Rattrapage Spectacles (2013-2019)

Entre 2013 et 2019, j’ai mis plein d’articles de côté dans une liste de « posts à faire » en me disant que j’allais m’en occuper, et puis le temps a passé… Je la compile ici car je me suis juré d’avoir un weblog digne de ce nom. J’en dis un peu plus dans cet article justement.

Swan lake (Dada Masilo) au théâtre du Rond-Point (2013)

Oh là là mais que de souvenirs émus de ce spectacle incroyable !! Un lac des cygnes queer et noir qui sublime la pièce d’origine, tout en en soulignant la portée universelle. J’espère que ça tourne encore ou que ce sera remonté, c’était un bonheur, et j’imagine que beaucoup de gens trouveraient encore beaucoup d’intérêt à le découvrir et le « vivre ».

The drowned Man : A Hollywood Fable au Temple Studios (Londres) (2013)

J’ai déjà parlé de la compagnie PunchDrunk découverte à NYC en 2013, et revue dans le cadre de Burnt City il y a peu. Là c’était à Londres avec un extraordinaire décor plus vrai que nature, et un scénario fantasmagorique tout droit sorti de l’esprit d’un David Lynch. Comme d’habitude, on est immergé dans un décor réel et on ère de pièce en pièce où on assiste à différentes scènes et performances qui composent une sorte de trame narrative. Encore une fois, une immense réussite !!

La Belle et la Bête à Mogador (2013)

Bon évidemment, c’était tellement ma came !! Je l’ai vu deux fois même, et j’y retournerai avec plaisir. Les chansons sont géniales, les effets pas mal du tout (même si ce n’est pas aussi grandiose d’un show de Broadway ou Londres), et on est emporté tout du long par cette comédie musicale qui reprend précisément toutes les scènes du film, même les plus spectaculaires. Fantastique !!!

Alex Lutz au Grand Point Virgule (2013)

C’est la seule fois où j’ai eu l’opportunité de voir l’humoriste sur scène, et je me doutais que ce serait bien, mais pas à ce point. Il est capable d’endosser n’importe quel personnage, quel que soit son genre ou son âge, et cette capacité protéiforme est mise au service d’histoires incroyables. Il est à la fois sur des anecdotes assez classiques qui font rire par ses mises en boîte bien connues, mais il va beaucoup plus loin lorsqu’il se met à raconter des pans entiers d’histoires qui vont chercher dans la société et au-delà, jusqu’à même des trucs qui ne font pas spécialement rire. J’adorerais le revoir dans une telle démonstration et performance.

Peter and the Starcatchers au SHN Curran Theater (San Francisco) (2013)

C’était une super occasion alors que j’étais en déplacement pro à SF en 2013 de voir cette pièce qui faisait beaucoup parler d’elle. Il s’agit du personnage de Peter Pan qui est revu et réinventé dans une histoire beaucoup plus complexe et « adulte » tout en restant cohérente avec ce qu’on en connaît de Disney et JM Barrie. Et c’est un show à l’américaine avec des chansons, et tout un tas d’effets spéciaux super sympas et chiadés.

Einstein on the beach (Philip Glass, Bob Wilson, Lucinda Childs) au théâtre du Châtelet (2014)

J’ai une passion certaine pour Philip Glass, mais encore plus pour sa fameuse trilogie opératique, et quand j’avais appris que Einstein on the beach serait proposée en avant-première mondiale au Corum de Montpellier, je n’ai pas hésité. C’était tellement bien que j’ai absolument voulu y retourner quelques mois plus tard en suivant la tournée à Amsterdam, et finalement de passage à Paris au Châtelet. Donc inutile d’exprimer à quel point c’était bien, mais ça l’était.

Antigone d’Anouilh à la Comédie Française (2014)

Cela m’arrive assez peu souvent mais là, je n’ai aucun souvenir de cette pièce (que j’aime beaucoup par ailleurs, souvenirs du bac de français ^^ )… Donc je passe !

DANCE (1979) de Lucinda Childs (Musique de Philip Glass) au théâtre de la Ville (2014)

Comme tout ce qui a trait à Philip Glass, j’adore. Et là encore, la règle s’est vérifiée. Lucinda Childs est la chorégraphe à qui l’on doit les ballets de Einstein on the beach dont je viens juste de parler. On la retrouve avec un spectacle qui date donc de 1979, et dont on voit pour chaque pièce d’abord la version filmée, puis une interprétation au goût du jour. La scénographie et le procédé étaient vraiment séduisants et très réussis.

Open Space au théâtre du Rond-Point (2014)

Il y avait du potentiel dans cette pièce qui devait reprendre certains clichés de la vie de bureau. Mais au lieu de cela, c’était une vision totalement fantasmée de personnes qui clairement n’avaient jamais mis les pieds dans un bureau. Cela criait l’imagination intello d’un auteur saltimbanque de théâtre parisien (autrice en l’occurrence puisque c’était une pièce de Mathilda May).

The photographer de Philip Glass à la Cité de la Musique (2014)

Et hop encore du Glass, et une pièce que j’adore : The photographer. Elle est basée sur la vie d’Eadweard Muybridge qui est notamment connu pour avoir prouvé qu’un cheval au galop a les quatre pattes hors du sol. Je l’avais aussi évoqué lors du film Nope, qui explique que le jockey de la photo était l’ancêtre des protagonistes du film. Les trois actes sont géniaux, et c’était encore un plaisir incroyable d’entendre cette musique en live.

Le Cirque Plume – Tempus Fugit ? à La Villette (2014)

Le Cirque Plume est une compagnie de cirque contemporain qui propose de grands spectacles super impressionnants, créatifs et oniriques. C’est un peu moins une pure performance à la Cirque Eloize, ce qui manque en force brute est largement rattrapé en inventivité, proposition artistique et séquences qui emportent vraiment dans les songes. Je me rappelle avoir passé un super moment !

Les parapluies de Cherbourg au théâtre du Châtelet (2015)

C’était très cool cette idée des Parapluies en mode comédie musicale ou même opérette avec des chanteurs comme Vincent Niclo, et surtout les artistes lyriques Natalie Dessay et Laurent Naouri. Les décors étaient top, et vraiment avec des talents pareils, j’étais sur un petit nuage.

