Coincidentia oppositorum

Voilà quinze jours que j’ai modifié ma manière de contribuer sur les réseaux sociaux. Bien sûr c’est lié à l’arrivée (de nouveau) de Trump à la Maison Blanche et l’implication d’à peu près toutes les plateformes dans son élection et la célébration de celle-ci. Et cela brosse large : d’Apple à Google, en passant par Meta (Facebook, Instagram, Whatsapp), Amazon, Spotify et Twitter. Donc c’est au-delà même des réseaux sociaux, et c’est globalement l’ensemble des outils numériques utiles à la vie (sur les Internets) de tout un chacun, et gratuits en apparence (mais on le sait « si c’est gratuit, c’est que c’est toi le produit »).

Ce n’est pas évident de quitter tout cela, et c’est à la fois pour des raisons pratiques, mais surtout parce que j’ai des habitudes très ancrées et que personne n’aime changer. Les réseaux sociaux sont des rites de fréquentation du quotidien, et me concernant une véritable assuétude pas toujours positive et rarement féconde, mais c’est aussi une source d’information, d’échanges conviviaux et de divertissements (et de bites) non négligeable.

J’ai peu à peu beaucoup limité mes interactions à des publications de photos, d’abord sur Instagram, puis dupliquées partout où je suis inscrit, et des liens vers des articles du blog, en plus de maigres échanges avec des pairs. La polarisation extrême des expressions et des opinions m’a fait me fermer peu à peu à tout débat en ligne, et je ne le vis pas plus mal depuis. Comme tout le monde, je me replie derrière les lignes de mon camp, et je vois les mêmes travers des deux côtés, mais je trouve ceux d’ici un peu plus acceptables évidemment. ^^

Donc depuis deux semaines, je ne publie plus sur Twitter, Facebook ou Instagram, mais je suis toujours inscrit, et je m’y connecte assez peu car j’ai simplement supprimé les applications mobiles pour Twitter et Facebook (j’ai conservé Instagram). Donc je garde des accès par navigateur old school ce qui limite naturellement et pratiquement mes occasions de me rendre dessus.

Facebook est tellement impraticable et inutile que cela ne me peine vraiment pas. Mais c’est un lieu où des membres de ma famille prenaient des nouvelles, il y a aussi le groupe de Clohars-Carnoët qui était assez pratique pour avoir des news de la maison, mais bon on peut imaginer à quoi ressemble ce genre de forum (full boomer imprécheune)… ^^ Et les liens vers mes articles de blog étaient de moins en moins montrés à mes contacts. Je garde le compte, mais je vais vraiment le faire mourir d’inanition.

Pour Twitter, je pensais que ça serait plus difficile, mais non. Il y a tout de même en face deux réseaux de choix qui sont une très bonne substitution : Bluesky et Mastodon. Le premier est un succédané de Twitter (fondé par Jack Dorsey, le co-fondateur de Twitter) et a l’air d’avoir remporté une première bataille du micro-blogging post-X. Et c’est vrai qu’on y retrouve nos marques, avec quelques éléments encourageants en termes de modération des échanges, mais aussi de maîtrise de ses contenus. En revanche, c’est une plateforme qui devra monétiser des choses pour s’en sortir un de ces quatre, mais pour le moment ils continuent leur stratégie « don’t be evil« . Ils remportent aussi la mise car ils réduisent les barrières à l’entrée, et ont une stratégie de conquête de nouveaux utilisateurs, donc rien de très nouveau dans le monde du marketing digital… J’y retrouve en tout cas absolument l’ensemble de ma communauté Twitter (et anciennement diariste), même si quelques irréductibles ne changent pas de bauge, ce qui est drôlement triste (pour moi).

Concernant Mastodon, c’est vraiment à l’image de ce blog sous WordPress. Mastodon est un système de micro-blogging ouvert et mutualisé. Donc il faut que quelqu’un ouvre un serveur Mastodon et le maintienne, exactement comme je maintiens mon propre blog ici. Mais ensuite, on est complètement libre et sans aucune contrainte marketing. Néanmoins inutile de dire que la barrière à l’entrée est assez importante car ce n’est pas une seule plateforme mais des milliers dans le monde entier, et que c’est encore un truc de geek un peu fou furieux. Moi je trouve ça plutôt simple et intuitif, mais bon je suis tellement dans la cible. Hu hu hu.

