trouver la septième merveille du monde, m’avait dit qu’il était vraiment très très beau, du genre « par rapport à toi ».

Je ne trouve pas que c’était spécialement une qualité de sa part de ne pas avoir un critère de beauté très « exigeant », et pas non plus un défaut de la mienne d’avoir succombé également à son joli minois. Les relations amoureuses sont une alchimie complexe, et tout devrait être possible. Mais il n’en reste pas moins, que j’ai pu constater les nombreux privilèges qu’il gagnait avec cela au quotidien.

Depuis hier, les Internets frémissent et bruissent de ce fameux Luigi M. qui a assassiné le directeur d’une mutuelle privée étasunienne. Son physique avantageux et sa belle gueule lui valent d’être largement considéré comme un héros de la lutte des classes, alors que s’il avait été moche je suis certain que la situation serait regardée de manière diamétralement opposée.

Et une fois n’est pas coutume, un peu d’autofellation, puisque j’avais déjà effloré ce sujet il y a quelques temps dans un article où je faisais le lien avec le passing et la transidentité.

Il y a en revanche une chose qui a tout changé, et qui est à la fois géniale et qui m’agace au plus haut point : le passing. Evidemment que c’est majeur et important d’être reconnu, pour des personnes binaires, dans son genre. Et les innovations extraordinaire en médecine, tant pour les hommes que pour les femmes, ont grandement amélioré la vie des personnes trans et leur intégration à la société, puisque « ça ne se voit plus ». Et dès lors qu’on ouvre cette boîte (de Pandore), on se frotte forcément à ce putain de privilège de la Beauté (qui m’insupporte). Et alors, on en vient à faire des différences et des jugements de valeurs dégueulasses. Il y a alors les bons trans et les mauvais etc. De la même manière que l’acceptation grandissante des gays dans la société est valable et validée pour ceux qui sont beaux, musclés et doués en décoration.

Mais d’un autre côté, ces ambassadeurs et ambassadrices ont un pouvoir extraordinaire et font bouger les lignes. Donc ça m’interpelle et me trouble… Et j’en suis moi-même une énorme victime influençable, alors que je m’émerveille de transitions qui aboutissent à des personnes belles en dedans comme en dehors (j’avoue que le passing a cet effet).

J’avais bien aimé en cela les deux séries TV avec un thème trans très poussé qu’étaient « Pose » et « Transparent ». Et étonnamment, là où la première se passe dans les années 80 et 90 à l’époque NYC, VIH et Ballroom, on avait des comédiennes trans qui étaient « trop » belles par rapport à une représentation historique qui se voudrait fidèle. Mais après tout, quel intérêt ? Et leurs physiques sublimes ont parfaitement servi l’intrigue… Pour la seconde, avec « Transparent », c’est le contraire puisque la série est contemporaine mais montre justement des trans « qui se voient » avec un côté plus naturaliste certes (surtout avec des trans plutôt âgées), mais qui fait justement l’impasse sur les personnes au passing plus abouti. Et encore une fois, ce qui est plutôt cool au final, c’est l’ensemble de ces représentations, et la diversité qui est présentée. Ce qui est cool aussi c’est enfin d’avoir ces représentations dans des séries, et qui arrivent à transcender ce sujet même de la transidentité.

Sur un sujet connexe, je me suis fait la même réflexion sur la mini-série gay du moment « Fellow travellers » où on a deux mecs homos qui vivent une histoire singulière entre les années 50 et 80. Les deux mecs sont Matt Bomer et Jonathan Bailey, et ils ne sont absolument pas crédibles en mecs pédés dans le placard des années 50, dans le sens où à cette époque les mecs n’avaient absolument pas des corps aussi secs, dessinés et musclés avec des abdos taillés à la serpe. Or, la série est aussi là pour montrer des magnifiques pédés aux corps parfaits comme on les célèbre aujourd’hui. Je trouve ça naze, et un manque criant de fidélité à une reconstitution historique.

Bref, j’arrête avec ce privilège de la Beauté, mais il faudra que j’en fasse une tartine un de ces quatre.

Extrait de l’article Adelphité Trans de mon propre blog.

J’ai souri récemment, quand je parlais de mon filleul à une de ses anciennes profs. Et elle me parlait de problématiques de racisme qu’elle avait constatées, notamment lorsque des enfants d’origines magrébines se retrouvaient dans de bons lycées à majorité blanche. Mon filleul est lycéen depuis la rentrée justement dans un de ces bons lycées, et je m’enquérais2 auprès d’elle s’il pouvait avoir des problèmes similaires. Elle m’a tout de suite rassuré : Non il est trop mignon pour ça. Il aura tous les copains et copines qu’il voudra.