Messmer le Fascinateur à Bobino (2015)

J’étais curieux de voir ce show « très TF1 » en live, et c’était exactement ce à quoi je pouvais m’attendre. Assez marrant et fun, mais pas vraiment ma tasse de thé. On avait bien ri, et on avait bien senti le pouvoir de suggestion même si pas à y contribuer directement, et se retrouver sur scène. (Ouf !)

Torobaka d’Akram Khan et Israel Galván au théâtre de la Ville (2014)

J’ai vu plusieurs spectacles d’Akram Khan, et à chaque fois j’en ai été marqué. C’est vraiment bluffant pour les chorégraphies et les performances physiques, mais aussi pour la créativité des thèmes, et la délicatesse de la narration. Cette rencontre « au sommet » de ces deux danseurs était vraiment à ne pas manquer !!

Paris Burlesque Festival « Burlesque et Politique » au Centre Barbara (2014)

C’était un peu le début de ce retour du Burlesque comme une sorte de courant émancipateur de plein de gens, et notamment queer. C’était un moment génial avec des tas de shows sympas, féministes et kinky, et une vraie célébration des corps et des regards croisés. Marquant !

La Traviata à l’Opéra Bastille (2016)

Une Traviata signée Benoît Jacquot, c’était très bien ! C’est la Traviata de toute façon, on peut difficilement rater ce truc. ^^

Madame Foresti au Zénith de Paris (2015)

Sacrée prouesse de tenir un Zénith entier pour un spectacle d’humour, mais Foresti avait parfaitement réussi cela. On avait évidemment énormément ri. Elle fait incroyablement mouche avec moi dans tout ce qu’elle fait (sauf son Bercy).

Compagnie Nationale de Danse d’Espagne José Martinez au Théâtre des Champs Elysées (Philip Glass) (2015)

C’était un spectacle de danse avec 3 pièces distinctes dont « Extremely Close » sur une musique de Philip Glass. C’était des chorégraphies très contemporaines, mais avec une vigueur et une créativité très intéressantes. J’avais bien aimé !

69 battements par minute de Claire Diterzi au théâtre des Bouffes du Nord (2015)

Oh là là, on a toujours tellement envie de crier au génie après chaque spectacle de Diterzi. L’album 69 battements par minute est un petit bijou, et la chanteuse a proposé des clips (hilarants) pour chacun des morceaux. L’avantage avec les animaux c’est qu’ils t’aiment sans poser de questions ou encore Je suis un pédé refoulé sont des chansons géniales, et en live avec elle c’est toujours quelque chose, d’autant plus dans un aussi bel écrin. Fabuleux, fabuleux !

La belle et la bête (musique de Philip Glass) à la Cité de la Musique (2015)

J’adore ce genre de séance à la Cité de la Musique, ils font ça assez souvent. Et là donc c’était une merveilleuse partition de Glass pour le film de Cocteau. C’est génial de voir le film et d’avoir la « bande originale » en live.

4.48 Psychose (Sarah Kane) au théâtre Aktéon (2015)

C’est la pièce fétiche de mon chéri, et c’était une surprise pour lui. Bon, j’étais très gêné car c’était très très mauvais. Et heureusement on était parfaitement d’accord sur le constat. Bon bah c’était pourri, ça arrive. Le texte était ânonné sans aucune âme, sur un ton monocorde et dans un décor fruste. Il y avait bien une certaine performance de la comédienne mais qui ne menait malheureusement vraiment à rien.

RuPaul’s Drag Race au Trianon – Battle of the Seasons (2015 Condragulations Tour)

Eh oui, je n’ai pas attendu le méga succès des Drags Races pour aimer RuPaul, et c’était déjà le début d’une grande notoriété avec les saisons 5, 6 et 7. Le show était absolument génial, et c’était top de voir sur scène toutes ces queens que je révère.

Sophia Aram au Palais des Glaces (2015)

J’adore cette humoriste, et elle reste vraiment une référence pour moi. Je l’avais déjà vu en 2012, et j’ai de nouveau beaucoup apprécié la voir sur scène. C’est marrant car je cite un peu plus bas aussi Blanche Gardin que j’aime beaucoup, or elles sont toutes les deux aujourd’hui dans des polémiques qui les rendraient facilement aux antipodes. Mais je reste très fan des deux et sans du tout une once de schizophrénie. ^^

Cats au théâtre Mogador (2015)

Alors, je ne savais pas en allant voir la comédie musicale que c’était un truc aussi « singulier ». Des chansons et des saynètes sans aucun rapport, sinon un groupe de chats facétieux dans une ville, et juste une chanson phare qui vaut le déplacement. Bon, je n’ai pas trouvé ça génial dans l’absolu, mais je suis content de l’avoir vu. ^^

Singing in the rain au théâtre du Châtelet (2015)

Juste génial !! Déjà la comédie est top, mais alors les décors, les effets et les chorégraphies étaient d’un excellent niveau. C’est un spectacle total qui est autant divertissant que parfaitement orchestré et exécuté. J’ai adoré !

Jérôme Bel / Benjamin Millepied / Jerome Robbins au Palais Garnier (2016)

Très chouette soirée et spectacle à Garnier, avec des extraits de ballets des trois différents chorégraphes. Pour moi qui ai une piètre culture en ballets, c’était très cool. ^^

Le Crime de l’Orpheline au théâtre Ranelagh (2016)

Absolument zéro souvenir de ça, alors je botte encore en touche !

Tutu à Bobino (2016)

Oh c’était super !! Le spectacle est devenu un classique, mais ces six danseurs, athlètes incomparables, qui jouent et dansent dans tous les registres, et qui donc se retrouvent en tutu, c’est une ode queer, mais universelle, qui fait un bien fou. J’adorerais revoir ça tiens !!

Nelson au théâtre de la porte Saint Martin (2016)

Je n’avais jamais vu un vrai truc de boulevard, et là avec Chantal Ladesou c’était un archétype du genre. Cela m’a bien confirmé que ce n’est pas du tout ma came. Surjoué, mal écrit, et un humour beaucoup trop appuyé, bah non merci quoi.

Rimbaud Verlaine Éclipse totale au théâtre de Poche Montparnasse (2016)

Je connaissais le film, mais c’était marrant de voir cette transposition au théâtre. C’était plutôt pas mal, même si pas une révélation incroyable qui m’aurait marqué à vie.

