Pour tenter d’y répondre, ou en tout cas essayer de se poser les bonnes questions pour cerner le problème, il utilise des modèles mathématiques épidémiologiques en se projetant dans une attaque virale qui remonterait les générations…
Parce que le truc de base c’est évidemment de se dire :
Nous avons tous 2 parents, 4 grands-parents, 8 arrière-grands-parents, 16 arrière-arrière-grands-parents, et, si on remonte 40 générations pour retomber à peu près à l’époque de Charlemagne, cela donne 1 099 511 627 776 ancêtres à ce niveau — mille milliards, soit quelque chose comme 4000 fois la population mondiale de l’époque (à la louche, 250 millions).
Mais on sait bien qu’on a tous beaucoup d’ancêtres en commun, et que c’est très contre-intuitif à quel point le phénomène est énoooorme. Donc sa proposition d’investigation est la suivante :
Imaginons que nous regardions l’histoire de l’Humanité à l’envers (je veux dire, en faisant couler le temps en sens inverse). J’imagine conceptuellement que je suis porteur d’une infection (l’infection avoir David Madore dans sa descendance) et que cette infection se transmet (en remontant le temps, donc) à mes deux parents, qui la transmettent eux-mêmes à leurs parents, etc. Nous avons là un modèle épidémiologique dont le nombre de reproduction R₀ (ou, comme j’aimais bien le noter dans mes articles de vulgarisation à ce sujet, κ) vaut 2. (Pour être un peu plus précis sur la comparaison, les individus sont considérés comme « susceptibles » à partir de leur mort — je rappelle que je joue le temps à l’envers, donc on commence par mourir —, ils sont « infectés » à partir de la naissance d’un enfant infecté, et ils le restent jusqu’à leur propre naissance, laquelle transmet l’infection à leurs propres parents.)
On y voit s’y afficher tous les préjugés de l’époque, et notamment un sexisme décomplexé, associé à de la misogynie et du mépris de classe, qu’il vienne d’ailleurs d’hommes ou de femmes. Et forcément je me demande mais quelle vie ont-ils bien pu vivre ensuite ? Ça donne envie de retrouver les quelques marqueurs de nos vies (naissance, mariage, décès) et d’en lire les indices subliminaux (villes, professions, témoins etc.) pour eux et leurs descendants.
Il y a deux ans déjà, on parlait beaucoup de la variole du singe et notamment chez les HSH (les hommes qui sexent avec des hommes ^^ ). J’en ai parlé une fois de manière très anecdotique ici, mais clairement tous les potes se sont faits vaccinés, des proches ont parfois été gravement touchés, et c’était un vrai risque qui a été plutôt bien pris en charge grâce à l’expérience des associations et des briscards des pandémies que sont AIDeS ou Act Up (et l’Etat dont il faut saluer la relative mobilisation — version verre à moitié plein).
Là ça barde un peu plus car l’épidémie sévit un peu plus largement en Afrique, et l’arrivée du virus ici est certaine, même si pour le moment tout à fait invisible pour tout un chacun.
J’ai toujours aimé son style et ces petits posts qui sont autant de délicates touches sur une peinture impressionniste qui représente maintes années de blogging. Il poste peu aujourd’hui, mais quand c’est pour nous régaler d’articles de cet acabit, bah ça vaut le coup d’attendre. ^^
C’est le matin. Un matin d’été en Bourgogne. Je viens de me lever, d’ouvrir la porte. Un café, je suis sorti. Dehors, le haut des arbres est dans un reste de brume. Le coq chante, il est, avec d’autres oiseaux qui pépient, seul à animer la campagne qui dort encore. L’air est humide et se dépose sur les arbres, les plantes, en gouttelettes transparentes. Pour la première fois, j’ai vu de la vapeur sortir de ma bouche en expirant, et réalisé que sur cette petite terrasse, à constater le réveil de ce petit monde, j’avais froid. J’aime la fin du mois d’août, quand les chaleurs d’été cèdent la place aux aurores fraîches de septembre. J’aurai aimé qu’au chant du coq, s’ajoute un léger souffle, derrière moi. Ça aurait été toi. Tu m’aurais rejoint, tu aurais collé ton torse à mon dos, tu m’aurais entouré de tes bras, mains sur mon cœur, tu aurais posé le bas de ton visage sur le haut de mon épaule, tu aurais joint ton souffle au mien et on serait resté là à vivre le moment en communion. Alors tu aurais frissonné, j’aurais souri, et tu aurais murmuré : “vient, retournons au lit”. Et j’aurais été le plus heureux des hommes.