Et c’est vrai que j’ai pu constater comme la beauté est un privilège efficace pour se prémunir de certains racismes (pas les plus profonds et rétrogrades). Mais il n’est jamais cité dans les convergences de luttes ou de haines. Peut-être justement parce que c’est un privilège bien distribué dans la population ? Mais finalement non, puisque les normes de la beauté changent, et qu’il y a plus d’inclusion aujourd’hui dans ces principes normatifs mêmes (au-delà de l’injonction morale à dire en toute hypocrisie qu’il y a de la beauté dans toutes et tous… mais oui, et puis finalement c’est pas faux en plus ^^ ).

Mais donc cela restera toujours un privilège tacite, et une discrimination à l’opposée tout aussi silencieuse et taboue ? Je n’arrive pas à m’imaginer un changement pareil, mais peut-être que ça viendra avec le temps.

  1. J’ai beaucoup expliqué qu’il était avec moi pour ma grosse bite, et ça avait à l’époque convaincu un nombre surprenant de gens, alors que je disais vraiment ça sous forme de boutade imbécile. ↩︎
  2. Purée, je suis pas du tout sûr de moi là. Comment je conjugue ça M. Fraises ?? ↩︎

Convergence des luttes et convergence des haines

Il y a quelques temps mes pérégrinations virtuelles mastodonesques1 m’ont amené vers le profil d’Elia J. Ayoub, puis son podcast « The Fire These Times« , et par sérendipité juste sur un épisode intitulé « This Arab is Queer ». Eh bien, vous me croirez si vous voulez, mais ça a aiguillonné ma curiosité. Hu hu hu.

J’ai ainsi pu écouter des coreligionnaires arabes et queer qui discutent notamment de l’ouvrage présenté par Elias Jahshan : This Arab is Queer.

C’est un regroupement de plusieurs textes qui avait aussi été présenté à l’IMA l’année dernière, et qui permet de découvrir des auteurs et autrices LGBT qui s’expriment véritablement sur leurs ressentis et leurs expériences « de première main ». Le podcast permet d’avoir un petit aperçu de cela, mais aussi d’avoir un discours très nuancé et plutôt sain, à mon avis. C’est à dire qu’on n’est pas du tout dans le fait de prôner l’occident comme seul havre pour les LGBT, ni à dire que c’est le rêve d’être pédé au Moyen-Orient, mais qu’il y a des nuances dans tout cela. L’homophobie est terrible à vivre dans les pays arabes, mais on y trouve aussi des évolutions et de l’optimisme, et il faut s’y battre pour que ça continue, et même en assumant des paradoxes moraux et religieux. Le racisme existe dans les pays occidentaux, mais c’est encore là qu’on y trouve un vrai espace de liberté, et qu’on améliore aussi la société dans bien des domaines. Oh que ça m’a fait du bien d’entendre cela.

Bref, j’ai trouvé ça assez salutaire par rapport à toutes les mises en boîte instantanées que je lis tous les jours. Les discours totalement symétriques et diamétralement opposés consistant à être : pour l’arrêt du massacre des gazaouis et donc propalestinien et donc antisémite, ou pour la défense d’Israël suite au 7 octobre et donc islamophobe et d’extrême droite.

Et de la même manière, j’ai vu fleurir des tas de mèmes et de blagues de droitards sur le fait que des associations queer revendiquent un soutien à la Palestine en mode « chickens for KFC » comme ci-dessous ou pire. Le pire étant sans doute quand Marianne reprend cela pour le traduire « Les dindes votent pour Noël » avec en plus une jolie métaphore homophobe bien sentie. ^^

Mais pourtant, on peut soutenir le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, avant même de parler de droits LGBT, parce que là c’est juste ça quoi. Et pour autant, ça ne réfute absolument pas l’homophobie comme valeur cardinale de ces gens, mais juste on voudrait qu’on arrête de les massacrer sous un faux prétexte, juste parce qu’on aimerait bien s’en débarrasser une bonne fois pour toute pour annexer leur territoire. Et en face, l’acceptation de façade des LGBT ne tient pas une seconde, quand on voit la réalité des valeurs d’un gouvernement israélien d’extrême droite. Si en revanche Israël est bel et bien un pays assez tolérant des LGBT, c’est bien un ensemble de valeurs portées et défendues par des gens de gauche, les mêmes qui sont aussi contre la politique d’extermination et de colonisation de leur gouvernement.

Orphéus en a parlé récemment, et c’est ce qui m’a décidé à reprendre cet article. ^^ Je repensais à un article que j’avais écrit en 2006 en revenant de vacances en Israël (que j’ai adoré !), qui m’avait valu une sacrée volée de bois vert. Et le pire c’est que je ne démens pas ma maladresse ou même mes torts. Oh mais que j’en ai des torts et des défauts ! Mais on est presque vingt ans plus tard, et en réalité c’est juste exactement la même chose…

Et pourtant ça me titille, car oui l’antisionisme2 est aussi le repaire des antisémites, tout comme l’anti-mariage gay est celui des homophobes alors que la manif pour tous nous a seriné être très très acceptante et gay-friendly. Je sais donc que les discours un peu trop sophistes peuvent vraiment faire prendre des vessies pour des lanternes.