Philip Glass (extraits des Quartet) à l’Opéra de Massy (2017)

Je ne connaissais pas l’endroit, et c’est toujours agréable d’écouter du Glass avec une bonne acoustique. J’avais beaucoup aimé le choix des morceaux, et certains pour lesquels c’était une toute première fois en live.

31 à la Comédie des Champs Elysées (2017)

Alors là en revanche, oui c’était une révélation, et un spectacle qui m’a bouleversé, et aura laissé une marque indélébile dans mon esprit. J’avais tellement aimé qu’Alex m’avait acheté le CD en quittant le théâtre, et c’est une bénédiction car il n’y a aucun enregistrement officiel, et c’est introuvable en ligne. Pourtant c’est un chef d’œuvre absolu pour moi. Un groupe d’amis assez hétéroclite qui se retrouve tous les ans pour célébrer le nouvel An. Et on revit ces nuits de St Sylvestre en remontant dans le temps, on comprend qui est qui, et qui veut quoi, et pourquoi ces gens là se sont rencontrés et ont scellé leurs destins. Les chansons sont incroyables, avec des paroles qui nous atteignent au cœur et à l’âme (moi en tout cas), et les interprètes étaient fabuleux et fabuleuses !!! Quel souvenir inoubliable ! Je ne comprends pas pourquoi ce n’était pas devenu un classique qui se joue dans le monde entier. Oui j’en suis à ce point. ^^

Victor Hugo -L’interview à l’Essaïon Théâtre (2017)

Oh très classique et de bonne tenue, mais ça ne m’a pas laissé un souvenir impérissable.

Miracle en Alabama au théâtre La Bruyère (2018)

Je suis un immense fan de l’histoire d’Helen Keller depuis le film « Miracle en Alabama » avec Anne Bancroft, et là c’était la version en pièce de théâtre (ce sont des adaptations de l’autobiographie de l’héroïne). Ce n’était pas dingue mais j’ai bien aimé, comme d’habitude je suis trop habitué au film que j’ai vu des dizaines de fois pour accepter une autre version. Je devrais pourtant me connaître suffisamment pour le savoir. ^^

Decadance de Ohad Naharin au Palais Garnier (2018)

Oh là là, incroyable !!! Encore une fois au Palais Garnier ce qui est un endroit tellement cool, mais surtout cette exécution hyper impressionnante d’une chorégraphie exigeante et à l’énergie communicative. La synchronicité des danseurs et leurs capacités à suivre ensemble cette performance surhumaine forcent l’admiration. Et cela donne un spectacle d’une beauté à couper le souffle !

Blanche Gardin à l’Européen (2018)

J’adore Blanche Gardin et son humour noir décapant, sa constante habileté à conduire les yeux bandés sur la crête d’une montagne sans jamais tomber dans le ravin. Mais je suis tout de même sorti avec en mémoire deux trois moments où je me demande si elle n’a pas sérieusement dérapé…

Les crapauds fous au théâtre des béliers parisiens (2018)

C’est vraiment le spectacle classique par excellence avec quelques Molières empochés, et qui a tourné avec succès pendant des mois et des mois. J’ai bien aimé parce que c’est basé sur une histoire vraie, et que c’est bien fichu, mais il manque un petit souffle, un petit truc original qui vraiment surprend. Donc c’était cool, un bon divertissement de théâtre mais aussi vite oublié.

Romances Inciertos, un autre Orlando (François Chaignaud / Nino Laisné) au théâtre Chaillot (2018)

C’était très sympa même si très intello et un rien précieux. J’ai aimé surtout le mélange des genres avec les références espagnoles, les décors, les musiciens et les chorégraphies, donc un spectacle un peu « complet » et protéiforme qui se donne les moyens pour servir ses propos.

Peau d’Âne au théâtre Marigny (2018)

J’en attendais sans doute trop, et ce n’était vraiment pas terrible. On n’avait pas du tout la qualité de mise en scène ou d’effets d’une comédie musicale à l’américaine (La Belle et la Bête de Disney notamment que j’évoque plus haut). Mais ce n’était pas compensé par une poésie en plus ou une inventivité « à la française », c’était juste pas ouf. Quelle déception…

Marie-Thérèse Porchet au théâtre de la Gaîté Montparnasse (2019)

J’ai attendu bien trop longtemps pour la découvrir sur scène, et quels éclats de rire !! Vraiment c’était à mourir de rire du début à la fin. Elle reprennait en grande partie, pour ses 20 ans, son spectacle La truie est en moi, qui est totalement culte chez ses aficionados. Et tout cela avec une bonne mise en perspective d’aujourd’hui, c’était absolument tordant !

Les faux British au théâtre Saint Georges (2019)

Je suis super fan des « The Goes Wrong Show » et c’est une version française de ces spectacles consistant en une pièce de théâtre avec des tas de choses qui se mettent à aller de travers, et des blagues à travers les comédiens qui essaient de rattraper ces catastrophes. C’est donc une sorte de mise en abîme avec un spectacle dans le spectacle. Je n’ai pas grand chose à reprocher à ce spectacle sinon que ça n’a pas pris pour moi. Pourtant ça a eu un succès incroyable, mais je suis resté sur ma faim, je n’ai pas trouvé ça très drôle et si bien fait. Et vraiment pour moi c’était à des lieux de la version BBC.

Looking for Beethoven au théâtre du Ranelagh (2019)

Un seul en scène de Pascal Amoyel qui incarne le grand maître et nous le raconte avec un piano. C’est une occasion géniale de découvrir ce génie de la musique, et d’avoir en plus des aspects biographiques, une compréhension fine de son rapport au piano. Et évidemment il joue en parallèle des morceaux ce qui permet une démonstration explicite de ce qui est raconté. Très chouette spectacle !

Un petit line-up queer pour le Fringe Festival d’Édimbourg

On est tombé par hasard sur le Fringe Festival à Édimbourg qui est un gros truc, et la ville vrombit des spectacles plus ou moins grands de rue ou de salles. C’était difficile de trouver un show mais là j’avais vu qu’on avait la possibilité de voir assez tard un échantillon de quelques stand-upers du festival qui en gros essaient de donner envie qu’on aille voir leurs shows complets. C’est ainsi qu’on s’est retrouvé au Gilded Balloon, et qu’on a vu 5 artistes queer nous faire quelques minutes chacun de leurs numéros.

