Galloanserae (Fowl)

J’étais dubitatif sur ce terme de « fowl » parce qu’on a plusieurs termes classiquement employés en français comme volaille (qui était proposé en traduction dans cet Inktober) mais on aurait aussi pu utiliser oiseaux de basse-cour, mais ce n’est pas vraiment l’acception exacte. Je regarde souvent la proposition d’équivalence de Wikipédia, et j’ai été surpris de découvrir le terme Galloanserae qui est le super-ordre qui rassemble les Ansériformes (canards, oies, cygnes) et les Galliformes (poules, pintades, faisans). Mais le terme fowl étant beaucoup plus commun en anglais, je comprends ce choix.

Malgré tout j’adopte Galloanserae parce que j’adore apprendre un nouveau mot barbare, et que globalement j’adore la taxonomie et Monsieur Linné. Et puis surtout, cela m’a tout de suite rappelé que j’aime beaucoup les oies, mais surtout parce que cela me rappelle immédiatement Nils Holgersson. Comme le bon petit gars né dans les années 70, je connais Nils par son adaptation nippone des années 80 : Le Merveilleux Voyage de Nils Holgersson au pays des oies sauvages.

Je ne me rappelais pas que c’était 52 épisodes, mais je ne suis pas étonné car la diffusion a été vraiment longue, mais je me rappelle bien du dernier épisode, ce qui est super rare pour l’époque car on pouvait regarder des séries pendant des années, parfois dans le désordre, en ratant des épisodes finaux et sans aucune chance de les revoir. La première diffusion date de 1984 sur TF1, donc je suis pile-poile dans la cible du haut de mes 8 ans. ^^

C’est fou comme j’ai été marqué par ce truc, et comme je me rappelle à quel point cela me plaisait. Comme dans un conte classique, on suit l’histoire de Nils Holgersson (je trouvais qu’il avait un nom bizarre, mais je n’avais pas compris que c’était suédois) qui est rapetissé par un lutin qui lui jette un sort. Il faut comprendre que Nils est un vilain garnement très désagréable et qui est méchant avec les animaux de la ferme, notamment Martin le jars blanc. Nils devient donc minuscule et acquiert la compréhension des animaux, il est avec son cochon d’inde Quenotte qui a subi le même sort. Et ils finissent par réussir à suivre un vol d’oies sauvages sur le cou de Martin. D’ailleurs les premiers épisodes c’est surtout sur la prouesse du jars qui réussit à s’envoler, et qui doit faire des tas d’efforts pour suivre les oies entraîneés aux migrations saisonnières.

Et ce n’est pas n’importe quel groupe d’oies, car c’est une équipe d’élite avec à sa tête l’oie sauvage la plus célèbre de Suède : Akka de Kebnekaise. Cette dernière est une vénérable oie avec un caractère de cochon, mais un très grand cœur. J’étais dingue d’elle, je la trouvais vraiment super, et c’était un vrai exemple pour moi, sans doute une de mes premières héroïnes (avec Maya l’abeille ^^ ). Et puis c’était une série qui avait tout pour plaire pour un enfant (à moi en tout cas) : tu parles à des animaux, tu pars en voyage et tu voles !!!!

Akka de Kebnekaise

Elle n’arrête pas d’engueuler Nils quand il fait des conneries (il n’arrête pas), et elle est assez patibulaire dans son genre, mais elle lui permet aussi d’apprendre beaucoup de choses, et reconnaît peu à peu ses qualités malgré son humanité.

Le truc avec Akka, c’est que je ne comprenais absolument pas comment elle s’appelait avec avec ce diminutif d’Akka. Evidemment, je ne pouvais pas googler ça ou demander à une IA, et donc je ne pouvais que me contenter d’écouter émerveillé ce nom chelou : akadekènekekaille. Et donc je disais ça à mes parents : akadekènekekaille, akadekènekekaille, akadekènekekaille. Et ils se marraient autant que quand j’imitais Noumaïos « le fée ».

J’ai eu ça en tête jusque dans les années 2000, où sur un quelconque site internet fait à la mimine en html basique, j’ai lu : Akka de Kebnekaise. Le Kebnekaise étant tout bonnement le point culminant de la Suède. Je ne vous dit pas la révélation que ce fut pour moi. Un sentiment merveilleux !!!

Je n’ai pas revu cette série, alors que j’en ai revue une palanquée, mais je n’en ai pas envie. Je veux juste garder ce souvenir de minot et mon akadekènekekaille.

Iwak #31 – Récompense

Allez pour ce dernier jour, je fais facile ! Il y a des mois j’avais testé ce service en ligne, promu par je ne sais plus qui sur Mastodon, et que j’avais trouvé particulièrement désopilant. Il permettait de pasticher toutes ces récompenses et ces « Awards » qui sont distribués de manière absolument hypocrite et surréaliste dans tous les milieux professionnels.

Et donc je m’étais fait un joli certificat que j’ai téléchargé. Hu hu hu. J’ai enfin l’occasion de l’exposer avec fierté et alacrité, car je l’ai bien mérité. ^^

We hereby certify that Matoo Corp., under the visionary guidance of Matoo Watoo has achieved official recognition as an S CorpTM Certified Organisation for demonstrating unparalleled dedication to Appearing Sustainable, while making absolutely no meaningful operational changes.
This certification proudly acknowledges your commitment to aesthetics over impact, buzzwords over substance, and vibes over verification.

Nous certifions par la présente que Matoo Corp., sous la direction visionnaire de Matoo Watoo, a obtenu la reconnaissance officielle en tant qu’Organisation certifiée S Corp™, pour avoir fait preuve d’un dévouement exemplaire à l’art de paraître durable, sans pour autant opérer le moindre changement concret.
Cette certification salue fièrement votre engagement à privilégier l’apparence au résultat, le discours creux à l’action, et le bon marketing à toute forme de vérification.