Et moi-même, je critique certains gays de droite qui ferment les yeux sur l’homophobie de leurs gouvernants, et ils pourraient me répondre que l’on peut séparer les choses comme je le fais pour la Palestine. ^^ Comparaison n’est pas raison, je sais. Et là c’est un peu gonflé comme raisonnement, et un vrai syllogisme au final. Mais j’essaie aussi de tester les limites de mon propre raisonnement, et de mon propre système de valeurs.

La convergence des luttes nous incite à essayer de dépasser certains clivages, et a essayé aussi de penser au-delà, ou bien c’est juste une intersection de velléités protéiformes jusqu’à un mouvement si singulier qu’il ne représente plus rien ni personne ? Mais la convergence des haines, on l’a vu parfaitement incarnée lorsque lors de la manif pour tous, en 2012, des représentants officiels des religions chrétiennes, juives et musulmanes s’étaient ligués au-delà de leurs propres inimitiés. Ils avaient défilé dans leur haine commune des LGBT, et on a même pu y voir un certain terreau optimiste de valeurs communes… Mein gott.

Pour finir, cette situation actuelle me paraît juste parfaitement illustrée par ce mème que j’ai posé en tête d’article. J’en parlais déjà en 2006, le truc est tellement imbriqué, avec de la haine des deux côtés, des exactions des deux côtés, des gens qui ont tort et raison des deux côtés, et depuis tant de temps, que revenir aux raisons pragmatiques et légales d’origine paraît illusoires. On s’en sortira donc autrement que par un simple exercice de raison, de droits ou de morale, et pas à l’aune du respect des droits LGBT même si c’est tentant pour certains (adeptes du pinkwashing). Mais je n’ai pas idée de comment… En tout cas je suis incapable de dire qui a le droit ou qui devrait. Il faut juste que les massacres s’arrêtent !

  1. Vous voyez que ce réseau social sert à quelque chose !! ^^ ↩︎
  2. J’en parle très directement et sans ambages dans mon post de 2006 et je réutiliserais pas la même phrase aujourd’hui car ce serait trop maladroit (ça l’était déjà) malgré la grande complexité et subtilité de cette notion qui est parfaitement bien documentée dans sa page Wikipédia. ↩︎

Iwak #26 – Caméra

J’ai un attachement très limité aux choses matérielles, en tout cas pour leurs valeurs financières ou leurs usages comme un signe extérieur, mais les choses pour moi sont importantes pour leurs pouvoirs d’évocation et leurs charges mémorielles très singulières. J’avais évoqué déjà ça il y a dix ans dans un article où je listais quelques colifichets et talismans personnels qui sont très précieux à mes yeux mais qui ne valent rien.

Je me rappelle de l’air inquiet de certains quand j’ai dit que j’avais un truc à récupérer dans la maison de ma grand-mère lorsqu’elle est décédée. Et quand je suis revenu avec un vase en porcelaine de quelques centimètres de haut qu’elle avait eu avec un catalogue « Bergère de France », les gens étaient beaucoup plus détendus. ^^

Quand j’ai déménagé de chez mes parents, j’ai récupéré des tas de petites choses qui sont passées tout à fait inaperçues, car c’était des merdes ou des bibelots de fond de tiroir, mais cette caméra Super 8 Bell & Howell que je montre, et qui appartient à ma maman, est sans doute un des fleurons de mon cabinet de curiosité mémoriel.

Ma maman l’a achetée en 1970, et la caméra a servi à immortaliser des tas de petites séquences de vacances en famille avant ma naissance, et un peu après. C’est impressionnant à prendre en main car c’est un truc très analogique et mécanique bien sûr. C’est lourd car il y a peu de plastique mais beaucoup de mécanismes en métal. L’objet est beau et impressionnant mais en plus il est dans une sacoche en similicuir avec un revêtement intérieur rouge en velours, ce qui en fait un écrin encore plus « riche ». Mais je n’ai jamais vu ces films, car les bobines se sont perdues, les projecteurs ne fonctionnent plus, les écrans ont été jetés, et les gens sont passés à autre chose.

Il ne restait plus que cette caméra qui trainait dans un recoin de la maison de mes parents, une sacoche recouverte de poussière, mais bien emmitouflée dans 30 années d’inactivité. Ma mère n’a pas moufté quand j’ai demandé si je pouvais mettre la main dessus. J’ai prétexté vouloir l’utiliser à Paris peut-être… Et en effet, je m’étais procuré un film, et j’avais fait quelques tests simplement pour voir si ça marchait encore. Et c’était bien le cas. Mais il fallait (encore aujourd’hui c’est le seul moyen bon marché) acheter un film vierge en Allemagne par correspondance, et le faire développer à distance outre-Rhin.