Le premier c’est le choupinou Mark Bittlestone que je ne connaissais que d’Instagram pour avoir vu ses vidéos, et il était assez marrant en live (mais très très classique twinky gay musclé qui parle de GrindR et consorts). La chouette découverte c’est Ciara qui s’est montrée en quelques minutes extrêmement douée, et pleine d’un humour grinçant et mouillé d’acrimonie et de dérision comme j’aime. Elle nous a vraiment cueilli et c’était un plaisir de l’écouter, et de nous faire rire très spontanément.

La personne qui présentait et introduisait les artistes était un certain Jeremy Topp, mais je n’ai pas été super convaincu par sa prestation. Enfin pour enrober le truc, ça le faisait.

Le dernier, Otter Lee, était vraiment intéressant mais extrêmement malaisant à la fois. Il était très drôle mais totalement largué et à l’ouest, et paraissant parfois vraiment à la limite du burn-out sur scène. On s’est demandé si on devait vraiment rire, ou si l’auto-dénigrement comme cela était obsolète, même dans le stand-up, depuis Hannah Gadsby. Mais il avait une sorte d’énergie du désespoir et une fragilité queer qui m’ont beaucoup touché et fait rire, donc difficile de statuer. ^^

J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne (Jean-Luc Lagarce) au théatre du Cyclope

C’était la pièce du chéri de cette année (la pièce, pas le chéri) avec sa toute nouvelle troupe amateur, et c’était une sacrée prouesse et réussite. Cinq comédiennes qui interprètent cinq femmes (on devine la mère, la tante, deux filles ainées et une plus jeune) dans une maison avec un gros rappel à « Huit femmes ». Elles attendent depuis des années le jeune frère/fils/neveu qui s’est fait virer manu militari par le père (depuis mort) pour une cause inconnue (mais qu’on peut conjecturer).

Le fils prodigue est de retour, mais il s’écroule à son arrivée, mal en point. On ne le verra jamais en fait. Et les cinq femmes témoignent du choc de cette incursion dans leur attente, ce qu’a été leur attente, ce qu’elle sera ensuite, une sorte de bilan de leurs vies, et comment cela a structuré incidemment leurs existences.

C’est un texte superbe et très poétique1, plutôt une succession de (plus ou moins) longs monologues, parfois virant même plus vers le dialogue intérieur ou la digression d’un subconscient qui s’égare. Mais il y a bien des échanges et des algarades ou passations, des invitations parfois à partager leurs expériences ou ressentis, entre les comédiennes. J’avais adoré cette langue hésitante et répétitive de Jean-Luc Lagarce qu’on trouvait dans le film Juste la fin du monde de Xavier Dolan, adapté de la pièce éponyme (et qui fait partie d’un même ensemble de textes avec celui-ci).

Cette prosodie si particulière, cette scansion itérative qui consiste en des reformulations successives qui précisent des pensées, ou parfois les enfouissent, produit un effet assez remarquable. On suit parfaitement bien les comédiennes, et on n’est pas du tout ennuyé par ce procédé, il apparaît naturel alors qu’il paraît à contre-emploi d’une communication efficace. Mais au contraire, ces phrases construisent tout un univers d’émotions, c’est l’exposition même d’une construction mentale qui donne justement plus à voir qu’un simple exposé précis et prosaïque, mais parfois juste poudre aux yeux.

Les comédiennes ont été particulièrement talentueuses, et vraiment pour un spectacle amateur c’était assez dingue de voir un boulot pareil, et un tel dévouement à l’œuvre. La mise en scène de chérichou était aussi vraiment excellente, et je reconnais bien là sa patte avec ce qu’il faut de mouvements, de jeux avec le placement des comédiennes, de musiques et d’effets de lumière pour habiller le tout, mais aussi pour raconter, pour souligner, pour relever certains liens ténus ou révéler de possibles secrets.

  1. D’ailleurs c’est marrant la page Wikipédia parle de « vers libres ». ↩︎

Spirited Away (Le voyage de Chihiro) au Coliseum de Londres

J’avais vu l’année dernière Totoro à Londres au Barbican Centre, et c’était un spectacle d’une beauté, poésie et perfection assez dingue. Il s’agissait d’une création de la Royal Shakespeare Company, et je pense que ça jouait sur l’approche très artistique et onirique des choses. Là cette adaptation de Chihiro est une production tout à fait japonaise, et avec une ambition hors-norme quant aux moyens pour les effets spéciaux et deus-ex-machina.

Et c’est indéniablement très réussi, et à la hauteur des attentes, on a trois heures d’un show extraordinaire qui reprend presque plan par plan le film, et les péripéties avec l’entièreté des effets qui sont plus ou moins littéralement reproduits. Malgré tout, j’ai préféré Totoro, mais plus parce que l’histoire se prêtait selon moi un peu plus à ce genre de transposition. Clairement Spirited Away est sans commune mesure en termes de complexité et d’ingéniosité des décors et des chausse-trappes qui permettent tout ces effets sublimes. Et vraiment c’est un sans faute, on a même des surprises avec des détails du film qui sont repris littéralement et traités à merveille1.

En revanche, pour réussir à refaire ce film fou, il y a des décors de fou et un foisonnement de personnages, de monstres, de danseurs, de marionnettistes etc. Et vraiment ça bouge partout partout partout !! Parfois c’est un peu trop fouillis, et on s’y perd si on ne connaît pas le film et l’intrigue. Et c’est un peu le même phénomène avec l’histoire en tant que telle. Le film est déjà un peu compliqué à appréhender, surtout pour des européens, et sous cette forme je crois que c’est encore un peu plus difficile. On était avec des personnes qui ne connaissaient pas le film, et clairement ils étaient tous largués.

Mais si vous connaissez bien le film (pour l’avoir vu sans doute 20 ou 30 fois comme moi ^^ ), alors c’est un vrai délice d’avoir cette version « en vrai ». Et on est dans une production impeccable où on ne trouve absolument aucun défaut ou erreur d’exécution, c’est super impressionnant. Surtout quand on réalise la taille des décors, et tout est superbement animé et mobile. La scène entière tourne énormément pour passer en dehors et en dedans des bains selon l’intrigue, et l’ensemble est orchestré avec une fluidité hallucinante.