C’est en lisant le blog Grignotages de la souris, que j’ai été happé par cette lecture « Eloge de la fadeur » au premier titre1, et ensuite par cette merveilleuse trouvaille de la roue des émotions de Robert Plutchik. Bon, déjà, le mec a un nom génial qui a l’air de sortir d’un conte de fée slave des confins de l’Oural, mais surtout c’est un système passionnant qui expose en principes simples et combinables des phénomènes humains qu’on a tellement de mal à « mettre en sciences ».
J’avais de loin entendu ce truc comme étant justement la source des émotions dépeintes dans Vice-Versa, mais comme un idiot je n’avais jamais poussé mes investigations plus loin (et Dieu sait que je suis pris dans des vortex Wikipédia pour moins que ça ^^ ).
Et j’adore ce qu’elle explique du bouquin de François Jullien qui relate que la fadeur est une véritable qualité et quête idéale de la culture chinoise. ↩︎
Hier soir, abreuvés de ces émissions H24 sur la dissolution, les élections à venir, et cette atmosphère de peur dégueulasse distillée par des journalistes dont l’objectif est de nous garder en haleine nous proposant une dose constante et cyclique de dopamine pour nous accrocher1, nous avons pensé à Stefan Zweig.
Oui bon d’accord, on peut nous accuser de faire un peu de « drama », mais c’est difficile pour nous de ne pas faire un parallèle avec l’auteur autrichien qui a fui le nazisme, et qui s’est suicidé en 1942 d’un certain désespoir de ce que l’Europe était devenue. Et Nithou, avec qui je partage beaucoup de valeurs (et d’affect pour les mèmes décrivant nos angoisses existentiels sur les Internets), semble aussi y avoir pensé.
Contre ma volonté, j’ai été le témoin de la plus effroyable défaite de la raison et du plus sauvage triomphe de la brutalité qu’atteste la chronique des temps ; jamais — ce n’est aucunement avec orgueil que je le consigne, mais avec honte — une génération n’est tombée comme la nôtre d’une telle élévation spirituelle dans une telle décadence morale.
Le monde d’hier (Stefan Zweig)
Et ça fonctionne puisque je critique ce truc dont je suis complètement le jouet conscient depuis quelques jours, où j’écoute en boucle les mêmes infos, les mêmes interviews, les mêmes craintes et espoirs de certains ou repoussoirs d’autres. C’est « moins pire » sur France Info, mais eux-mêmes convergent vers cette médiocrité journaleuse triste à mourir. ↩︎
Ce post sur le Fediverse évoque une étude scientifique américaine qui démontrerait (par la statistique) que les gens (américains) trouveraient grosso modo que la musique est « bonne » lorsqu’ils sont enfants, jusqu’à la fin de leur adolescence, et après 35 ans ce n’est qu’une chute inexorable.
Je trouve ça marrant car c’est très proche de mon ressenti, même si j’aime pas mal de choses actuelles, mais c’est sans commune mesure avec tout ce que j’aime beaucoup qui date en gros des découvertes de ma vingtaine (y compris des vieux trucs). ^^
Suite à la victoire du RN aux élections européennes (et à la dissolution que j’ai évoquée juste avant), il y a eu un petit fait divers bien drolatique. Simplement quelques militants fachos qui ont décidé d’aller casser du pédé pour célébrer leur victoire, et le retour des bonnes valeurs d’antan chez eux. Et hop, v’la t’y pas que le gars y raconte même qu’il a hâte d’être dans trois semaines pour « casser du pédé autant qu’on veut ».
Il fallait bien s’attendre à ce genre de chose, et ça a au moins le mérite de faire comprendre à toutes les tapettes qui ont voté RN, que c’est aussi cela le RN, c’est même avant tout cela.
Et en même temps, le truc auquel on ne croyait plus, un nouveau souffle à gauche avec un Nouveau Front Populaire, et tous les partis de gauche qui se rassemblent (ça fait furieusement penser à la Gauche Plurielle d’autrefois). Bon même si je déteste les appellations « nouveau », qui ne sont rapidement plus nouvelles et qui démontrent une certaine limite créative, je suis content de ce regroupement devant l’adversité. Et comme d’hab, je partage beaucoup des idées du Roncierchouchou.