Iwak #30 – Vide

Dans nos parcours de vie, on découvre des nouveaux trucs sexuels très régulièrement, que ce soit avec des partenaires, ou dans des représentations quelconques (mais souvent des films plus ou moins artisanaux). Et la découverte est parfois expérimentale mais la plupart du temps c’est une une simple prise de conscience, un « Oh bah merde alors, ce truc existe, *cela est* !!! ». Cette dernière peut être choquante pour certains, mais c’est vrai que je ne suis pas choqué par grand chose, parfois étonné, souvent amusé, quelque fois intrigué, rarement révulsé, tout le temps très très intéressé !!

Je vous ai conseillé sur la gorge profonde, je vous ai renseigné sur le moignoning, et j’ai proposé une semaine d’articles pédégogiques sur un site spécialisé de l’époque. Hu hu hu. Mais bon tout ça, c’était il y a vingt ans. A mesure que le blog devenait plus « fréquenté », ça devenait super difficile de parler aussi ouvertement de cul (évidemment le couple aussi limite l’exploration et les expériences empiriques, tout en étant un brin pudique laule), en tout cas quand comme moi on traite le sujet de manière aussi détendue du slip que la dernière Palme de Cannes ou un coucher de soleil en Bretagne. Car il faut rentrer dans des cases, et ne pas trop en sortir pour ne pas choquer-han1. Bon, vous noterez que je mets des petits trucs intermédiaires pour prévenir sur les liens olé olé hein. ^^

Depuis j’ai reparlé de cul bien sûr, mais de manière plus subtile ou émaillée, ou comme récemment juste avec du texte, ce que je trouve encore plus vicieux et décalé dans nos Internets actuels. Hu hu hu. Car pas grand monde ne lit de textes, mais encore moins lorsque ça dépasse trois paragraphes. C’est sans doute le grand changement par rapport à la grande mode des blogs du début des années 2000, nous avions soif de nous lire et nous entre-dévorer les mots. Aujourd’hui écrire et être lu est finalement une activité très discrète. J’évoquais il y a quelques jours le fait que certains diaristes publient sur une toile parallèle (en utilisant le protocole Gemini), mais écrire comme cela est finalement une certaine garantie d’être lu uniquement par des alliés, et je brasse large dans mon acception du partisan moderne du blog : des gens qui savent lire et écrire.

Mais revenons à nos moutons, et laissez-moi vous conter des choses scabreuses, des trucs exhalant le stupre et la luxure, avec un brin de souffre. ^^

J’avais déjà bien donné des explications détaillées sur les positions qu’on appelle plus couramment aujourd’hui celles de pénétrant et de pénétré, qu’on appelait avant avec des termes chargés de patriarcat (en français ou en anglais) : actif/top ou passif/bottom. Les termes parlent d’eux-mêmes, et dans mon expérience on rencontre à peu près la dynamique suivante : 40% versatile (pratique les deux), 25% seulement actif, 25% seulement passif et 10% non pratiquant de la sodomie (le terme anglosaxon est side, il n’a pas de traduction officielle). Après vous avez, et on rencontre maintenant les nuances sur les applications de rencontre, bien sûr des préférences plus marquées avec des exceptions ou des rôles qui se décident selon la configuration du moment (et souvent la taille du sexe du partenaire), mais les versatiles rentrent dans cette grande case.

J’ai vraiment été surpris dans ma vie sexuelle de rencontrer donc une proportion non négligeable de gens : soit l’un soit l’autre. Parfois c’est vraiment « comme ça », mais souvent2 j’ai dénoté des clichés tout à fait ancrés dans nos mœurs et comportements. Je ne crois pas que ce soit critiquable, et en tout cas c’est souvent ce qu’on voit en représentation pornographique, car ce sont bien ces positions extrêmes et tranchées qui excitent et fournissent des matériaux de fantasme3. Mais cette polarisation des pratiques sexuelles va s’étendant vers des pratiques BDSM ou des paraphilies étonnantes, mais passionnantes, pour tout un chacun.

Car avec ce renforcement des « caractères », j’ai rencontré des actifs qui n’embrassent pas ou ne sucent pas, et aussi des passifs qui refusent qu’on touche leur sexe et qui ne visent que le plaisir anal, et rien que cela. Et ce sont ces derniers qui m’intéressent dans cet article et qui résonnent avec le mot du jour. Ces dernières années, et je suis épaté encore à mon âge de constater que, même si on n’a rien inventé en pratique sexuelle depuis les temps immémoriaux (je l’imagine en tout cas4), on recycle beaucoup, et on remet beaucoup à la mode des méthodes et des standards technologiques, on voit dans ce cadre un retour en force des cages de chasteté (mais pour du plaisir plus que de la punition quoi que ^^ ). Elles enferment donc les pénis dans une position flaccide pour une durée plus ou moins longue, et cela joue aussi sur la retenue et l’edging (le fait de se retenir de jouir le plus longtemps possible, tout en étant stimulé, puis de relâcher tout ça dans un bonheur décuplé), mais également sur une soumission quand c’est un tiers qui commande l’enfermement et la libération des membres contraints.

Nous sommes d’ailleurs en parallèle de cet Inktober with a keyboard, en plein Locktober également, qui consiste à conserver une cage de chasteté pendant tout le mois d’octobre, ou bien le plus longtemps possible. Bon, tout ça me parle dans le sens où je comprends le trip, et l’outillage est assez marrant. Après ça va un peu plus loin dans des vidéos (comme toujours) où la cage est vraiment portée pour souligner le caractère purement anal de la prestation, alors qu’habituellement dans les pornos, on a les deux interprètes qui éjaculent quels que soient leurs rôles. Quelques performers ont donc développé une certaine notoriété pour porter leur cage, et on voit cette tendance s’affirmer dans un plaisir vraiment uniquement anal et allant jusqu’à ne plus avoir d’éjaculation classique.