C’était parfois un peu frustrant de ne pas être un peu plus près pour mieux voir les visages et les expressions des comédiennes et comédiens. Le personnage du bébé géant est joué par un adulte, et manque un peu de « gigantisme » malgré les ajouts près du visage, et les trois têtes vertes sont jouées par un seul type avec deux tête attachées à ses poings (ce qui est très habile et fonctionne pas trop mal). Les petits bonshommes en papier sont aussi un peu décevant par rapport à la magie « venteuse » de la scène d’origine. Et c’est difficile de jouer avec des petits personnages comme le bébé transformé en rongeur qui se fait transporter par un insecte bourdonnant.

Mais malgré toutes ces petites déconvenues, la magie de Chihiro est là, et elle est géniale !! Les yōkai sont super réalistes et pullulent autant que dans le film, on retrouve aussi l’activité (littéralement) bouillonnante des bains, et toute la mythologie japonaise qu’on peut attendre d’une telle œuvre dans chaque scène.

Il paraissait tellement impossible de réussir à adapter un tel film que ça reste une prouesse déjà fabuleuse. Et je suis ultra content d’avoir eu la chance de voir ça !!!

  1. Notamment quand Sen sent l’odeur méphitique d’un esprit super crade, et qu’elle fait une drôle de tête avec ses cheveux qui se dressent sur la tête, eh bien là un type avec un gant noir remuaient les mains derrière sa tête pour illustrer cela avec un effet génial. ↩︎

Starmania au Zénith de Nantes

Quel bonheur d’avoir eu la chance de revoir Starmania pour une troisième fois, et avec quelques différences qui se remarquent sur le plan du casting comme celui de la mise en scène. C’est subtil, mais des choses ont été améliorées ou altérées sur les éclairages, certains éléments même de mise en scène ou des illustrations vidéos. Tout ça est très bien, mais c’était déjà tellement impeccable qu’à ce niveau c’est plutôt de l’ordre du perfectionnisme.

En tout cas, c’est de nouveau une immense réussite pour l’ensemble du spectacle, avec une maîtrise de la lumière qui est parfaite, et qui, encore une fois, habille la scène, sublime les décors, et est un participant majeur à la dynamique des actions qui se déroulent. Techniquement parlant, et c’est assez rare pour le souligner, c’est un show qui est au niveau de ce qu’on trouve de mieux à Londres ou à New York.

Outre cela, et c’est une surprise géniale pour moi, c’était la meilleure troupe de chanteuses et chanteurs de mes trois spectacles. J’ai retrouvé pour la troisième fois la géniale Maag (Stella) qui tient ses notes à la perfection, mais qui a en plus un charisme et une présence en adéquation magique avec son personnage, et qui a en plus un timbre particulier et un petit truc rauque qui rend sa voix absolument singulière. Et de même, pour la troisième fois aussi, l’excellent Alex Montembault (Marie-Jeanne) qui est toujours aussi convaincant dans son rôle de serveuse automate, et d’une justesse troublante dans ses notes ou son interprétation. On n’est vraiment pas dans la performance vocale en mode « criard » mais au contraire dans la nuance et le jeu, et le chanteur est bluffant de bout en bout. C’était sa toute dernière fois dans ce rôle et cette tournée, et je suis bien content d’avoir pu l’applaudir à tout rompre à la fin !!

Pour tous les autres, c’était de nouvelles têtes et voix. J’ai eu une petite déception avec Côme (Johnny Rockfort) qui a une très bonne attitude et une solide interprétation, mais dont on ne retrouve pas la puissance vocale contraltiste qu’on est en droit d’attendre. Et notamment pour son dernier morceau de bravoure, avec SOS d’un terrien en détresse qui n’est malheureusement pas au niveau (du tout ce soir là). Pour tout le reste, c’est proche de la perfection avec de très bonnes performances dans les titres phares des personnages (toujours des points d’orgue important de la comédie musicale). Lilya Adad (Cristal) m’a un peu fait peur car elle a ouvert le bal avec une sorte de retenue troublante, mais très rapidement elle s’est reprise et n’a montré qu’excellence par la suite.

David Latulippe (Zéro Janvier) est fabuleux et montre autant de talent à interpréter qu’à pousser la chansonnette, et il rend un hommage vibrant à tous ceux qui ont osé le « J’aurais voulu être un artiste » car on l’attend tous, et lorsqu’il est délivré avec autant de maestria, ça force évidemment le respect et l’admiration. Ziggy était pour moi un personnage assez secondaire, mais les deux dernières fois, il était vraiment remonté dans mon estime. Et là encore, avec Adrien Fruit, c’est une réussite sans conteste. J’adore également la mise en scène de la chanson de Ziggy qui consiste à avoir tous les danseurs en sosie de Ziggy et qui illustre ses élucubrations rock de « fils à maman ».

Manet-Miriam Baghdassarian est impeccable en Sadia, et Simon Geoffroy aussi en Gourou-Marabout, et même s’ils sont un peu plus secondaires, il se trouve qu’ils délivrent parfaitement leurs chansons titres dans leurs registres. Après elles sont tellement toutes connues ces chansons, que c’est assez dingue de découvrir de nouvelles choses, mais cette version bien d’aujourd’hui réussit vraiment à transformer l’essai de manière implacable et glorieuse.

Et il y a toujours cette résonnance avec notre propre monde, 45 ans après le premier Starmania, qui est plus que frappante. Comment ne pas faire le parallèle avec la société de consommation, les médias qui suivent cette même règle, la téléréalité bille en tête, la politique qui s’en mêle pareillement, l’écologie reléguée à l’utopie New Age, l’urbanisme déshumanisant des banlieues ou conurbations contemporaines, etc. Tout était déjà écrit là. Et la comédie musicale est géniale, tout le monde chante intérieurement toutes ces magnifiques chansons, et on célèbre malgré tout l’effondrement d’une société à laquelle nous appartenons corps et âmes, corvéables.

Hedwig and the Angry Inch au Café de la Danse (Paris)

J’ai connu Hedwig d’abord via l’adaptation en film de ce grand succès off-Broadway (de 1998) en 2001. Je me rappelle que c’était un certain événement à l’échelle du Marais parisien, et le cinéma était une véritable Gay Pride1 à l’UGC des Halles à ce moment là. J’ai eu le film en DVD quelques années après, et je l’ai regardé maintes et maintes fois depuis, donc je connais un peu toutes les chansons par cœur. Néanmoins le film reste assez méconnu du grand public, malgré également le succès relatif de Shortbus, du même John Cameron Mitchell (auteur et interprète d’origine de Hedwig) qui avait pas mal défrayé la chronique des pédés parisiens en 2006.