Mathieu Burgalassi, dont j’ai parlé récemment, a publié lui aussi de très intéressantes vidéos à propos du RN, notamment de leurs accointances avec le terrorisme ou l’antisémitisme dans des publications édifiantes.
On vous explique tout de suite ce dont il s’agit :
La Fondation du Rien vous fabrique du temps libre. Inscrivez-vous gratuitement à l’une de nos activités annulées pour jouir enfin tranquillement d’une plage de temps libre.
Et en effet, j’ai choisi l’activité Running et Philosophie pour demain à 15h à Nantes, et j’ai reçu la confirmation par email.
Bonjour Matoo, Nous vous confirmons que votre inscription à l’activité Atelier running & philosophie « Transpirer pour pas grand-chose en réfléchissant à la phrase de Cioran : Après tout, je n’ai pas perdu mon temps, moi aussi je me suis trémoussé, comme tout un chacun, dans cet univers aberrant. », le mercredi 24 avril 2024 à 15:00, et pour une durée de 1h a bien été prise en compte.
L’équipe de la Fondation du Rien vous retrouvera comme convenu à Nantes, 44100.
Vous trouverez en pièce-jointe votre billet au format pdf : conservez-le soigneusement, et présentez-le à notre équipe le jour J.
Pensez à bien inscrire le créneau réservé dans votre planning.
En espérant que ce moment vous donnera entière satisfaction. Cordialement, L’équipe de Fondation du Rien.
Et voilà le billet en pdf avec son QR Code (à ne pas scanner ^^ ) :
J’ai même reçu un rappel aujourd’hui pour bien prendre en compte ce rendez-vous dans mon agenda !!
Tout ce site web est un régal de dérision et de rigolade tout en étant parfaitement sérieux et consciencieux dans son organisation et la logique d’enchaînement de ses messages. Vous pouvez cliquer pendant des heures, et c’est vraiment très très drôle. Evidemment l’idée même un site pareil et son contresens « by design » est irrésistible et clairement un geste artistique.
On trouve dans les crédits La Vaste Entreprise qui est à l’origine de ce bijou nihiliste, et tout un tas de contributeurs à cette merveilleuse perte de temps ayant pour vocation de vous en trouver en vous proposant des activités qui n’auront pas lieu. ^^
Production : La Vaste Entreprise Coproduction : Association des CNAREP – Centres Nationaux des Arts de la Rue et de de l’Espace Public – Hors Cadre 2022 / L’Atelline – scène conventionnée d’intérêt national art et création / Le Parvis – scène nationale Tarbes Pyrénées / Théâtre + Cinéma – scène nationale Grand Narbonne / MAIF Social Club Paris / Némo – biennale internationale des arts numériques de la Région Île-de-France – CENTQUATRE-PARIS / L’Hexagone – scène nationale de Meylan (+ en cours) Coproduction des prototypes (dans le cadre du spectacle « À ne pas rater ») : Théâtre des 13 vents – CDN Montpellier / Théâtre Jean Vilar, Montpellier / Scène Nationale d’Albi Aides : Ministère de la Culture – DGCA / DRAC Occitanie (compagnie conventionnée) / Région Occitanie / FONDOC – fonds de soutien à la création contemporaine en Occitanie / Ville de Montpellier
Vous allez dire que je rapporte tout à la Bretagne (oui quand je peux ^^ ), mais voilà la petite maison où Robert Badinter a écrit son discours d’abolition de la peine de mort. Et c’est à Doëlan, à Clohars-Carnoët donc, et on est tous très fier de ce petit fait historique local. Hu hu hu.
Compte Instagram Le Pouldu
Il s’agit en réalité de la maison de Benoîte Groult qui l’avait prêtée au couple Badinter.
Robert Badinter est un homme important pour moi, comme pour beaucoup, et c’est un peu depuis toujours une sorte de héros familial. Le mec de gauche par excellence et qui a porté des combats beaux, justes et vraiment de gauche comme l’abolition de la peine de mort. Et un avocat de l’ancienne trempe, un orateur, un bretteur, un intello aussi de la bonne intelligentsia gauche caviar, mais qui a, selon moi, gagné ses galons de respectabilité par ses actes et son intégrité intellectuelle. Après il n’est pas parfait, il a aussi dit et agit de plein de manières répréhensibles ou discutable, mais il ne s’agit pas de jeter le bébé et l’eau du bain.