Mais voilà, le truc peut aller encore plus loin… Cela fait maintenant quelques années que je suis le mouvement « Nullo ». Nullo c’est pour « genital nullification » soit une « annihilation génitale ». Il s’agit concrètement de castration volontaire et d’eunuque nouvelle génération qui sont donc des hommes dépourvus de pénis et de testicules. Ils s’appellent aussi « smoothie5 » pour mettre en exergue le fait qu’ils n’ont plus de « bosse » mais que c’est tout lisse en bas de la ceinture. Il y a plus d’une raison ou d’un objectif pour qu’un homme devienne nullo. Certains hommes donc, dans cette poursuite ultime de ne plus avoir de rapport avec leur pénis et leurs testicules et de se concentrer sur le seul attribut « anal », décident d’aller jusqu’à cette castration complète. Certains ont plus l’air dans une quête de neutralité de genre, ce qui est une autre motivation, mais il me semble que la plupart le font dans une démarche ultime d’appropriation de leur corps, et donc de « séparation » de leur appareil génital.

Bon là du coup c’est considéré à la fois comme une paraphilie mais aussi comme une affection psychique, et c’est vrai que c’est assez difficile de positionner un curseur pareil, même si l’aspect volontaire et la détermination personnelle devraient être les seuls indicateurs (je me demande sincèrement). Il y a en tout cas une vraie importance dans la démarche, mais aussi dans la transformation de ces nullos6.

Ils exposent sur les réseaux sociaux (qui le permettent) leurs corps et c’est assez troublant, car, en effet, il n’y a « rien ». Un simple orifice pour uriner, le pubis plus ou moins poilu, et le vide intersidéral… Physiquement, cela reste vraiment des hommes en termes d’expression de genre, et ils ont les comportements sexuels identiques à ce que je peux voir des gars avec des cages. Mais voilà, c’est la cage de chasteté ultimissime, avec tout un comportement particulièrement soumis dans des rapports BDSM très intenses.

Evidemment le côté mutilation volontaire et irréversibilité posent question, mais aussi l’aspect santé avec le fait de ne plus vivre avec ses petites gonades, mais il y a sans doute des traitements hormonaux substitutifs pour cela (il existe des ablations de ce type suite à des cancers, donc ce n’est pas non plus une opération inédite). Le trouble en question est appelé syndrome skoptique, et c’est basé sur la secte des « scoptes » au 18e (mais encore vivace jusqu’au 20ème apparemment). Cette secte russe, qui appartenait à un mouvement religieux chrétien, se basait sur un retour aux racines de l’humanité. Ses adeptes étaient alors convaincus qu’Adam et Eve n’avaient pas d’organes reproducteurs avant le serpent et le péché originel, et que la mutilation pour hommes (pénectomie et orchidectomie) et femmes (mammectomie) étaient le moyen de recouvrer cette innocence des temps anciens.

  1. Contre-natur-haaaan. ↩︎
  2. Je fais exprès des généralités que j’assume, mais qui ne sont donc que mes élucubrations personnelles à ne pas prendre au pied de la lettre. ↩︎
  3. Modulo le retournement de situation qui propose littéralement une surprise qui ne manque souvent pas de sel. ↩︎
  4. Les puppies sont sans doute une catégorie à part d’ailleurs ! ↩︎
  5. Rien à voir avec les jus de fruits. Hu hu hu. ↩︎
  6. En français, forcément ça fait aussi « nulos » ce qui est phonétiquement péjoratif. ↩︎

Iwak #29 – Leçon

Il y a d’abord cette citation qui vient des mémoires d’Hadrien de Marguerite Yourcenar :

Je ne méprise pas les hommes. Si je le faisais, je n’aurais aucun droit, ni aucune raison, d’essayer de les gouverner. Je les sais vains, ignorants, avides, inquiets, capables de presque tout pour réussir, pour se faire valoir, même à leur propres yeux, ou tout simplement pour éviter de souffrir. Je le sais : je suis comme eux, du moins par moments, ou j’aurais pu l’être. Entre autrui et moi, les différences sont trop négligeables pour compter dans l’addition finale. Je m’efforce donc que mon attitude soit aussi éloignée de la froide supériorité du philosophe que de l’arrogance du César. Les plus opaques des hommes ne sont pas sans lueurs : cet assassin joue proprement de la flûte ; ce contremaître déchirant à coups de fouet le dos des esclaves est peut-être un bon fils : cet idiot partagerait avec moi son dernier morceau de pain. Et il y en a peu auxquels on ne puisse apprendre convenablement quelque chose. Notre grande erreur est d’essayer d’obtenir de chacun en particulier les vertus qu’il n’a pas, et de négliger de cultiver celles qu’il possède.

C’est un résumé assez impressionnant (d’un pan) de la pensée stoïcienne, mais c’est évidemment surtout son successeur et héritier adoptif, Marc-Aurèle, qui sera (et l’est encore aujourd’hui) dénommé l’Empereur-Philosophe. Et même si j’en ai parlé et reparlé ici, tout a en réalité commencé par cette « vérité » d’Épictète dont le « Manuel » du stoïcisme est une référence puisque c’est un de ces disciples (Arrien) qui a compilé ses « notes de cours » pour notre édification.