J’ai trouvé par hasard un serveur tenu par un chouette pédé de Seattle et c’est l’url qui m’a tapé dans l’œil : super-gay.co1 !! Eh bien aujourd’hui sur cette instance, il y a 68 personnes inscrites. C’est un peu comme si on était 68 auteurs sur un même blog, avec la même url en début d’adresse de blog. Mais à partir de notre instance, on peut suivre n’importe qui sur n’importe quelle instance. Il suffit de connaître son identifiant et son serveur, donc pour moi par exemple : « @matoo@super-gay.co« , un peu comme une adresse email en réalité. Je donne deux euros par mois à l’admin pour filer un coup de main sur les coûts d’hébergement, mais la plupart d’entre eux assument seuls ces charges.

Donc c’est plus compliqué qu’une seule plateforme uniforme, sur laquelle on peut chercher des gens. En revanche, si on pratique comme d’habitude de proche en proche, en allant piocher dans les conversations et les listes de « suivis/suiveurs » de ses potes, ça marche très bien. Et là, j’ai nourri une communauté qui se recoupe avec les autres, mais qui est également assez différente. On est sur beaucoup plus de nerds des Internets libres et open-source, mais aussi des altermondialistes, des queers à la pointe de la queeritude, des pirates de toutes les obédiences, et de militants de tout poil (et aux cheveux bleu et rose). Inutile de préciser que je m’y sens comme un poisson dans l’eau. Je retrouve un peu l’ambiance des débuts du net, avec énormément de contacts dans le monde entier. Je trouve ça très cool de convoler avec des pédés anglais, américains ou globalement anglophones, et de se lier comme cela numériquement comme j’avais pu le faire avec Yahoo! à la fin des années 902. ^^

Mais bon je comprends ceux qui trouvent ça trop relou et compliqué. Et j’aime cette barrière à l’entrée aussi élitiste soit-elle. En revanche, ça ne donne pas spécialement à ces plateformes le vent en poupe, alors que c’est un outil fantastique et complètement détaché de toute monétisation. ¯\_(ツ)_/¯

Donc depuis quinze jours, c’est photos et liens vers le blog depuis ces deux plateformes de micro-blogging. Bah ça va. J’ai survécu. Hu huhu. Et je dois constater que les statistiques du blog sont absolument exactement les mêmes, ce qui m’épate, mais c’est vraiment ça.

Whatsapp ne sera pas trop compliqué à remplacer par Signal sans doute. Je dois encore faire ma mue pour me détacher de Google, et comme ce sont des outils je peux là encore en geekant trouver des solutions acceptables3. Je crois que le plus difficile ce sera de ne plus consommer Instagram, car c’est une source de contenus qui me plaît et divertit beaucoup (Youtube aussi mais c’est un usage très très ponctuel pour moi).

En revanche, j’aime beaucoup voir les fameux « créateurs de contenus » justifier leur présence ici ou là avec la notion de « résistance de l’intérieur ». D’ailleurs ce n’est pas une notion complètement viciée, mais c’est juste que ce n’est pas du tout le sujet. Le truc c’est que les plateformes ont rendu captifs les créateurs de contenus qui en dépendent pour se faire voir et connaître du plus grand nombre, et réussir à gagner sa vie directement (pub) ou indirectement (vente de trucs). Et d’ailleurs moi aussi je suis, à ma manière, un de ces créateurs de contenus, puisque je vous dis que je poste des liens vers ici. ^^ En revanche, je n’en dépends pas financièrement, et je pense même qu’offrir ces contenus médiocres doit me coûter de l’argent à moi (les coûts permettant de maintenir ce blog en vie), c’est ce qui me permet d’avoir l’impudence de vous écrire ainsi en conservant une certaine intégrité et probité devant les Dieux des Internets. Et mon seul moteur reste donc mon orgueil démesuré. Ah ça mon hubris, il est toujours là, et bien en forme le bougre. Hu hu hu.