Mais bon, les procédés argentiques se sont rapidement éteints, et le numérique a tout conquis, avec ce truc assez paradoxal qu’on perd beaucoup plus de clichés ou de films comme cela. En effet, l’éphémère fonctionne bien, et on se partage beaucoup plus de supports numériques « sur le coup ». Mais on met ça sur des réseaux sociaux, dans des mémoires de téléphones, sur des espaces de stockage distants ou des disques durs pour les plus aventureux (de la vieille école en réalité). Et donc tout ceci va forcément se perdre. On gardera plus de traces de nos supports papiers des années 80 qui passeront de garages en garages que nos photographies entièrement numériques qui ne survivront pas une mise à jour d’un système d’exploitation (et encore moins un hiver nucléaire ^^ ).

Je suis le seul dans ma famille à avoir des archives assez complètes en ligne et accessible de toutes mes photos, y compris ce que j’ai pu scanner des négatifs des années 30 à 60 de mon grand-père, des photographies papiers chez mes parents, et de tout ce que j’ai capturé sur mes téléphones ou appareils photos numériques de ces 25 dernières années. Je ne sais pas ce qui fait mon attachement ainsi à une mémoire collective qui n’aura pourtant aucun transmission à mon niveau, mais ça me satisfait moi, c’est déjà ça.

Dans les quelques bobines que j’ai pu récupérer, et que j’avais fait transposer en VHS au tout début des années 2000, il y avait ce bout de film que j’ai fini par capturer en numérique. Cela explique donc la pixellisation ultime et la résolution dégueulasse de ce machin. Depuis tout a été perdu ou jeté, en tout cas je n’ai plus d’autres traces que cela de ce film super 8. Je l’ai déjà publié plusieurs fois, il date de 1977, et se passe dans le jardin de ma grand-mère. C’est forcément ma maman qui filme, car mon frère vient vers elle tout de suite et lui tend quelque chose avec familiarité. On y voit mon père et mes oncles qui jouent aux boules dans une allée qui n’est pas encore pavée, et ma grand-mère et ma tante s’occupent de moi. Après c’est un gros plan de moi dans les bras de ma grand-mère (on doit être au printemps 77). Et enfin ma cousine Virginie qui fait la tronche avec mon frère Jérôme qui tente de la dérider pour la caméra.

Extrait d’une vidéo Super 8 de famille du printemps 1977

Iwak #24 – Expédition

Ça n’a pas l’air comme cela d’une « expédition », mais ça l’était vraiment pour moi. J’en parle aussi car cela fait tout juste vingt ans, c’était début octobre 2004, que j’ai passé une semaine tout seul à Mykonos. J’en avais parlé directement de là-bas, donc je ne vais pas tant m’étendre, mais je trouve tellement cool d’avoir aujourd’hui ce coup de rétroviseur dans ma vingtaine finissante.

C’était super exceptionnel pour moi dans le sens où c’était la première fois que je partais tout seul en vacances, et tout seul tout court, où que ce soit. Et je n’étais pas rassuré du tout de partir seul à l’étranger, mais j’avais besoin de ça. Ma rupture avec M. était enfin complètement consommée après trop de mini retours de flamme qui ne se réduisaient qu’à des soirées finissant par du cul (et plein de bisous). Là on était bien décidé tous les deux à passer à autre chose. Et ce séjour en octobre, aussi inhabituel pour moi mais lié à des contraintes de boulot (impossible d’en prendre l’été ou en septembre), était un voyage initiatique et une sorte de dépassement de soi. Mais j’étais surtout malheureux comme les pierres, et je voulais broyer du noir jusqu’à ne plus avoir de carburant.

J’y ai beaucoup écrit (plein de choses non publiées), mais surtout je me suis retrouvé juste seul avec moi-même, et finalement c’était assez fertile et épanouissant. J’avais mon appareil photo numérique à deux balles que j’adorais, à une époque où l’argentique était encore légion, et qui me permettait de prendre des milliers de photos sans me soucier des péloches ou du développement. C’était à l’époque où on voyait une curieuse convergence avec des vrais appareils photos numériques qui dérivaient de l’argentique et qui coutait un bras, et les fabricants de webcams qui lançaient des modèles qui ressemblaient en effet à des « webcams portatives ».

J’ai eu plusieurs de ces appareils de geek qui faisaient des photos absolument dégueulasses, mais qui aujourd’hui ont une saveur particulière, aussi pour leur aspects granuleux et ultra basse définition. Mon préféré, c’était mon Logitech qui m’a fourni des tas de photos sur les 5 premières années du blog. Il était minuscule, avec une capacité impressionnante et super discret ! Je trouve que c’est un segment de produit qui manque aujourd’hui avec les qualités actuelles de « webcam ».

Logitech Digital Cam

Alors que je comptais rester seul pendant une semaine. J’ai été rapidement accueilli par un tout jeune chat, qui s’est révélée chatte, qui a miaulé à ma fenêtre en arrivant dans ma chambre.