Je reprends avec plaisir les propos de Madame Mollette :
Badinter pour un avocat, ça fait partie des Dieux de l’Olympe. Je ne sais pas si vous pouvez imaginer ce que signifiait le métier d’avocat pénaliste avant 1981. Il fallait accepter l’occurrence, au terme d’un long parcours de défense aux côtés d’un homme, de se retrouver un jour en situation de se lever à l’aube pour accompagner cet homme dans une cour sordide se faire exécuter.
L’une des dernières têtes sauvées de la guillotine fût celle d’un homme de 28 ans condamné à mort par la Cour d’Assises de Vendée et rejugé à Nantes avec Badinter à ses côtés en 1977. Il a raconté qu’il ne mangeait plus ni ne dormait plus pendant le procès.
C’est aussi l’homme qui a fait dépénaliser les relations homos avec mineurs de + 15 ans, supprimer les juridictions d’exception, les QHS. C’est lui qui a révolutionné l’indemnisation des victimes d’accidents de circulation fondée sur le risque et non plus sur la faute : puisque les automobilistes ont des assurances, elles doivent payer, ça a tout changé. Bref, un Bonhomme. Un déclencheur de vocations. Quand on allait le voir en conférence, on était transporté. Alors voilà on lui rend un hommage mérité.
Je n’oublie pas le reste, ses positions sur DSK, sur l’euthanasie, sur la libération de la parole des femmes, et probablement d’autres trucs miteux. Et aussi, le fait qu’il a accepté de servir de caution intellectuelle au démembrement du code du travail, ça je ne pardonnerai jamais. Il faut tout dire, ça n’enlève pas le mérite de l’Homme.
Certains ici disent qu’il était avant tout un bourgeois de la gauche bienséante. Ça ne rend pas justice à la complexité de l’homme, à la force de ses engagements et à ce qu’il a accompli. Le seul Dieu de l’Olympe des avocats que je pleurerai sans aucune réserve sera Henri Leclerc. Mais Badinter mérite les hommages qui lui sont faits.
Et c’est vrai que c’est marrant de se dire qu’il s’agit du « seul homme du 20ème siècle qui a été cité par Victor Hugo au 19ème, car dans son discours d’adieu au Sénat en 2011, il a cité Victor Hugo : « Heureux celui dont on pourra dire qu’il emporte avec lui la peine de mort. » [source]
Après vous me connaissez, Badinter évoque aussi pour moi cette loi de 1982 qui établit une égalité entre homos et hétéros concernant la majorité sexuelle. C’était bien une promesse de Mitterrand lors de son élection en 1981, même si la dépénalisation en tant que telle de l’homosexualité date bien de 1791.
L’Assemblée sait quel type de société, toujours marquée par l’arbitraire, l’intolérance, le fanatisme ou le racisme a constamment pratiqué la chasse à l’homosexualité. Cette discrimination et cette répression sont incompatibles avec les principes d’un grand pays de liberté comme le nôtre. Il n’est que temps de prendre conscience de tout ce que la France doit aux homosexuels comme à tous ses autres citoyens dans tant de domaines
Robert Badinter à l’Assemblée Nationale le 27 juillet 1982
Couverture du Gai Pied de juin 1981 (N°27)
Je possède 3 numéros emblématiques du mensuel Le Gai Pied (les numéros 2, 27 et 42), et il se trouve que le N°42 de septembre 1982 évoque cette nouvelle loi.
Couverture du Gai Pied de septembre 1982 (N°42)
Mais c’est là où on voit que le titre même de l’article est assez discutable. On y évoque certes l’égalité et un juste retour des choses, mais on peut aussi sentir un je ne sais quoi qui sent le soufre. Il faut rappeler qu’à l’époque des mouvements pédophiles s’exprimaient aussi sous couvert de militantisme homo pour « libérer la sexualité des plus jeunes ». Et il y a eu d’ailleurs dans l’histoire du mensuel de fortes dissensions à ce sujet, notamment avec Tony Duvert. L’affaire Dugué est aussi emblématique de cette époque, et de cette très gênante confusion qui est largement exploité par les homophobes, mais malheureusement aussi une réalité toxique de certains militants. On ressent dans l’article cette transition curieuse qui verra une séparation nette, et un refus clair de la pédophilie et des amalgames terribles que certains continuent à entretenir.
Il est en revanche fou de voir, par hasard, que l’article en complément de cette page évoque les bombardements de Beyrouth par l’armée israélienne en cette même période (été 1982). On y lit des positions assez communes avec les mouvements LGBT actuels, à 40 ans de distance on décrypte forcément cela avec une certaine ironie grinçante ou carrément désespérante.