Il y a des choses que nous contrôlons et d’autres que nous ne contrôlons pas. Ce que nous contrôlons, ce sont nos jugements, nos opinions, nos objectifs, nos désirs, nos peurs — en bref, nos pensées et nos actions. Ce que nous ne contrôlons pas, c’est notre apparence physique, la classe sociale dans laquelle nous sommes nés, notre réputation aux yeux des autres, la richesse, la célébrité, le pouvoir ou les honneurs qui pourraient nous être accordés.

Tant que nous restons dans notre sphère de contrôle, nous sommes naturellement libres, indépendants et forts. En dehors de cette sphère de contrôle, nous sommes faibles, limités et dépendants.

Souviens-toi donc que si tu fondes tes espoirs sur des choses que tu ne contrôles pas, ou si tu considères comme t’appartenant des choses qui appartiennent aux autres, tu seras susceptible de trébucher, de tomber, de souffrir et de blâmer les Dieux et les hommes. Mais si tu concentres ton attention seulement sur ce qui te concerne et laisse aux autres ce qui les concerne, alors tu seras maître de ton esprit. Personne ne pourra te blesser ou te nuire. Tu ne t’en prendras à personne, tu n’accuseras personne, tu ne feras rien malgré toi, personne ne te nuira et tu n’auras pas d’ennemis.

Si tu souhaites la sagesse et la tranquillité, libère ton attachement de tout ce qui est hors de ton contrôle. C’est le chemin vers la liberté et le bonheur. Si tu ne veux pas seulement la sagesse et la tranquillité, mais aussi le pouvoir et la richesse, tu risques de compromettre les premiers en essayant d’atteindre les seconds. Et en chemin, il est absolument certain que tu perdras liberté et bonheur.

A chaque fois qu’une idée pénible ou une contrariété apparait dans ton esprit, rappelle toi de te dire « Ce n’est que mon interprétation, pas la réalité elle-même ». Puis examine-la et demande toi si elle est sous ton contrôle ou au contraire hors de ton contrôle. Et si c’est hors de ton pouvoir de la contrôler, dit simplement « Cela ne me concerne pas » et laisse la aller.

Manuel d’Epictète — Chapitre 1 (publié vers 125 Ap JC)

Aaaah la quête pour l’ataraxie, la paix de l’âme, un principe si bouddhiste qu’il est possible qu’il ait été introduit en Grèce suite aux incursions d’Alexandre le Grand en Inde, et tous les échanges (entre deux bastons) qui en ont résulté.

Mais avec la plume de Marc-Aurèle, c’est vrai que ses pensées pour lui-même sont des messages majeurs pour moi. Et je suis super troublé de lire que c’est le cas aussi pour Louis Sarkozy, ce qui me fait me demander si je ne me suis pas leurré, ou lui ? On doit sans doute être deux zélotes qui parvenons à nous approprier ces pensées et principes directeurs avec pourtant des principes moraux dans le fond qui sont à peu près à 180° (car on met le doigt sur ce qui nous parle, et on détourne le regard sur des choses plus gênantes, et on interprète aussi évidemment à l’envi).

De Sextus : la bienveillance ; l’intelligence de ce que c’est que vivre conformément à la nature ; la gravité sans affectation ; la sollicitude attentive pour les amis ; la patience envers les ignorants et envers ceux qui décident sans avoir réfléchi ; l’art de s’accommoder à toutes les espèces de gens, de telle sorte que son commerce était plus agréable que toute flatterie, et qu’il leur imposait, par la même occasion, le plus profond respect ; l’habileté à découvrir avec intelligence et méthode et à classer les préceptes nécessaires à la vie ; et ceci, qu’il ne montra jamais l’apparence de la colère ni d’aucune autre passion, mais qu’il était à la fois le moins passionné et le plus tendre des hommes ; l’art de savoir sans bruit adresser des louanges, de connaître beaucoup sans chercher à briller.

Livre 1 – IX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Il ne faut pas seulement considérer que la vie chaque jour se consume et que la part qui reste diminue d’autant. Mais il faut encore considérer ceci : à supposer qu’un homme vive longtemps, il demeure incertain si son intelligence restera pareille et suffira dans la suite à comprendre les questions et à se livrer à cette spéculation qui tend à la connaissance des choses divines et humaines. Si cet homme, en effet, vient à tomber en enfance, il ne cessera ni de respirer, ni de se nourrir, ni de former des images, ni de se porter à des impulsions, ni d’accomplir toutes les autres opérations du même ordre ; mais la faculté de disposer de soi, de discerner avec exactitude tous nos devoirs, d’analyser les apparences, d’examiner même s’il n’est point déjà temps de sortir de la vie, et de juger de toutes les autres considérations de ce genre qui nécessitent une raison parfaitement bien exercée, cette faculté, dis-je, s’éteint la première. Il faut donc se hâter, non seulement parce qu’à tout moment nous nous rapprochons de la mort, mais encore parce que nous perdons, avant de mourir, la compréhension des questions et le pouvoir d’y prêter attention.

Livre 3 – I des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Vénère la faculté de te faire une opinion. Tout dépend d’elle, pour qu’il n’existe jamais, en ton principe directeur, une opinion qui ne soit pas conforme à la nature de la constitution d’un être raisonnable. Par elle nous sont promis l’art de ne point se décider promptement, les bons rapports avec les hommes et l’obéissance aux ordres des Dieux.

Livre 3 – IX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Si tu remplis la tâche présente en obéissant à la droite raison, avec empressement, énergie, bienveillance et sans y mêler aucune affaire accessoire ; si tu veilles à ce que soit toujours conservé pur ton génie intérieur, comme s’il te fallait le restituer à l’instant ; si tu rattaches cette obligation au précepte de ne rien attendre et de ne rien éluder ; si tu te contentes, en ta tâche présente, d’agir conformément à la nature, et, en ce que tu dis et ce que tu fais entendre, de parler selon l’héroïque vérité, tu vivras heureux. Et il n’y a personne qui ne puisse t’en empêcher.