Hedwig est tellement un truc pour moi, qu’à l’occasion j’en avais même pondu un article dédié en 2005, et donc vous pouvez y lire un bon résumé du film comme de la pièce.

Ce qui m’épate, en passant, c’est qu’en 2005 je te mettais des « transsexuels » en veux-tu en voilà, c’est marrant comme je n’écrirais plus cela aujourd’hui. Et en réalité, si je regarde l’occurrence des mots-clefs de mon blog, j’ai utilisé ce terme jusqu’en 2008, après je parlais de « trans » tout court, et à partir de 2011 c’est le terme « transgenre » qui est uniquement usité (et c’est le terme correct encore aujourd’hui). On retrouve le terme « transgenre » malgré cela dès 2005 dans un article de libé cité par le sociologue Coulmont qui évoque « l’interdiction judiciaire du mariage entre une transsexuelle et un transgenre« . Et donc la nuance est apportée dans le détail puisque la personne dénommée « transsexuelle » a en réalité mené sa transition jusqu’à un changement d’état civil et une réassignation, tandis que l’autre personne est appelée « transgenre » car ayant transitionné sans changement officiel d’état civil. C’était appelé une provocation à l’époque. Purée, les bigots !! Je pense qu’on s’en branle tellement la nouille aujourd’hui de ces questions, et c’est d’ailleurs en quoi le mariage pour tous portait bien son nom (simple et efficace).

Bref, ce spectacle extraordinaire, et qui est un truc fondateur et culte pour moi, dont on apprend que le droits de représentation en public sont libres depuis peu, bénéficie d’une toute nouvelle production au Café de la Danse à Paris. Je ne connaissais que le film, mais j’ai vite compris la forme curieuse de cette œuvre qui oscille vraiment entre performance théâtrale et musicale. Le lieu est une unique scène, et c’est une belle mise en abîme car c’est VRAIMENT la scène du Café de la Danse où Hedwig est en concert, alors que lorsqu’on ouvre la porte au fond on entend le concert dingue sur toute la Bastille de son amant et Némésis Tommy Gnosis. Et donc le concert, comme n’importe quel concert, consiste bien en des chansons entrecoupées par des histoires racontées par Hedwig. Comme dans un concert classique, la star parle un peu de sa vie, de ce que ses chansons illustrent, et ainsi on reconstitue le fil entier de l’histoire.

Tout commence à Berlin en 1961, avec la mère de Hedwig (alors Hansel) qui les embarque à l’est. On revit son enfance, puis sa rencontre avec un soldat américain qui souhaite l’épouser (pour lui permettre de fuir la RDA) et qui, pour que cela soit possible, lui fait faire une opération de réassignation sexuelle qui tourne mal. Et c’est ainsi qu’il obtient son « angry inch », fruit d’une opération ratée, et avec laquelle il tente de trouver une voie et un certain sens à sa vie et son identité brouillée. Et tout cela, quelques mois avant la chute du mur de Berlin, ce qui ajoute encore à la cruelle ironie de l’anecdote bien sûr.

Là où Hedwig est fabuleuse, et c’est ce qui m’avait tant marqué il y a presque 25 ans, c’est que c’est une personne terriblement mauvaise et vénéneuse, vraiment l’anti-héros par excellence. Je me rappelle à l’époque d’ailleurs des critiques qui pestaient contre une certaine transphobie, avec une approche aussi biologique de la transition et ce choix d’un personnage aussi négatif et en souffrance. Mais les années sont passées, et je pense qu’aujourd’hui cela passe mieux avec un regard rétrospectif, et parce que l’on a, alléluia, accès à des représentations qui nous ont enfin sorti des images de serial killer tordus.

Moi j’ai toujours trouvé qu’Hedwig transcendait cela avec son histoire singulière, et qui pour moi représentait à la fin du film une héroïne à laquelle, au contraire, je m’identifiais parfaitement (et qui m’a beaucoup apporté). Mais je peux comprendre bien sûr que cela ait pu encore ajouter à l’imaginaire « weird » de la transidentité de l’époque.

Hedwig est brillemment interprété au Café de la Danse par Brice Hillairet, et sa performance est tout bonnement hors-norme. Vraiment j’ai été subjugué par son talent, et par la manière dont il incarne ce rôle avec une justesse et une troublante authenticité. Il fait vraiment un grand honneur à John Cameron Mitchell, et est autant talentueux sur le plan vocal que le jeu ou la chorégraphie. On le suit surtout dans sa narration et toutes les émotions par lesquelles il passe du début à la fin. Et il emporte vraiment tout sur son passage, avec une énergie queer du désespoir et un panache de rockstar qui dépasse l’entendement. Les perruques, costumes et maquillages sont très proches de l’imagerie du film, et vraiment c’est une production tout à fait bien troussée.

Son côté méchant est en plus assez grinçant et fonctionne assez bien pour une scène parisienne (selon moi). Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à cette vidéo de Jennifer Coolidge qui tourne aujourd’hui et à laquelle je ne peux que souscrire.

Le passage au français passe étonnamment très bien, sans doute aussi avec l’accent allemand d’Hedwig (qu’on a aussi dans la VO, et il explique bien qu’il suite la tournée de Tommy Gnosis en France), avec les chansons qui sont sous-titrées pour qu’on puisse bien suivre ce qui est raconté. On retrouve aussi certaines illustrations vidéo qui font penser à certaines scènes du film, et qui permettent d’enrichir le dispositif scénique. Car on est dans un truc assez dépouillé au final (une scène de concert un peu minable mais irrémédiablement rock et punk), mais on n’a vraiment pas besoin de plus.

Car on est vraiment dans une toute petite salle, et l’histoire devient encore plus crédible, on se retrouve à la vivre même si la chronologie n’est pas la bonne. Et en plus d’un brillant Brice Hillairet, Anthéa Chauvière, qui joue Yitzhak2, est très très bonne. Et les musiciens qui accompagnent ne sont pas en reste, ils ont une présence scénique remarquable en plus d’être de très bons instrumentistes.