C’était ma toute première fois en Grèce, et je n’imaginais pas que l’île était, comme beaucoup de ses sœurs des Cyclades, très bien achalandée en félins de tout poil. Cette petite rouquine, qui ressemble beaucoup à Arya, m’a tenu compagnie pendant la semaine. Bien sûr, elle cherchait pitance, mais aussi des tas de câlins, et elle restait dormir ou faire la sieste avec moi entre deux promenades.

J’ai passé des heures et des heures à marcher sur ce caillou pas très intéressant, et j’ai plutôt fui les endroits « habités », et donc malgré quelques furtives rencontres, je n’ai pas du tout joué la carte du lieu gay par excellence. J’ai capahuté en écoutant Philip Glass avec mon petit « mp3 player » (c’était une clef USB sur laquelle il fallait charger les fichiers depuis un PC, et qui se rechargeait aussi comme cela) qui a été un super compagnon à ce moment là.

La veille de mon départ, la petite chatounette avait disparu, et elle n’avait pas dormi avec moi, ce qui m’avait un peu attristé, car je n’avais pas pu lui dire aurevoir. Alors que j’allais choper mon bus pour repartir avec ma valoche, dans l’allée qui permettait de sortir de la résidence, elle se tenait sur le muret. Et comme à son habitude, elle se mit à miauler comme une dingue à mon passage. J’étais content, j’ai pu lui dire aurevoir.

C’est aussi il y a vingt ans dans un post qui parle de ces vacances, que j’ai publié cette vidéo qui est devenue un peu ma marque de fabrique pendant quelques années (pour ceux qui me connaissaient évidemment ^^ ) : mannah mannah. Je ne résiste pas à vous le repartager vingt ans après pour une nouvelle empreinte mémorielle itérative (un truc qui vous rentre dans la tête quoi), et pour les nouveaux qui découvriraient on ne sait jamais.

Iwak #23 – Rouille (Rust)

J’ai déjà évoqué une certaine appétence à la rouille depuis la petite enfance et les lits en métal pour la sieste en maternelle. Mais en plus de jouer avec des poules ou des boulets de charbon chez mon grand-père, j’ai évoqué une vision plus rose chez ma grand-mère, mais c’était en oubliant l’arrière de sa maison où on adorait jouer près des cuves à mazout rouillées. Vous me reconnaissez peut-être sur cette photo, où je suis avec mon frangin et mes deux cousines, près des fameuses cuves dont l’odeur nous prenait un peu la tête, mais qu’on aimait bien.

Mein gott, entre les merdes de poule, la peinture au plomb qui s’écaillait, le mazout qui fuyait de cuves rouillées, on est absolument tout sourire, et j’adore que quelqu’un (sans doute ma môman) a jugé bon de nous immortaliser ainsi, dans ce décor idyllique. Mouahahahah. Mais bon c’était aussi ça l’insouciance de cette époque, et pour moi ce sont des souvenirs géniaux. Je n’avais aucune conscience de ce mode de vie très prolo et d’une simplicité déconcertante. Mais c’est vrai qu’on laissait facilement les gamins à s’amuser un peu comme bon leur semblait tant qu’ils fichaient le camp dehors.

Je me souviens aussi que je ne comprenais pas pourquoi tout le monde n’utilisait pas Frameto !!! Il y avait la pub mille fois par jour, et j’étais fasciné par celle avec le plongeur qui date de 1986 (comme quoi mes souvenirs sont potables, j’avais 10 ans). Je trouvais génial ce truc qui permettait de transformer la rouille en métal, et après tu veux vivre dans l’eau sans rouiller. Fabuleux ! Donc j’arrêtais pas de promouvoir ça auprès de ma grand-mère et mes parents, mais tout le monde souriait poliment, et m’ignorait. Apparemment la publicité n’avait pas le même effet sur eux. Mais je trouvais ça fou car cette panacée aurait pu prolonger l’existence de cette pauvre cuve à mazout souffreteuse et phtisique.

Après, je n’avais pas pour autant tenté de convertir mes parents à Ovomaltine (j’ai dix s’condes pour vous dire) ou Juvamine (Juvabien ?), donc peut-être que le moustachu made in 1986 a aussi eu un impact sur mon assuétude à Frameto. ^^

J’aimais aussi beaucoup la pub Ricoré (on était des consommateurs) et la chanson que tout le monde connaissait sur l’Ami Ricoré (chantée par Corinne Hermès en 1982, vous le saviez ?). Donc je ne résiste pas à vous partager le nouvel Ami Ricoré… du Nord. ^^

Iwak #22 – Camp

J’ai souri en voyant hier chez Estèf son anticipation grave du mot du jour1, alors que moi tout de suite je pense : GAY KITSCH CAMP2 ! Et le « camp », j’en ai entendu parler la première fois quand j’étais à Newcastle pour mes études en 1996. Je me souviens bien avoir vu cette expression (j’avais vu ça sur un flyer ou un petit livret au Tyneside Cinéma) et avoir eu du mal à la comprendre, et obtenir une explication de Brian à ce sujet3.