Et donc je ne jette pas la pierre à ces créateurs de contenus qui dépendent de telle ou telle plateforme. Mais quand elles rejoignent explicitement l’extrême droite et les LGTBphobies, cela pose sans doute quelque dilemme à l’ensemble des militant·e·s que je suis depuis tant d’années. En réalité, aucun « gros » compte n’a quitté de plateforme majeure, en se tirant certes une balle dans le pied, mais en étant conforme à son Credo.

Clément Viktorovitch, dont j’adore les live Twitch en podcast avec son Café Rhétorique qui propose des heures et des heures de déblatérations passionnantes sur des sujets politiques, en a parlé récemment lors d’un épisode explicite Faut-il quitter Twitter ? Et il explique clairement que ce n’est pas un crève cœur pour lui car ce n’est pas du tout un réseau avec une forte traction le concernant et donc ça ne le dessert pas trop de s’en séparer, mais il garde tous les autres qui sont tout autant complices de Trump (mais c’est vrai que Twitter est particulièrement vénéneux). Il explique aussi qu’un Mélenchon qui a 3 millions de followers ne peut absolument pas s’en passer, même s’il tente de trouver une justification.

Ce qui m’épate quand j’écoute tous les commentaires à ce sujet, y compris de la part de Clément Viktorovitch, c’est encore autre chose. Aucun d’eux n’a de recul sur leur propre succès sur ces réseaux, et la manière dont ils nourrissent et entretiennent la croissance de ces béhémots à la morale douteuse. Or ces plateformes cherchent plus d’utilisateurs, et le plus de temps passé possible pour collecter un maximum de données et de recettes publicitaires. Ainsi les algorithmes ont été conçus pour organiser et favoriser cette polarisation des opinions et les « clashs » car c’est très efficient pour atteindre leurs objectifs. Si en chemin, on détruit la démocratie, ce n’est qu’un effet de bord.

Après je n’essaie pas non plus de grossir le trait, et c’est également le talent de certains de ces hâbleurs des Internets qui est aussi à leur crédit4. Mais je suis persuadé que c’est également ce qui nourrit la polarisation la plus diamétrale qui est promue aux premiers rangs de ces réseaux. Et je regrette qu’on ne trouve pas plus d’autocritique de cet acabit, même si c’est compliqué de se dire que sa réussite sur les réseaux populaires actuels est la preuve ipso facto de son échec (au moins moral).

Récemment, j’ai été étonné d’une critique acerbe et un rien jusqu’au-boutiste de Mathieu Burgalassi, dont j’ai déjà parlé ici, et dont j’aime énormément les contenus, toujours finement réfléchis, structurés, argumentés et d’une grande probité intellectuelle. Il a créé une vidéo vraiment très importante pour critiquer un très gros compte Instagram avec une grande popularité : L’Esprit Critique.

Ces derniers publient des contenus qui ont eu beaucoup de succès sur les réseaux, et sont promus comme des outils pour mieux comprendre les méthodes de manipulation des politiques. Mais en réalité, Mathieu Burgalassi démontre assez rapidement et implacablement qu’il s’agit d’une campagne marketing pour vendre des formations. Et c’est vrai que ça n’a jamais été dit aussi clairement, même s’il n’y a pas non plus vraiment tromperie sur la marchandise. Mais c’est indéniablement un stratagème de vente, et c’était bien de le mettre en exergue. En revanche, alors qu’on comprend tout ça dans les trente premières minutes de la vidéo, le vidéaste continue à taper sur l’émission, et encore et encore pendant trente minutes de plus.

Et le reproche principal qui est fait c’est que ce sont des gens non engagés, non militants et qui se permettent de critiquer à droite, comme à gauche, et quand c’est à gauche c’est clairement vicié. Alors ce n’est pas faux, et c’est important de noter ce côté « centriste » et se voulant impartial, peut-être dans une simple volonté commerciale. Mais ce n’est pas un crime non plus, et je ne crois pas qu’ils ne se soient jamais fait passer pour des militants justement. Donc je trouve juste que c’est un peu fort de café, un peu agressif et très très énervé de sa part d’être aussi remonté5.