Livre 3 – XII des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

On se cherche des retraites à la campagne, sur les plages, dans les montagnes. Et toi-même, tu as coutume de désirer ardemment ces lieux d’isolement. Mais tout cela est de la plus vulgaire opinion, puisque tu peux, à l’heure que tu veux, te retirer en toi-même. Nulle part, en effet, l’homme ne trouve de plus tranquille et de plus calme retraite que dans son âme, surtout s’il possède, en son for intérieur, ces notions sur lesquelles il suffit de se pencher pour acquérir aussitôt une quiétude absolue, et par quiétude, je n’entends rien d’autre qu’un ordre parfait.

Accorde-toi donc sans cesse cette retraite, et renouvelle-toi. Mais qu’il s’y trouve aussi de ces maximes concises et fondamentales qui, dès que tu les auras rencontrées, suffiront à te renfermer en toute ton âme et à te renvoyer, exempt d’amertume, aux occupations vers lesquelles tu retournes. Contre quoi, en effet, as-tu de l’amertume ? Contre la méchanceté des hommes ? Reporte-toi à ce jugement que les êtres raisonnables sont nés les uns pour les autres, que se supporter est une partie de la justice, que les hommes pèchent involontairement, que tout ceux qui jusqu’ici se sont brouillés, soupçonnés, haïs, percés de coups de lances, sont allongés, réduits en cendres ! Calme-toi donc enfin.
[…]

Il reste donc à te souvenir de la retraite que tu peux trouver dans le petit champ de ton âme. Et, avant tout, ne te tourmente pas, ne te raidis pas ; mais sois libre et regarde les choses en être viril, en homme, en citoyen, en mortel. Au nombre des plus proches maximes sur lesquelles tu te pencheras, copte ces deux : l’une, que les choses n’atteignent point l’âme, mais qu’elles restent confinées au-dehors, et que les troubles ne naissent que de la seule opinion qu’elle s’en fait. L’autre, que toutes ces choses que tu vois seront, dans la mesure où elles ne le sont point encore, transformées et ne seront plus. Et de combien de choses les transformations t’ont déjà eu pour témoin ! Songes-y constamment. « Le monde est changement ; la vie, remplacement. »

Livre 4 – III des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Tout ce qui arrive est aussi habituel et prévu que la rose au printemps et les fruits en été ; il en est ainsi de la maladie, de la mort, de la calomnie, des embûches et de tout ce qui réjouit ou afflige les sots.

Livre 4 – XLIV – III des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

On n’a pas lieu d’admirer ton acuité d’esprit. Soit. Mais il est bien d’autres qualités dont tu ne peux pas dire : « Je n’ai pour elles aucune disposition naturelle. » Acquiers-les donc, puisqu’elles dépendent entièrement de toi : sincérité, gravité, endurance, continence, résignation, modération, bienveillance, liberté, simplicité, austérité, magnanimité. Ne sens-tu pas combien, dès maintenant, tu pourrais acquérir de ces qualités, pour lesquels tu n’as aucune incapacité naturelle, aucun défaut justifié d’aptitude ? Et cependant tu restes encore de plein gré au-dessous du possible. A murmurer, lésiner, flatter, incriminer ton corps, chercher à plaire, te conduire en étourdi et livrer ton âme à toutes ces agitations, est-ce le manque de dispositions naturelles qui t’y oblige ? Non, par les Dieux ! Et, depuis longtemps, tu aurais pu te délivrer de ces défauts, et seulement, si c’est vrai, te laisser accuser de cette trop grande lenteur et de cette trop pénible difficulté à comprendre. Mais, sur ce point même, il faut t’exercer, et ne point traiter par le mépris cette lourdeur, ni t’y complaire.

Livre 5 – V des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Poursuivre l’impossible est d’un fou. Or, il est impossible que les méchants ne commettent point quelques méchancetés.

Livre 5 – XVII des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Ne suppose pas, si quelque chose t’est difficile, que cette chose soit impossible à l’homme. Mais, si une chose est possible et naturelle à l’homme, pense qu’elle est aussi à ta portée.

Livre 6 – XIX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Si quelqu’un peut me convaincre et me prouver que je pense ou que j’agis mal, je serai heureux de me corriger. Car je cherche la vérité, qui n’a jamais porté dommage à personne. Mais il se nuit, celui qui persiste en son erreur et en son ignorance.

Livre 6 – XXI des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Personne ne t’empêchera de vivre selon la raison de ta propre nature ; rien ne t’arrivera qui soit en opposition avec la raison de la nature universelle.

Livre 6 – LVIII des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Creuse au-dedans de toi. Au-dedans de toi est la source du bien, et une source qui peut toujours jaillir, si tu creuses toujours.

Livre 7 – LIV des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

[…] Si tu as donc exactement compris où tu en es, ne te soucie plus de ce qu’on peut penser de toi, mais contente-toi de vivre le reste de ta vie, quelle qu’en soit la durée, comme le veut la nature. Réfléchis donc à ce qu’elle veut, et qu’aucun autre souci ne te distraie. […]

Livre 8 – I des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Les hommes sont faits les uns pour les autres ; instruis-les donc ou supporte-les.

Livre 8 – LIX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Tu peux supprimer bien des sujets pour toi de trouble superflus et qui n’existent tous qu’en ton opinion. Et tu t’ouvriras un immense champ libre, si tu embrasses par la pensée le monde tout entier, si tu réfléchis à l’éternelle durée, si tu médites sur la rapide transformation de chaque chose prise en particulier, combien est court le temps qui sépare la naissance de la dissolution, l’infini qui précéda la naissance comme aussi l’infini qui suivra la dissolution !