Le vocable fait aussi parti de notre langue, et il en a peut-être l’origine :

Le camp, terme anglais probablement tiré du français « se camper » (« prendre la pose »), est utilisé par les historiens de l’art et les critiques culturels pour décrire à la fois un style, une forme d’expression. L’esthétique camp joue sur l’exagération, le grotesque, la provocation et l’ironie et émerge comme une forme de sensibilité importante dans la culture des années 1960. Le style camp est aussi décrit comme un regard propre à la sous-culture gay masculine, et queer en général.

Page wikipédia pour Camp (style)

Et il se trouve qu’hier un de mes vidéastes préférés des Internets : *Very* Nasty Stories, aka Max, a sorti une superbe vidéo à propos du Camp et du Polari. C’est un créateur génial selon moi qui publie des vidéos très intéressantes, fouillées et documentées sur les films d’exploitation (de la série B, de l’horreur, du cul, des petits budgets mais aussi des trucs arty tout à fait cultes et au ton ou à la liberté totale) et leurs lectures queer plus ou moins crypto. Il y a beaucoup de choses à dire à ce sujet, et vraiment il excelle à vulgariser et donner des tas de codes sur ces sous-cultures.

Je vous laisse le découvrir dans la vidéo suivante sur ce passionnant sujet donc !

Et en plus, il est super mignon pour ne rien gâcher. La vidéo d’origine est bien sûr visible sur son post chez IG.

Le Polari c’est donc une sorte de Lingua Franca ou de Pidgin : Le polari (de l’italien : parlare, aussi orthographié palarie, palare ou parlary) est un argot ou un sociolecte parlé en Angleterre par des populations diverses généralement en marge de la société : hommes et femmes de spectacle, marins, homosexuels, etc. Et donc cela permettait d’échanger à mots codés et de se repérer. On retrouve finalement des stratégies différentes mais similaires aujourd’hui lorsqu’on détecte des signes plus ou moins subtils chez nos coreligionnaires (un pantalon aussi moule-burnes c’est pas un hétéro ça ma fille !!).

Ce qui est étonnant et qu’on pourrait aussi nous appliquer aujourd’hui, c’est que le Polari a été révélé au grand public lors d’une émission de la BBC dans les années 60 avec le grand succès de Round the Horne qui présentait un duo cryptopédale : Julian et Sandy (interprétés par Kenneth Williams et Hugh Paddick qui jouaient les folles hurlantes « camp »). Et dès lors que les expressions sont devenues « mainstream » (et que l’homosexualité a été dépénalisée), la langue est largement tombée en désuétude. Si vous voulez jeter un coup d’œil, voilà un dictionnaire. ^^

Cela me rappelle un peu la vague « Drag Queen » qui a commencé avec RuPaul Drag Race en 2009, je touitais tout seul à ce propos à l’époque, et je me moquais du recyclage du « Sachez Chanter » du tube de RuPaul de 1993 Supermodel (You Better Work)4.

A cette époque, et jusqu’en 2014 (la saison 6 a vraiment changé la donne), on était vraiment quelques furieuses à connaître et suivre les saisons. Et quand on croisait des congénères converties, on pouvait en parler et on était clairement incompréhensible pour les non-initiés. Après, la saison 6 et Bianca del Rio, à peu près tous les gays ont commencé à regarder en masse, et c’est presque devenu un langage queer commun, en plus de la réémergence des créatures dans les bars gays (car le tout premier mouvement date bien du milieu des années 90, on avait eu le groupe « Sister Queen » en 1995 avec le tube « Let me be a Drag Queen »).

Mais depuis 2022, on a une arrivée en France de manière très populaire, car à la télévision, et ça change tout. Les drags et tout le vocabulaire qui va avec ne sont plus l’apanage de quelques-uns (ce qui n’enlève rien bien sûr au bienfondé du mouvement ou de la tendance). Cela retire juste le côté crypto et signe de ralliement, même s’il est tout de même aujourd’hui le signe d’une personne alliée, et ce n’est pas rien.

Bon j’ai bien divergé, mais retenez que le compte de Max est à suivre avec des tas d’anecdotes très peu connues (de moi) et vraiment passionnantes !!

  1. « Camp à venir. Quel mot terrible. » chez Estèf. ↩︎
  2. C’est une maison d’édition créée par Patrick Cardon en 1987. ↩︎
  3. Il m’avait déjà expliqué l’expression « friend of Dorothy » pour dire pédé, en référence à Judy Garland. ↩︎
  4. Enfin pour moi, ça a toujours été ça depuis les années 90, donc un truc en français. Mais je suis en train de voir dans les paroles officielles que c’est bien « sashay shantay » donc je suis circonspect maintenant. ^^ ↩︎

Iwak #21 – Rhinocéros

Il est assez récent mais je suis très très fan de mon rhinocéros, œuvre de Chris Evans, qu’on voit en figure de proue, sur laquelle j’avais flashé. Formellement je la trouvais superbe déjà, et vraiment son style et son procédé de création me plaisent beaucoup, mais l’histoire derrière l’animal et sa représentation avait fini de me conquérir.