Mais dans le même temps, le (très gros) compte Instagram wikihowmuseum (dont j’ai posté déjà des mèmes ici) qui a toujours été tellement génial et drôle tire à boulets rouges sur le même Esprit Critique. Et je comprends le truc, mais je trouve qu’ils tapent trop fort… Est-ce que je suis trop veule alors ? Bah peut-être bien, en tout cas cela m’interroge.

Et donc cela m’a aussi fait réaliser que je suis évidemment plus à l’aise avec ces contenus, aussi polarisés soient-ils, parce qu’ils sont de ma paroisse. Et malgré tout, je lis encore beaucoup d’injonctions très radicales de militants, mais qui ne sont pas créateurs de contenus per se.

Et donc dans la même paroisse, j’ai ces gens qui disent que rester sur Twitter c’est être collabo, mais je continue à suivre sur des plateformes tout aussi méphitiques des créateurs de contenus de la même obédience, qui sont obligés de rester pour continuer à exister.

Piouuuuu, c’est compliqué la vie. Je continue à suivre le conseil de Joan Cornellà que j’ai posté en tête de l’article. ^^

  1. Quelle meilleure définition de votre serviteur ? ^^ ↩︎
  2. J’utilisais les « Yahoo! Profiles » qui étaient des sortes de pages de profil permettant de se connecter par affinités. ↩︎
  3. Même si les grandes plateformes se sont retrouvées à financer aussi considérablement l’open-source, et en cela rendant essentiel leur implication et leurs usages déguisés. ↩︎
  4. Et cela fonctionne à tous les niveaux et pour tout le monde. Les prolos et les cons ont leurs influenceurs et leurs médias aussi critiquables soit ils. Les gens plus intelligents, fins ou bobos ont aussi les leurs… ↩︎
  5. Même si moi aussi les mecs de ScPo qui vendent des formations pour accéder à ScPo, ça me fait un peu vomir dans ma bouche. ↩︎

Comme toi en fait ?

Je découvre, peut-être après tout le monde ^^ , cette série de planches absolument délicieusement désopilantes de Kalam, ça s’appelle Annyo, le mouton à 5 pattes. C’est drôlement sagace, opiniâtre tout en étant marrant (ou genre rire jaune et grinçant parfois), et ce strip là m’a bien fait sourire.

En plus, on peut produire ses propres planches avec un générateur qui propose de disposer ses personnages et ses phylactères à base de moutons, loups, bergers, chiens et autres. C’est très cool. ^^

David Lynch

J’avais posté ce mème lors du premier confinement de l’épidémie de COVID, et c’est tellement l’image d’Épinal de Lynch…

C’est rare que je poste comme cela à propos du décès d’un artiste, mais c’était vraiment un type que j’admirais énormément, même si en l’occurrence c’était vraiment plutôt une idole de mon chéri. Et c’est sans doute lui qui est le plus touché, mais comme je vis avec, et que j’en subis cette délicieuse influence du quotidien, il a peu à peu renforcé mon admiration du cinéaste, et m’a aussi donné pas mal de clefs pour mieux comprendre son œuvre.

J’aimais beaucoup, comme pour Hitchcock, qu’on le voit en caméo ou dans des petits rôles dans certains films ou séries. En tête d’article, j’ai mis cette image de lui dans Dune (1984), où on le voit en réalité quelques secondes lorsqu’il communique avec les chenilles des moissonneuses sous attaque des vers d’Arrakis. ^^

Mais la vraie découverte de Lynch pour moi, c’est vraiment en 2007 lors de l’exposition « The Air is on Fire » à la Fondation Cartier. C’était un vrai tour d’horizon de tout le génie de l’homme, expliquant non seulement la facette la plus connue du réalisateur, mais aussi celle de l’artiste polyvalent qu’il était. Et quand on découvrait ses peintures, sculptures, dessins et créations vidéos, on accédait à tout un nouvel univers lynchien, ou plutôt une prolongation de celui qu’on appréhendait par ses films.