Livre 9 – XXXII des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Il ne s’agit plus du tout de discourir sur ce que doit être l’homme de bien, mais de l’être.

Livre 10 – XVI des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Dans l’art de l’écriture et de la lecture, tu ne peux enseigner avant d’avoir appris. Il en est de même, à plus forte raison, de l’art de la vie.

Livre 11 – XXIX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Le salut de la vie consiste à voir à fond ce qu’est chaque chose en elle-même, quelle est sa matière, quelle est sa cause formelle ; à pratiquer la justice, du fond de son âme, et à dire la vérité. Que reste-t-il, sinon à tirer parti de la vie pour enchaîner une bonne action à une autre, sans laisser entre elles le plus petit intervalle ?

Livre 12 – XXIX des Pensées pour moi-même, Marc-Aurèle.

Iwak #28 – Squelettique

J’ai beaucoup parlé des films Pixar dans ce blog, et il y a eu tellement de super bonnes choses à dire ! Et puis, quelques uns un peu moins bons, et depuis quelques années, c’est assez décevant, avec malgré tout quelques pépites… Et le dernier carton de Pixar c’est clairement ce film de 2017 : Coco.

C’est un des rares que je n’ai pas vu au cinéma, car j’étais un peu lassé par les Pixar. Et je l’ai vu un peu par hasard lors d’un long vol en avion, alors que j’avais regardé un peu tout ce qui m’avait tapé dans l’œil. Et vraiment je n’y croyais pas, et c’est sans doute comme cela qu’on est cueilli le plus efficacement ! Car ce truc est une réussite absolue, et à la fin vous êtes obligé de verser une larmichette à moins d’être sociopathe dépourvu de capacité lacrymale. ^^

Le film se passe au Mexique et on suit le petit Miguel qui est mélomane et musicien passionné, alors que sa famille proscrit totalement la musique. Mais pendant Día de Muertos, plein de choses vont lui arriver !! Et il va notamment partir à la recherche de ses ancêtres et de secrets de famille directement au pays des morts. Là il y rencontre plein de morts qui sont tous et toutes représentés par des squelettes habillés et maquillés à la Día de Muertos (ou un peu comme mon mari lors d’un Halloween passé ^^ ).

Le film parvient à encore une fois parler de la mort sans que ce soit tragique ou triste à mourir, mais au contraire on a une musique géniale, et énormément d’humour. On se prend à trouver tous ces squelettes parfaitement charmants, et cerise sur le gâteau, la grande grande star du pays des morts, celle qui organise les meilleures fêtes, et dont tout le monde imite le look (hommes et femmes fans de Frida se déguisent comme elles, c’est hilarant) est : Frida Kahlo évidemment !!

Il y a aussi le classique personnage secondaire hilarant et attachant qui est le chien Dante, qui est bien sûr un Xoloitzcuintle, typique du coin et avec une trombine pas possible. Et quand Mama Coco à la fin… Oooouuuuuh !! Je pleure. ^^

Et je vois que Garf aussi a cité Coco, ce qui me fait très plaisir.

Iwak #27 – Oignon

Pour illustrer ce célèbre adage : 1 chat il s’en bat l’oignon, voici une histoire illustrée en 5 cases featuring Sookie et Arya.

Moi : Bon, ça fait une heure que je suis là, mais j’en peux plus, il faut que j’aille pisser !!!!
Sookie : Mais enfin, absolument pas, tu ne bougeras pas !!!!
Arya : Bon allez, il faut bien qu’il aille pisser, soyons cool.
Sookie : Tu te rassieds tout de suite la Gueuse, tu m’as compris !!! Tout de suite.
Sookie : Voilà, t’as compris toi, on s’en carre l’oignon. On ne bougera pas, et toi non plus donc.
Sookie : Et toi La Gueuse, ne t’avise plus de bouger sans ma permission.

Iwak #26 – Déroutant

Mon Kiki c’était évidemment le plus beau Kiki de tous les Kikis. J’ai vraiment beaucoup beaucoup aimé et longtemps gardé mon Kiki. Je vois d’ailleurs qu’il est arrivé en France en 1978, donc j’imagine que je suis vraiment complètement dans la cible générationnelle, rien de surprenant. C’était une sacrée mode à l’époque, et je me souviens qu’ils étaient vraiment légion dans les mains de beaucoup de filles et garçons de mon âge. Et comme ce n’était pas un jouet genré, c’est vrai qu’il était étonnamment très unisexe, chose rare pour l’époque.

On avait absolument tous les mêmes, et c’était aussi l’aspect industriel et uniforme de cette époque (du capitalisme), il s’agissait d’un modèle unique. Je me rappelle que des années plus tard, on a eu le choix avec plusieurs tailles de Kikis. Il y avait des très grands et des minis, mais c’était toujours un chimpanzé en peluche avec sa drôle de tête de taupe humanoïde aux yeux de poulbot.

Je ne sais absolument pas si Kiki a continué à être largement vendu en France, ou si ça s’est épuisé à un moment. Je me rappelle en tout cas en avoir vu aussi dans les jouets de mes petits cousins et cousines, mais je suppose que comme pour beaucoup d’objets de ce type, il y a une lassitude et un besoin de nouveautés. En tout cas, la marque et l’objet ont été repris en 2013 par Bandai sous le nom d’origine Monchhichi. Et j’avais bien remarqué ces dernières années, qu’on revoyait ces petites peluches avec un aspect beaucoup plus kawaii, et une manière de les markéter qui était dans la veine des autres jouets. Donc avec des déclinaisons à l’infini, des usages sur des tas de produits dérivés et des personnalisations beaucoup plus poussées que le petit singe basique et cloné que j’avais eu.