A l’origine, en 1974, c’est ce rhinocéros là qui est conçu par deux artistes de Boston, Daniel Thaxton et Bernie Toale, en représentation du mouvement LGBT (et sans doute plus gay qu’autre chose à cette époque).

Un rhinocéros lavande, mais pourquoi vous demandez-vous ?

« it is a much maligned and misunderstood animal » and that it was lavender because that is a mix of pink and blue, making it a symbolic merger of the feminine and masculine.
[« C’est un animal très décrié et incompris » et qu’il s’agissait de lavande car c’est un mélange de rose et de bleu, ce qui en fait une fusion symbolique du féminin et du masculin.]

Page wikipédia LGBTQ symbols

Voilà le genre de supports promotionnels qui ont alors été créés pour être diffusés notamment dans le métro de Boston pour promouvoir la Pride de 1974 de juin.

Mais voilà qu’au mois de mai, la régie publicitaire du métro annonce à l’association (Gay Media Action) que dans l’impossibilité de déterminer l’éligibilité de la publicité pour un tarif « institutionnel », on allait finalement passer de $2 à 7$ par impression. C’était impossible d’augmenter comme cela le budget, donc la pub n’a jamais été diffusée, mais la polémique a produit quelques articles de presse.

Et comme un bon effet Barbara Streisand, ce fut un déluge de rhinocéros lavande à la Pride de Boston de 1974 (t-shirts, pins, pancartes), dont une représentation grandeur nature en papier mâché sur un magnifique char ! Et depuis c’est un symbole (américain donc) important des mouvements LGBT.

Iwak #19 – Crête (Ridge)

C’est encore une vue du cirque de Mafate depuis le Maïdo à la Réunion, car c’est ce qui m’est tout de suite venu en pensant au mot « crête ». Cela m’a fasciné de faire quelques randonnées en passant presque sur ces étroits chemins qui sont juste sur le fil de la montagne, avec des pentes des deux côtés. Mais la métaphore m’intéressait plus sur le coup. ^^

Et je pense aussi à ces blogueurs qui, nativement, viscéralement, sont arrivés sur le fil, et ont parcouru un chemin de crête qui ne pouvait être qu’éphémère. Briller très fort mais peu de temps, car l’un ne va pas sans l’autre. C’est aussi d’ailleurs en cela que je reconnais ma propre médiocrité1, condition sine qua non à une certaine longévité.

Je pense à des Mennuie, Paumé, Bradshaw ou plus récemment Gauthier et Quentin, qui se racontaient entiers et écorchés, et qui par définition ne pouvaient pas continuer à se promener sur la crête les yeux bandés indéfiniment. Cela a permis pendant quelques temps de nourrir le flot fertile et renouvelé de ces histoires et anecdotes qui passionnent les foules (parce que c’est passionné, c’est du cul et c’est une bonne dose de dopamine et sérotonine dans des Internets sous Prozac).

Mais j’ai mes propres petits plaisirs non coupables, ceux qui n’ont pas forcément fait l’unanimité ou qui ne sont légion que dans mes favoris et flux de syndication, et lorsqu’ils s’éteignent je suis seul à pleurer leur disparition dans mon coin. Surtout que souvent, ça se résume à un arrêt des publications, et que je réalise leur disparition au hasard de mes errements sur la toile, ou en revisitant des anciens articles.

Mawy ou son bédéblog Koudavbine2 en font clairement partie. J’ai adoré la lire toutes ces années, mais ça fait deux ans qu’elle ne publie plus, et les dernières fois c’était en partie pour fournir les explications. Ça sent le sapin !!! Mais j’adore son blog car c’est l’antithèse du truc web d’aujourd’hui. Elle dessine à la main et elle publie les scans, c’est une goudou reloue et assumée qui tire à boulets rouges, et ça se barre dans tous les sens avec de la caricature, des anecdotes, de vrais brûlots queer et furieux plutôt bien sentis, et vachement d’humour et de dérision dans tout cela.

Je ne me suis jamais remis de ses Pokémons. ^^

Des chats bien sûr, tels qu’on les connaît bien ces suppôts de Satan !!

Mais en pleine pandémie, des adaptations nécessaires, jusqu’aux principes ACAB bien inspiré à partir d’un black bloc. ^^

Le poké Lunacup avec l’attaque « bois mes règles » si c’est pas de l’humour de Xena la guerrière ça !! ^^

(Ses chats s’appellent Greta et Perli.)