Bref, une pensée pour toi David !

Evidemment depuis hier c’est l’explosion des mèmes à propos de Lynch. Pour finir sur une note humoristique, voilà un détournement du Dune de 1984 qui m’a beaucoup fait rire. ^^

*Edit du même jour*

Alors ça c’est une drôle de coïncidence, je suis en train de me refaire la série Fringe que j’adore, et voilà qu’à l’épisode S03E10 (The Firefly) Walter Bishop a la remarque et action anodine suivante :

Huhuhu, le Dr Jacoby de l’Université du Washington avec ces lunettes là… Twin Peaks Easter egg!!

Aux urnes !

Les mèmes fleurissent depuis aujourd’hui, et j’aime beaucoup tous les discours qui justifient qu’on se réjouisse de la mort d’un homme, mais vraiment spécifiquement pour celui-ci alors que c’est un sacré tabou pour les autres. Je ne sais pas quoi en penser philosophiquement, mais ce front de haine paraît un juste retour… Après, la loi tu Talion n’a jamais été pour moi non plus, mais j’imagine que parisien, j’aurais aimé aller ressentir l’ambiance de la place de la République. Cela paraît une réaction si intense, spontanée et gôchiste, ça fait au moins du bien à mes valeurs.

Un peu comme si on avait trouvé une détestation commune et transgénérationnelle au vu de la longévité du bonhomme et de ses persifflages. C’est aussi l’occasion de revoir toutes ses éructations politiques, le mec est clairement l’émétique le plus efficace de la politique française de ces dernières décennies, et pourtant il y a du niveau.

Ce qui m’ennuie le plus, c’est que cela fasse de l’ombre aux dix ans du 7 janvier 2015 et des attentats contre Charlie Hebdo.

Pour finir sur une note plus féline, je sais que vous êtes là pour ça aussi. ^^ Voilà le retour à Nantes pour Arya et Sookie, la première qui s’étend toujours autant des pattes arrières dans son panier, et l’autre qui prend sa classique retraite monastique dans un placard à vêtements.

À hue et à dIA

Je vais faire exprès de ne pas promouvoir ce post sur les réseaux sociaux, et ne pas non plus y mettre de mots-clefs pour attirer l’attention sur les personnages représentés. Depuis quelques jours, on peut sur feu Twitter utiliser leur IA maison pour générer des images. Mais contrairement à l’ensemble des moteurs de génération qui sont disponibles, plus ou moins gratuitement, sur le marché, celui-ci permet d’utiliser et de mettre en scène l’image de personnalités.

Alors on est limité et on ne peut pas mettre en scène des assassinat ou du porno, mais c’est suffisant pour des détournements ou des associations incongrues. J’ai généré les photos de cet article, et on peut voir à quel point c’est redoutablement efficace malgré la jeunesse de l’outil.

Je ne peux pas m’empêcher d’y voir de la part du réseau social une volonté de polariser encore les personnes, et de donner un outil supplémentaire pour rendre les complotistes plus complotistes, et bien énerver les extrêmes. Au-delà de l’usage peu licite de l’image même de ces gens, on va dans un premier temps semer le doute, et rapidement, sans doute en quelques semaines, simplement rendre toute image suspecte et à jamais considérée comme non-fiable.

Je n’ai aucune idée de savoir si c’est une bonne chose, et que cela nous mettra tous à égalité avec à présent l’expression universelle « Oh ça c’est photochopé1« . Ou bien si c’est un instrument de plus dans les réalités alternatives, donc j’ai cru que ce serait un effet de mode, mais qui s’ancrent dans nos sociétés malgré tous les fact-checkeurs et personnes de bonne volonté de l’Univers Connu.