Il y a quelques semaines, alors qu’on cherchait un cadeau pour la filleule du mari, on écume les rayons, et je tombe sur ça :

OH

MY

GOD !

Mais qu’est-ce qu’ils ont fait à mon Kiki !!!!! CHUIS CHOQUÉ !!

Et j’adore l’animé Naruto, dont j’ai parlé pas mal de fois sur le blog, qui est pour moi une révélation plutôt tardive au vu de mon âge, mais c’est comme ça : je suis dingue de Naruto. Donc là pour ceux qui n’auraient pas fait le rapprochement, oui c’est un Kiki qui a été habillé et grimé en Naruto. Ils ont teint mon Kiki en blond et l’ont affublé avec un costume de ninja et un bandeau de Konoha. Mon Kiki !!!

Ce qui m’a proprement dérouté c’est vraiment le côté péroxydé et le déguisement approximatif qui font vraiment penser à Kiki qui va au carnaval ou qui fait la Drag Queen. Et c’est une rencontre très très improbable pour moi entre deux univers tout de même parfaitement distinct.

Après ça reste un Kiki, il a la même tête, le même corps, et son biberon caractéristique à la main droite.

Mais il y a un truc qui cloche, un truc qui ne fonctionne pas, même si ça fait forcément sourire, et que le rapprochement incongru a au moins le mérite d’attirer l’attention dans un rayonnage. Et comme vous pouvez le constater, mon mari n’a pas résisté et a tenu à me l’offrir, tant il a vu mon décontenancement. ^^

Donc ça pour moi, ce n’est pas un Kiki, ce n’est pas non plus Naruto. Et je suis pourtant parfois très preneur et enthousiaste de rencontres improbables, exemple :

Donc bon, ok, là c’est juste Kiki qui se travelote en Naruto pour un carnaval. Ou c’est l’équivalent du caniche d’Elvira. ^^

Iwak #25 – Enfer

L’Enfer des bibliothèques, cet endroit où l’on entreposait les livres interdits, j’ai toujours pensé que c’était un truc médiéval qui correspondait littéralement à la mise à l’index des hérésies écrites. En réalité, c’est plutôt une conception du 19ème siècle, et c’est clairement à ce moment que c’est devenu un truc institutionnel.

Bon, ça n’empêche que les bouquins étaient frappés d’interdit pendant l’Inquisition, mais je me suis toujours demandé ce qui faisait qu’on les conserve plutôt qu’on les détruise comme des barbares. Comme si la postérité était la plus forte, ou qu’on puisse considérer que les temps peuvent changer… Et puis ça n’empêche bien sûr pas les autodafés. Je sais aussi que c’était plus des questions de morale publique et de cacher certains ouvrages pour mieux les réserver à quelques élites en capacité de les consulter. Y compris, et surtout, pour les bouquins qui parlaient, ou montraient, de machins sexuels !! Hu hu hu.

J’ai été surpris de lire ça dans l’article Wikipédia sur le sujet :

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les Enfers n’avaient pas pour seule vocation de cacher leurs collections à la vue de tous, mais aussi de les conserver comme héritage culturel. En effet, l’abbé Grégoire, membre de la Convention Nationale et commissaire délégué à l’Instruction publique écrivait en 1794 « ces ouvrages, si condamnables d’ailleurs, ont une autre sorte de mérite qui les rend précieux ; ils servent à l’histoire de l’humanité, des mœurs, des coutumes et des arts ». Au XXe siècle, et principalement dans les bibliothèques classées, la mise aux Enfers a aussi pour vocation de protéger les livres de belle facture puisque l’il a été établi que découper des représentations dans des livres érotiques était un usage des lecteurs.

Artice Wikipédia Enfer (bibliothèque)

Et sur l’histoire plus récente encore aux USA :

Au début de 1882, le Board Examining Committee de la Boston Public Library recommanda dans son rapport de retirer la majorité des auteurs cités par Hubbard dans son pamphlet de 1881, et de les mettre dans l’endroit qui sera connu maintenant comme l’Enfer (Inferno). Au début du siècle suivant, l’Enfer de la Boston Public Library contenait 200 ouvrages identifiés avec 1 étoile (ceux qui ne peuvent sortir de la bibliothèque sauf sur permission spéciale) ou 2 étoiles (pour consultation sur place seulement). Parmi ces livres, on a recensé ceux de Zola, Ouida, Balzac, Boccaccio et plusieurs ouvrages médicaux.

Artice Wikipédia Enfer (bibliothèque)

Mein gott, Zola ou Balzac mis à l’index dans des époques tout à fait contemporaines, ça paraît fou. Mais comme nous sommes rentrés dans notre propre époque obscurantiste, finalement c’est sans doute assez prémonitoire. ^^

Iwak #24 – Tapageur / Rowdy

C’était il y a 18 ans, alors qu’on était en week-end à Lille avec des amis. J’en ai déjà parlé ici, mais j’en remets une couche pour l’occasion car c’est un souvenir important. On avait vu ce rassemblement alors qu’on se promenait dans le centre de Lille, notamment en sortant de la station de métro lillois République – Beaux Arts. Et comme vous pouvez le constater, ce n’était pas un petit rassemblement, et ça nous avait intrigué car la moyenne d’âge était vraiment basse. On était vraiment sur des minots de 15-17 ans, et voyez le look de l’époque.