L’Ado qui évolue en Booer avec l’attaque « Ouin ouin », c’est collector. Et Nucléair en Croissansverte juste avec une fleur !!!! Mein gott. ^^

Rien à voir, mais tout à voir, je viens de réaliser que Tto s’est barré aussi !!! Il n’a rien dit et ça fait, si j’en crois l’archive de ses flux RSS, plus de 6 mois qu’il a tiré sa révérence. Nan mais tout fout l’camp j’vous jure !! Me voilà encore en deuil. 🙁

  1. Qui veut juste littéralement dire « moyen », je ne me flagelle pas. Hu hu. ↩︎
  2. Koudavbine = could have been hein. ^^ ↩︎

Iwak #18 – Conduire (Drive)

Apprendre à conduire na jamais été dans mes priorités, et mes parents l’ont vite compris en m’obligeant à suivre la Conduite Accompagnée. Là je n’ai pas eu le choix, et pourtant j’avais clairement exprimé que je n’en avais pas envie. Mais ma mère a été radicale en mode non-négociable : t’habites en grande banlieue, tu passes ton permis !

Tout a été pénible et flippant pour moi dans ce processus. Le code, raté la première fois, et les heures de conduite : supplice d’Ixion1 par excellence. J’y allais la boule au ventre, je subissais ces soixante minutes infernales sous l’autorité du vieux proprio de l’auto-école qui était très sévère et parfaitement désagréable, mais c’était trop cool d’apprendre à conduire me disait tout le monde, et mes parents me payaient tout ça, c’était une chance. Youpi les Babous.

Ce moniteur décati, ma redoutable némésis à double-pédalier, me faisait mille reproches, ne comprenant pas mon ignorance des bases de la mécanique, ou que mon père ne m’ait pas déjà fait conduire avec lui, ou encore que je ne sache pas utiliser les pédales2 ou passer les vitesses alors que ce sont des réflexes instinctifs chez les hommes. Et il pilait en plein milieu d’une rue alors que je conduisais pour me gueuler dessus, ce qui me faisait peur, me disait que j’étais nul, qu’il me faudrait au moins trois ou quatre tentatives pour avoir mon permis.

Mais môman avait bien senti que j’étais pas dans mon assiette, et j’ai fini par cracher ma valda. J’avais été très surpris, car pour l’école, par exemple, même avec les pires psychopathes, il fallait s’adapter et manger son caca. Mais là ce n’était pas l’Education Nationale, là c’était mes parents qui payaient et une sacrée somme pour eux. Donc elle s’est déplacée pour expliquer que si l’on ne me trouvait pas un moniteur plus adéquat, elle refusait de payer la suite et elle me bougeait d’endroit. Je n’ai plus jamais revu le proprio que de loin. Ouf !

Et j’ai eu Marielle en monitrice, et c’était génial. Elle était douce, gentille et pédagogue. Je pense qu’elle était trop fille à pédé, et qu’elle m’a directement grillé en réalité. Tant mieux pour moi !! On a fait un virage à 180°, je suis allé à mes leçons le cœur léger, et on a beaucoup ri et échangé. Et j’ai réussi la conduite.

L’inspecteur a dit « Il faut vraiment que je sois un supporter de la conduite accompagnée pour vous la donner. C’est vraiment parce que vous allez conduire deux ans avec vos parents !! ». Bon ok, mais c’était une victoire !! Et ça s’est plutôt bien passé avec mes parents qui étaient vraiment très très chouettes avec moi, autant mon père que ma mère d’ailleurs. J’ai conduit 3000 km, et ça m’a bien aidé pour le vrai passage.

J’avais plutôt bien réussi mes études jusque là, et cet apprentissage de la conduite m’avait vraiment fait miroiter un échec cuisant. Mais finalement, c’était une leçon supplémentaire. Même sans grand talent (c’est vraiment pas mon point fort, hu hu) et motivation, mais avec de la gentillesse et de la pédagogie, je sais que je peux faire beaucoup de choses, même d’un niveau médiocre.

J’avais besoin surtout de prendre confiance. Mais dans l’absolu, c’est juste que la conduite pour moi c’est forcément tranquille et cool. Jusqu’à 110, ça va très bien, mais au-dessus, donc sur l’autoroute, j’ai vraiment peur des voitures et des embardées possibles. Cela ne se passe pas du tout quand je suis passager, mais en conducteur vraiment je n’aime pas ça. Vous imaginez mon trauma pour l’accident de l’été dernier

30 ans plus tard, je suis au moins capable de conduire un véhicule à peu près partout (Paris ne m’a jamais posé de problème par exemple, y compris la fameuse place de l’Etoile), même si j’ai mes limites et ne serai jamais Fangio. D’ailleurs quand j’accélère un peu sur la route, le chérichou me lance tout de suite « Ooooh qu’est-ce qu’il t’arrive Gran Turismo ?! ». Voilà c’est mon surnom de conducteur, parfaitement idoine. ^^

PS: Vous noterez que je vous livre la photo de mon permis, comme quoi vraiment je vous donne tout sans aucune retenue. Hu hu hu.

  1. C’est ça son histoire. ^^ ↩︎
  2. Pourtant… ^^ ↩︎