  1. Ma mère la connaît, donc le monde entier la connaît. Désolé c’est mon étalon. ^^ ↩︎

Convergence des luttes et convergence des haines

Il y a quelques temps mes pérégrinations virtuelles mastodonesques1 m’ont amené vers le profil d’Elia J. Ayoub, puis son podcast « The Fire These Times« , et par sérendipité juste sur un épisode intitulé « This Arab is Queer ». Eh bien, vous me croirez si vous voulez, mais ça a aiguillonné ma curiosité. Hu hu hu.

J’ai ainsi pu écouter des coreligionnaires arabes et queer qui discutent notamment de l’ouvrage présenté par Elias Jahshan : This Arab is Queer.

C’est un regroupement de plusieurs textes qui avait aussi été présenté à l’IMA l’année dernière, et qui permet de découvrir des auteurs et autrices LGBT qui s’expriment véritablement sur leurs ressentis et leurs expériences « de première main ». Le podcast permet d’avoir un petit aperçu de cela, mais aussi d’avoir un discours très nuancé et plutôt sain, à mon avis. C’est à dire qu’on n’est pas du tout dans le fait de prôner l’occident comme seul havre pour les LGBT, ni à dire que c’est le rêve d’être pédé au Moyen-Orient, mais qu’il y a des nuances dans tout cela. L’homophobie est terrible à vivre dans les pays arabes, mais on y trouve aussi des évolutions et de l’optimisme, et il faut s’y battre pour que ça continue, et même en assumant des paradoxes moraux et religieux. Le racisme existe dans les pays occidentaux, mais c’est encore là qu’on y trouve un vrai espace de liberté, et qu’on améliore aussi la société dans bien des domaines. Oh que ça m’a fait du bien d’entendre cela.

Bref, j’ai trouvé ça assez salutaire par rapport à toutes les mises en boîte instantanées que je lis tous les jours. Les discours totalement symétriques et diamétralement opposés consistant à être : pour l’arrêt du massacre des gazaouis et donc propalestinien et donc antisémite, ou pour la défense d’Israël suite au 7 octobre et donc islamophobe et d’extrême droite.

Et de la même manière, j’ai vu fleurir des tas de mèmes et de blagues de droitards sur le fait que des associations queer revendiquent un soutien à la Palestine en mode « chickens for KFC » comme ci-dessous ou pire. Le pire étant sans doute quand Marianne reprend cela pour le traduire « Les dindes votent pour Noël » avec en plus une jolie métaphore homophobe bien sentie. ^^

Mais pourtant, on peut soutenir le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, avant même de parler de droits LGBT, parce que là c’est juste ça quoi. Et pour autant, ça ne réfute absolument pas l’homophobie comme valeur cardinale de ces gens, mais juste on voudrait qu’on arrête de les massacrer sous un faux prétexte, juste parce qu’on aimerait bien s’en débarrasser une bonne fois pour toute pour annexer leur territoire. Et en face, l’acceptation de façade des LGBT ne tient pas une seconde, quand on voit la réalité des valeurs d’un gouvernement israélien d’extrême droite. Si en revanche Israël est bel et bien un pays assez tolérant des LGBT, c’est bien un ensemble de valeurs portées et défendues par des gens de gauche, les mêmes qui sont aussi contre la politique d’extermination et de colonisation de leur gouvernement.

Orphéus en a parlé récemment, et c’est ce qui m’a décidé à reprendre cet article. ^^ Je repensais à un article que j’avais écrit en 2006 en revenant de vacances en Israël (que j’ai adoré !), qui m’avait valu une sacrée volée de bois vert. Et le pire c’est que je ne démens pas ma maladresse ou même mes torts. Oh mais que j’en ai des torts et des défauts ! Mais on est presque vingt ans plus tard, et en réalité c’est juste exactement la même chose…

Et pourtant ça me titille, car oui l’antisionisme2 est aussi le repaire des antisémites, tout comme l’anti-mariage gay est celui des homophobes alors que la manif pour tous nous a seriné être très très acceptante et gay-friendly. Je sais donc que les discours un peu trop sophistes peuvent vraiment faire prendre des vessies pour des lanternes.