Ce n’est pas compliqué, il s’agit d’un spectacle absolument remarquable qu’il faut urgemment aller voir !!! Vous ne serez pas déçu, c’est un show total et troublant, qui déploie une puissance à la fois rock, punk et poétique, résolument queer et qui ne ressemble à rien d’autre.

  1. A l’époque, on appelait ça comme ça. ^^ ↩︎
  2. Autre personnage dont je me souviens que le parcours était assez critiqué à l’époque dans l’image FtoM qui se révèle dans la détransition. ↩︎

Dans la peau de Cyrano (Nicolas Devort) au théâtre 100 Noms

Voilà un spectacle qui tourne depuis presque dix ans et qui en était hier à sa millième représentation !! J’y suis allé sur le conseil d’un collègue de boulot, et je ne regrette vraiment pas. Il s’agit pourtant d’un exercice particulièrement casse-gueule, mais quand on le réussit alors ça devient une pépite vraiment précieuse. Nicolas Devort a ainsi écrit et interprète ce magnifique spectacle qui le voit pendant 1h40 seul en scène, habillé en noir, devant un décor minimaliste et sombre, et avec une seul chaise pour accessoire.

Il incarne tous les rôles et les interprète tour à tour, passant de l’un à l’autre en un clin d’œil et en changeant : de position, de posture, d’attitude, de voix, et incarnant ainsi à la perfection sept personnages. Il est avant tout le héros de cette pièce très originale et touchante : un garçon nommé Colin qui débarque dans un nouveau collège, et qui a le malheur d’être bègue. On découvre très rapidement ses premiers camarades : le précieux Maxence, le rigolard Benoît, la poseuse Adélaïde, le bellâtre Guyle, ou encore une psy scolaire un peu « cringe » et un prof de français bien passionné et attentionné.

Les personnages sont rapidement identifiables par quelques tics souvent drôles, et comme cela un petit geste nous fait tout de suite comprendre à qui on a affaire. Et clairement c’est plus une fable, donc avec des personnages plutôt caricaturaux mais sans être superficiels, ou dans la facilité. On se demande comment Nicolas Devort tient physiquement pour tenir son spectacle ainsi en bougeant absolument tous les muscles de son corps pendant autant de temps, avec une parfaite maîtrise et coordination évidemment.

Au-delà de la performance qui est vraiment remarquable, l’histoire se tient parfaitement bien. Même si j’ai eu un peu peur au début, car une histoire avec des collégiens, dont un gamin en difficultés et bègue qui se retrouve à jouer Cyrano dans le cours de théâtre de son prof, ça pouvait verser dans la mièvrerie ou le truc un peu trop sucré pour moi. Mais non, car ce n’est pas gentillet ou attendu, c’est souvent très drôle, et on finit par être simplement touché par l’intrigue et la profondeur inattendue des adolescents.

Et il y a le charme de Cyrano, et ça c’est forcément irrésistible pour un amoureux transi de Cyrano comme moi. Et clairement cette histoire là est tellement universelle qu’elle colle aux situations les plus contemporaines et même collégiennes. Alors tout cela reste une fable comme je disais, mais ça n’en reste pas moins une jolie prouesse de réussir à distiller autant de sentiments différents, et de raconter une belle histoire de théâtre rédempteur et émancipateur, un art de la scène et du texte qui emmène plus loin que la simple surface des mots.

Et Nicolas Devort fait montre d’une telle générosité, intensité et authenticité (en plus d’être un peu canon ^^ ) dans son spectacle qu’on est vraiment obligé de le suivre, et de plonger dans son récit et ses personnages. Il est clairement pour beaucoup dans la grande qualité de la pièce, et son énergie assez enveloppante. Chouette surprise !!

West Side Story au théâtre du Châtelet

Le film de Spielberg m’ayant définitivement réconcilié avec la comédie musicale, j’étais hyper content de la voir en vraie au théâtre du Châtelet. Et c’était vraiment une réussite sur tous les plans, et tellement chouette de voir un spectacle vivant aussi tonique et moderne (malgré son âge). Vraiment tout est nickel depuis les danseurs, chanteurs, la mise en scène, les décors et le jeu des musiciens en live, difficile de trouver à y redire.

Allez, il y a sans doute un petit bémol avec Tony qui n’était pas le meilleur des comédiens, et qui manquait un peu de finesse et de suavité ou d’une fibre un peu plus romanesque. Mais sinon l’ensemble des comédiennes (avec un vrai plus pour Melanie Sierra en Maria et Kyra Sorce en Anita, merveilleuses !!) et comédiens sont impeccables, et ils savent aussi bien chanter que danser. J’ai beaucoup aimé aussi les décors mouvant qui donnent un peps génial à la comédie musicale et qui suit vraiment le rythme jazzy et syncopée de la musique (vraiment syncopée au sens d’un rythme assez cassé frôlant avec une certaine dissonance par moment).

Je ne me suis pas du tout ennuyé, avec des morceaux et des parties de chants qui sont maintenant des standards, et une histoire qui tient bien même si c’est une véritable mythologie universelle avec une énième resucée de Roméo et Juliette. Mais justement la portée universelle d’une thématique pareille a l’avantage de ne jamais pouvoir prendre une ride tant elle puise dans les fondements même de l’humanité ( ^^ ) et ses travers. Donc même si tout cela fleure bon les années soixante et un New York City qui n’existe plus, l’identification est tout aussi efficace qu’une tragédie shakespearienne de 400 ans.

En plus de cela, un petit tour à la terrasse du théâtre, et on peut profiter d’une vue nocturne parisienne un petit peu très ouf. ^^

Parades (Diane Segard) à la comédie de Paris

Diane Segard est une comédienne qui a percé sur Instagram avec une galerie de personnages et des saynètes courtes, où elle s’exprime seule face-caméra pendant quelques minutes, souvent en conversation avec un tiers. Dans le même genre, j’aimais beaucoup les Caractères de Lison Daniel. Cette dernière a aussi défrayé la chronique des Internets avec néanmoins une assiduité de plus en plus réduite, et un passage progressif à des médias classiques.

Là où Diane Segard m’épate c’est qu’elle dure et qu’elle est d’une productivité effrayante. Efficience également redoutable puisqu’elle est prolifique, mais presque toujours hilarante. Je dois aussi sans doute être un bon candidat pour son humour, mais vraiment je la trouve super douée. Donc quand on m’a dit qu’elle faisait un show, j’ai vraiment voulu la voir sur scène. On sent tout son potentiel dans les vidéos, avec une personnalité qui transparaît de tous ses personnages, une gouaille française qui est irrésistible, et une apparente facilité à débiter à la vitesse de la lumière des expressions « à peu près » et des aphorismes en-dessous de la culotte à s’en taper le cul par terre.