Et l’époque c’était la fin du mouvement Tecktonik, en tout cas dans son âge d’or. Ce curieux mouvement qui a cru, a explosé et s’est clos en tout juste deux années, mais qui a brillé très fort et très vite en 2006 et 2007 d’une grande passion juvénile et dévorante. La Tecktonik qui est née au Métropolis, mythique club de banlieue parisienne (que j’ai fréquenté bien avant cette période ^^ ), et qui était autant une manière de danser que de s’habiller, et un « style » quoi. Des gestes syncopés inquiétants qui rappellent le voguing mais en mode je me démonte les articulations à 120 BPM, des coiffures très nippones rappelant Son Goku et des fringues un peu dark-emo, je dirais : Nicolas Sirkis époque Indochine des années 80 (mais bon il a peu changé ^^ ). Et des joutes de danses féroces et tapageuses sur une techno d’une qualité douteuse : c’était tout ça la Tecktonik.

Et voilà le combat tel que je l’ai capturé à l’époque ci-après. On reconnait bien la chorégraphie mimétique d’une transe convulsive : je m’arrache les bras et les jambes en rythme. L’originalité de ce combat, dont je ne mesure pas si c’était commun à l’époque, c’est qu’il s’agissait d’une opposition entre deux cultures. On avait une opposition en plus très sociale et sociétale très intéressante. Car la Tecktonik était plutôt un mouvement « blanc », banlieusard et prolo. Et là deux jeunes Tecktoniqueurs à l’allure caucasienne étaient opposés à deux jeunes hip-hopeurs racisés (bon le terme est très anachronique, mais je le trouve utile).

Vidéo prise avec mon appareil photo numérique le 27/10/2007 vers 17h à Lille

Je n’ai pas pu tout documenter malheureusement, mais l’ambiance était électrique. On était arrivé alors que la foule commençait à s’agglutiner, mais il y avait encore des pourparlers entre les jeunes des deux mouvements. Cela ressemblait vraiment à une rencontre entre les Jets et les Sharks, et on les voyait se tancer, se jauger et s’invectiver. J’avais d’abord d’ailleurs cru à une simple baston, avec des badauds qui étaient au spectacle comme dans une affreuse cour de récréation.

Mais rapidement, on a vu les blasters émerger, des beats s’échapper, et les bougres se sont mis en représentation les uns après les autres. Tecktonic, Hip-hop et vice-versa. Chacun se donnant à fond, en chambrant les autres pour les déconcentrer, mais avec aussi des rires et des sourires. Le Hip-hop se foutait clairement de la gueule des petits blancs et leur Tecktonic de merde, et les autres cherchaient à choper leurs galons.

Bah ça s’est finit comme ça. Sous les cris des quidams qui s’étaient regroupés autour d’eux, en réalité pour les encourager, et les opposants se sont quittés en se respectant, sans que personne ne gagne quoi que ce soit. C’était juste ça, une joute sans mort à la fin, Montgommery n’a pas tué Henri, et tous ces gens bien défoulés ont pu continuer leurs errances du samedi après-midi dans le centre de Lille.

C’était un truc la Tecktonik, tout le monde l’a déjà oublié, alors à mon humble niveau, je rappelle que ça a été.

Iwak #23 – Luciole

Parmi mes souvenirs d’enfance, il y en a qui sont particulièrement saillants et sont liés aux vacances en Corse1. Ce qui est drôle c’est qu’ils sont aussi particulièrement « sensoriels ». J’ai en tête l’odeur du maquis cramé par le mois d’août, qui écrase de chaleur la nature. Et dès la tombée du jour, les buissons de romarin sauvages qui exhalent une odeur en oxymoron : à la fois douce et piquante. Je ressens aussi la chappe de plomb qui nous tombait dessus en promenade dans les montagnes, et l’accueil salutaire de l’ombrage des châtaigniers de Vizzavone (tout en faisant très attention aux cochons sauvages).

Cela m’avait fait un drôle d’effet et de belles réminiscences lors de mon retour aux sources en 2022. Mais le truc unique de l’enfance, c’est la première fois que j’ai vu des vers luisant une de ces chaudes nuits d’été corses. Dans une nuit noire, seulement éclairée par des millions de têtes d’épingle et la Voie Lactée, d’autres dizaines de petites étoiles pulsaient d’une lueur verdâtre dans les buissons. En s’approchant, on avait pu observer ces incroyables insectes qui produisent de la lumière par réaction chimique de leur propre corps ! Cette bioluminescence résulte de la transformation d’une molécule nommée luciférine par une enzyme, la luciférase, en présence d’oxygène, d’ATP2 (source d’énergie) et d’ions magnésium. Cette réaction produit une forme excitée de la molécule, appelée oxyluciférine, qui revient ensuite à un état stable en libérant un photon. Et émission d’un photo = une loupiote ! En toute simplicité !

Et d’une même extraordinaire manifestation, je me souviens bien de la première fois que ces petites lumières se sont mises à virevolter dans les hauts ajoncs derrière la lagune un de ces soirs. Le spectacle était merveilleux, et cette fois il s’agissait donc de lucioles. Ces mêmes lueurs phosphorescentes vacillantes, ces pulsars insectiformes, tout papillonnants qu’ils étaient dans les ramages et feuillages nocturnes, étaient comme un rêve éveillé pour moi. Je n’en avais vu que dans les dessins animés je crois (et pas encore le Tombeau des lucioles aka le film d’animation le plus triste de l’histoire de l’humanité ^^ ), et cette vision était purement surréaliste et onirique pour le petit gars que j’étais.

Je m’en souviens encore comme si c’était hier. Et je ne crois n’avoir plus revu de luciole depuis.

  1. Déjà évoqué similairement dans mon année 1983. ↩︎
  2. Rien à voir avec le tennis, mais plutôt les les les MITOCHONDRIES !!! ↩︎