Et moi-même, je critique certains gays de droite qui ferment les yeux sur l’homophobie de leurs gouvernants, et ils pourraient me répondre que l’on peut séparer les choses comme je le fais pour la Palestine. ^^ Comparaison n’est pas raison, je sais. Et là c’est un peu gonflé comme raisonnement, et un vrai syllogisme au final. Mais j’essaie aussi de tester les limites de mon propre raisonnement, et de mon propre système de valeurs.

La convergence des luttes nous incite à essayer de dépasser certains clivages, et a essayé aussi de penser au-delà, ou bien c’est juste une intersection de velléités protéiformes jusqu’à un mouvement si singulier qu’il ne représente plus rien ni personne ? Mais la convergence des haines, on l’a vu parfaitement incarnée lorsque lors de la manif pour tous, en 2012, des représentants officiels des religions chrétiennes, juives et musulmanes s’étaient ligués au-delà de leurs propres inimitiés. Ils avaient défilé dans leur haine commune des LGBT, et on a même pu y voir un certain terreau optimiste de valeurs communes… Mein gott.

Pour finir, cette situation actuelle me paraît juste parfaitement illustrée par ce mème que j’ai posé en tête d’article. J’en parlais déjà en 2006, le truc est tellement imbriqué, avec de la haine des deux côtés, des exactions des deux côtés, des gens qui ont tort et raison des deux côtés, et depuis tant de temps, que revenir aux raisons pragmatiques et légales d’origine paraît illusoires. On s’en sortira donc autrement que par un simple exercice de raison, de droits ou de morale, et pas à l’aune du respect des droits LGBT même si c’est tentant pour certains (adeptes du pinkwashing). Mais je n’ai pas idée de comment… En tout cas je suis incapable de dire qui a le droit ou qui devrait. Il faut juste que les massacres s’arrêtent !

  1. Vous voyez que ce réseau social sert à quelque chose !! ^^ ↩︎
  2. J’en parle très directement et sans ambages dans mon post de 2006 et je réutiliserais pas la même phrase aujourd’hui car ce serait trop maladroit (ça l’était déjà) malgré la grande complexité et subtilité de cette notion qui est parfaitement bien documentée dans sa page Wikipédia. ↩︎

Mon brave Titouan, vous êtes un génie du mal

Le compte IG Tintinades est vraiment une source inépuisable de rilolage pour moi. Et je suis retombé sur celui-ci plus haut qui me fait en effet mourir de lol. ^^

Il y en a quelques uns avec des blagues bretonnes, et je trouve que c’est toujours une belle mise en boite, tout en restant absolument adorable. Et j’ai tellement lu et relu Tintin toute mon enfance, que ce décalage percutant fait terriblement mouche.

La danse des forêts

Est-ce que vous êtes passés à côté de Josiane Pichet ? Naaaaan ? Mais au cas où et pour l’édification des masses et la postérité, je me dois d’en parler ici au moins une fois. Ce truc a au moins autant de potentiel que La Chute !! Parce que déjà le truc de base est à mourir de rire. On a donc découvert, il y a quelques mois, une certaine Josiane Pichet, dont la voix était un brin familière, qui faisait la promotion de la « danse des forêts » et dont la narration était un peu trop drôle et caricaturale pour être réelle. Mais pendant quelques minutes, on s’est tous dit « mince c’est du lard ou du cochon » ?

Et puis, on a appris que c’était bel et bien un détournement de la vidéo d’une dame en Europe de l’Est qui est en effet l’amie intime de Dame Nature, mais le rigolo a collé la voix de Boutin (avec une IA) et lui fait dire ce texte drolatique !!

Mais le plus drôle, ce sont évidemment les détournements du détournements. On a eu des remix, d’autres personnages, d’autres doublages, et voilà une version encore deepfakée de Marine L, qui m’a tellement fait riloler !!

Et nous voilà maintenant avec cette version macronisée désopilante à souhait !!! Alors on a de moins en moins de lien avec la vidéo originale, mais j’adore comme les caricatures de caricatures permettent cette créativité d’humour, de dérision, de n’importe quoi, et d’immense efficacité dans la mise en boîte d’un message politicard bien corrosif au final. ^^