Mais qu’est-ce que ça peut donner sur scène ?

Ce qui est drôle, c’est que c’est sans doute la crainte de tous les spectateurs, puisqu’on veut à la fois la retrouver sur scène comme sur le net, mais on veut « plus », et on se demande « Es-ce que ça sera aussi bien ? ». Pour en avoir fait la récente expérience, ce n’est pas toujours le cas, et mimer les Internets fait irrémédiablement manquer d’un petit « supplément d’âme ». Eh bien là, Diane Segard en prend carrément le contre-pied et en fait le sujet principal de son spectacle.

On la retrouve ainsi tout de suite dans la peau d’un de ses personnages, mais pour nous expliquer que la comédienne est dans les coulisses et flippe à mort de ne pas être aussi bonne que sur ses vidéos en ligne. Se succèdent alors quelques personnages, puis carrément le florilège de ses « incarnations » les plus fendardes.

Et là, je vous le dis tout de suite, j’ai eu très peur !! Le début n’est pas très bon, mais vraiment pas très bon du tout à mon avis. On ne rit pas, on sourit tout au juste, et ça dure un poil trop longtemps. Mais à un moment, il se passe un truc, un vrai déclic théâtral. Parce que ce n’est pas juste un seul-en-scène de Diane Segard, c’est un moment de théâtre, et une comédienne qui se livre comme jamais elle ne le fait dans ses vidéos. Et c’est là que ça prend, que ça ne vous lâche plus, et que ça finit dans une apothéose géniale. A la fin, j’étais profondément déçu que ça s’arrête, c’est dire si les sentiments se sont bien inversés pendant le spectacle.

Il y a à la fois l’arrivée de ces personnages géniaux comme la maman de Garance ou la mère de Lola, ou encore Anne-So la déglingo, Elo from le Crédit A ou Tata Clope et l’EHPAD des glaïeuls. Et c’est vrai que d’un seul coup, la salle s’enflamme de retrouver ses héroïnes, mais elle nous les sert d’une manière particulière, tout en continuant de broder sur son sujet de base. Elle se découvre ainsi continuellement, nous faisant comprendre ses failles autant que son immense talent de comédienne. On continue maintenant en toute complicité à attendre que Diane Segard sorte des coulisses, et le spectacle même s’il est hilarant, prend une drôle de teinte tragicomique à mesure que l’on voit de mieux en mieux l’angoisse existentielle1 qui s’immisce dans les interstices des personnages endossés.

Et cette fin est incroyable, et la conquête du public est complète et superbe. Les gens applaudissaient à tout rompre, et moi avec eux. La manière subtile et habile avec laquelle elle donne tant d’elle-même, tout en se grimant et se masquant de ses inventions comiques qui ne sont que des extensions d’elle-même, est une méthode imparable pour remporter tous les suffrages et ravir nos petits cœurs sensibles.

Cette générosité, cette authenticité et cet humour flamboyant en font une artiste qui a réussi à surprendre, à aller au-delà des Internets tout en ne reniant pas ce qui a fait son succès.

  1. Le truc de tous les artistes qui ont un brin de discernement et d’humilité. Hu hu hu. ↩︎

Al Dente World Tour (Matteo Lane) à l’Alhambra

C’était tellement cool d’avoir l’opportunité de voir en live un tel comédien de stand-up !! Comme beaucoup de gens (pédés ^^), je vois ses vidéos depuis quelques années, et j’admire son humour « camp » irrésistible et son immense talent de réparti. C’est vraiment l’archétype du comédien new-yorkais de stand-up qui tchatche, et improvise même, en interagissant avec des spectateurs sur fond d’un mur de brique dans un sous-sol d’un café-théâtre. Mais là en plus, c’est pédé à mort, et donc c’est trop cool. Hu hu hu.

Autant je me rappelle avoir vu Margaret Cho dans un cadre assez exceptionnel il y a une dizaine d’années (c’était à la Java !!!), autant maintenant on a assez de gens intéressés par des shows en VO pour avoir récemment vu Hannah Gadsby au Trianon. Et là ce sont donc des comédiens et comédiennes queers ce qui les place, j’imagine, dans une niche rendant encore plus compliqué leurs venus. C’est sans doute très chouette et émouvant pour eux de savoir qu’ils ont autant de fans dans le monde entier, et pour nous de voir ces génies de la scène en France1.

J’ai adoré ce moment de pur stand-up à l’américaine avec un Matteo Lane qui enchaîne les histoires, et qui a un chouette rythme et une jolie habileté à placer ses blagues et ses chutes, ce qui est tout le talent de ce genre d’exercice. J’étais surpris de cela, mais même à Paris, il a réussi à interagir avec des personnes du public, et à les mettre en boîte de manière très sympathique. J’ai retrouvé quelques blagues que je connaissais déjà, mais c’était malgré tout une grande découverte, et j’ai vraiment ri de bon cœur.

J’avais un peu peur car récemment je trouvais qu’il était un peu trop sûr de lui, ou jouant un peu trop sur son côté gym-queen, tout dans l’apparence et « fake« , et je redoutais que ça devienne un peu trop « A-Gay »2 pour moi. Mais le voir en live et avec surtout la manière ultra-décomplexée qu’il a de jouer sur son côté folle et bottom, j’ai plutôt été rassuré.

J’étais déçu qu’il n’y ait pas de rappel, et que ce soit même un chouïa trop court, j’aurais bien aimé encore l’écouter et rigoler avec. Je me dis que ça doit être top dans un vrai contexte de comedy-club à NYC, et que c’est sans doute la meilleure manière de goûter à ce genre d’humour.

  1. Cela montre aussi que le niveau d’anglais a également énormément progresser en France, contrairement à ce que les mythes entretiennent. ↩︎
  2. Je me demande si cela parle à quiconque, je fais référence aux Chroniques de SF où Armistead Maupin évoque ces A gay c’est-à-dire des pédés d’une certaine classe, avec de la thune, musclés, cultivés, masculins et très exclusifs à leur sous-milieu, dédaignant les autres « pas A ». ↩︎