Trilogie Cocteau / Philip Glass à la Cité de la Musique

J’étais content de réussir à dégoter des places pour ce spectacle. C’était vraiment très original (et réussi) d’avoir comme cela une sélection de morceaux tirés de trois opéras de Philip Glass adaptés de films de Cocteau, et interprétés en solo par deux pianos. Et les deux pianistes en question sont deux sœurs virtuoses qui ont montré là l’étendue immense de leur talent. Elles sont tout de même un peu flippantes à jouer les sœurs siamoises, mais si c’est leur kif. ^^

Come and play with us, Danny!

Ce n’est pas tout car la promesse était encore plus « intense » avec l’annonce d’une scénographie, et même d’un complément olfactif original par des diffusions de parfums spécialement concoctés pour l’occasion. Bon, et là le bât blesse…. La scénographie c’était ce lustre en néon qui fluctue de temps en temps, et passe d’un couleur froide à un peu plus chaleureuse (et en couleurs pour la dernière partie). Je m’attendais en effet à un truc un peu moins minimaliste, je l’avoue (bien entendu le minimalisme de la musique est utilisé comme justification). Et même si l’on faisait bien le lien avec la Belle et la Bête, je ne vois pas trop celui avec Orphée ou Les Enfants Terribles. si vraiment le truc (qui dans l’absolu est très bien) avait eu un vrai rôle pour souligner certains moments ou illustrer des passages, pourquoi pas. Mais là c’était juste un PNJ.

Et les parfums c’était trop anecdotique, avec encore une fois un accord de roses bien sentis (hu hu hu) pour La Belle et la Bête dont la fleur est un personnage en tant que tel. Mais le reste, bah ok j’ai lu le programme, mais c’est le genre de textes boursoufflé et emphatique qui fait peur, et là à raison.

Mais heureusement le cœur d’un tel concert c’est la musique, et la qualité était au rendez-vous. Je ne suis pas un grand fan d’Orphée ou de la Belle et la Bête de Glass, mais Les Enfants Terribles vraiment j’aime beaucoup. J’avais déjà vu l’opéra en entier il y a 15 ans, et l’entendre ainsi avec ce double piano fut un plaisir immense. Et donc ce dernier morceau a complètement remporté mon adhésion. Et je salue vraiment l’appropriation très enlevée et « passionnelle » que les interprètes ont parfois apporté à une musique à la base minimaliste, et pouvant aussi être jouée de manière un peu plate et sans âme. Au contraire, ce fut un moment très fort, à l’image de l’opéra lui-même, avec une énergie superbe et un hommage très cool à la partition de Glass.

Iwak #27 – Bête/Animal

Souvent quand mes parents insistaient pour nous montrer des films, on soufflait comme de bons ados, mais au final très souvent on admettait que c’était pas mal du tout. Et en général, quand on avait trouvé ça bof, ils reconnaissaient que ça avait beaucoup vieilli. Quand on a vu le film de Jean Cocteau de 1946 : la Belle et la Bête, on s’est rendu à l’évidence : c’est un putain de bon film !!!

C’est vraiment encore pour moi un des grands chefs d’œuvre du cinéma mondial, et clairement dans mon « top » personnel. Il bénéficie déjà d’un noir et blanc d’une incroyable beauté et qui est vraiment utilisé pour raconter son histoire de manière particulière. Mais clairement, quand on voit un peu les films de l’époque et celui-ci, on voit à quel point il est moderne et n’arrive pas à prendre une ride. C’est sûr que le conte lui donne une portée particulièrement globale, d’autant plus que c’est un des mythes universels qu’on retrouve dans énormément de cultures depuis la nuit des temps, même si la « Bête » en tant que telle vient sans doute de Pédro Gonzalès.

Et il y a tout cet imaginaire incroyable porté par les décors et les effets spéciaux (consistant surtout à filmer des scènes puis les repasser à l’envers, comme cela on voit les bougies s’allumer comme par magie), j’avais été super impressionné par ces mains qui s’animent et font le service, et ces instants féériques totalement magnifié par la réalisation.

Bien sûr, il y a la Bête avec Jean Marais incroyablement grimé, et aussi totalement « gay-acting« , vraiment impossible de le penser hétéro deux secondes, qui joue merveilleusement bien ce prince maudit qui essaye de conquérir le cœur de la Belle.

Mais alors ma déception à l’époque et qui me trouble encore aujourd’hui, c’est que le film reste toujours très péjoratif vis-à-vis de la Bête, et que la Belle ne l’aime vraiment bien que quand il devient un homme. Avant, à peu près tout le monde méprise la Bête, et ça paraît être l’opinion publique. Aujourd’hui, à l’image du film de Disney d’ailleurs, il me semble qu’on serait plus aimable et enclin à aimer aussi la Bête. Inclusion à fond !!! ^^

Mais ce qu’il y a de mieux à propos de la Bête et la Bête, ce n’est pas ce film merveilleux, c’est clairement cette chanson géniale d’Amanda Lear qui est injustement méconnue. Ce tube fabuleux et inoxydable fera un jour, je l’espère, un retour tonitruant dans les charts, tant il a un potentiel entêtant, mystérieux et électrogroovy. Chef d’œuvre, je vous dis, chef d’œuvre !