Superman (James Gunn)

C’était une grosse promesse cette nouvelle génération de Superman pour DC Comics. Mais bon, on nous vend quasiment toujours ce genre de chose hein… Après c’est tellement la cata les films de super-héros, mais c’est vrai que si je jette un coup d’œil dans le rétro côté DC c’est The Suicide Squad1, et côté Marvel c’est le troisième et ultime opus des Gardiens de la Galaxie. Et qu’ont-ils en commun ? Eh bien ce sont des films de James Gunn, le même gars à qui l’on doit ce retour de Clark Kent sur les écrans, et le début d’une nouvelle séries de films DC.

Et je vous le dis tout de go, c’est une très très bonne surprise !!!

Ce n’est pas le meilleur film de la Terre, mais c’est vraiment sympathique et agréable à regarder, et c’est surtout un film d’une facture tout à fait correcte. James Gunn a fait du James Gunn, ni plus, ni moins. Donc c’est bien fichu, léché, pas con, bien joué, et une attention particulière aux effets spéciaux, à un scénario avec un sous-texte pas complètement hollywoodien, et un bon mix de représentation (notamment homme-femme). Et c’est exactement ce que j’ai reconnu dans ce Superman.

Mais déjà, une bonne chose, le film dure un peu plus de deux heures (et je n’ai pas senti de longueurs), et ne s’appesantit pas sur une énième introduction de la vie de Superman. Donc pas de destruction de Kypton, de parents éplorés, de comète qui file vers la Terre avec un bébé Kal-El qui apprend des trucs en accéléré, et pas de découverte de l’adoption ou de sa jeunesse. Non, en trois phrases résumées et trois plans, on est avec Superman qui se prend une méga déculottée de Lex Luthor et se plante la tronche dans une épaisse couche de glace en Antarctique. Le film démarre en une minute, bravo !!

Et James Gunn en profite du coup pour donner quelques surprises dans ce qu’on pense une ellipse parce qu’on connaît tous l’histoire du kryptonien. Par exemple, on découvre les parents de Clark comme deux bons bouseux à l’accent à couper au couteau (et son père c’est JJ LaRoche2 !!) et pas du tout des gravures de mode peu crédibles, comme on nous vend parfois (la mère notamment est croquignolette). Et les parents biologiques, Jor-El et Lara, alors qu’on les voyait comme des pacifistes qui envoient leur fils sur Terre pour son bien et celui de ses habitants, bah en vrai dans un message complémentaire décrypté par Luthor, on découvre qu’ils sont des enflures qui conseillent à Kal-El de baiser à couilles rabattues pour asseoir une lignée, et surtout de dominer les terriens qui sont des faiblards.

On a aussi une bonne galerie de personnages, avec un chouette David Corenswet qui est mignon comme tout en Clark/Superman, mais aussi un très très bon méchant avec Nicholas Hoult en Luthor qui n’y va pas par quatre chemins, et qui est parfois carrément inquiétant. L’excellente Rachel Brosnahan, la merveilleuse Mrs Maisel, est une Lois crédible et plutôt charismatique. Le film se positionne aussi avec quelques side-kicks héroïques qui sont aussi suprenants et que sympas. On a notamment un Nathan Fillion très drôle en Green Lantern avec une coup de cheveux improbable, une surprenante Hawkgirl, assez bad-ass et qui ne fait pas de la figuration, et un Mister Terrific qui est le plus mis en avant (le comédien jouait Darwin dans un ancien X-Men) et qui est véritablement essentiel à l’intrigue.

Bien sûr, je n’oublie pas le chien de Superman, Krypto, qui n’est pas d’ailleurs son chien, mais il ne garde juste pour quelqu’un. Le chien est complètement dingue et fout un bordel sans nom avec ses super pouvoirs. Il est d’ailleurs une des facettes du comique du film, ce qui est assez nouveau à ce niveau de comédie dans un Superman selon moi (ou bien rappelle un peu celui de 78). Car c’est souvent très drôle, et très bien tourné en dérision à maints égards, ce qui contraste avec la vision « Snyder » toujours très « dark » et gothique, très porté sur le drame et la noirceur d’âme des personnages.

Il s’agit d’un savant dosage, et d’une alchimie qui a bien fonctionné pour moi. On a en plus une petite réflexion politique pas piquée des hannetons, avec un Lex Luthor qui clairement est un concentré du pire d’Elon Musk, tout simplement. Mais le plus important pour moi dans un film pareil, c’est tout de même la qualité des effets spéciaux. Et là, ouf, on y est. C’est très très beau et on ne se croit pas dans un jeu vidéo. Les scènes sont très propres, le chien qui est complètement en CGI est très bien rendu, et on a droit à des scènes d’action hyper haletantes et convaincantes, aussi bien pour la qualité des effets que pour la chorégraphie des combats.

Après l’histoire peut tenir sur un timbre-poste, je m’en fiche, mais elle tient la route, et on a un divertissement de qualité, formellement, esthétiquement, sur le fond, pas trop con et qui réconcilie avec la saga Superman. Comme je l’ai dit, le cahier des charges « James Gunn » est un brin trop visible et académique, mais c’est vraiment parce que je fais mon chieur. Pour une fois, je me dis « ah vivement le prochain ! ».

  1. A l’exception du Justice League retapé par Zach Snyder, mais c’est un tel ovni… ↩︎
  2. Pruitt Taylor Vince qui a joué un célèbre personnage de la série Le Mentaliste. ↩︎

Nosferatu (Robert Eggers)

Je connaissais surtout le Dracula de Coppola que j’aime énormément, mais je n’avais pas vu l’original de Murnau de 1922, ni le remake de 1979 (de Werner Herzog avec Klaus Kinski et Isabelle Adjani). Après avoir vu ce remake là, j’ai regardé celui de Murnau, et il est en effet vraiment bluffant pour l’époque, et encore tout fait regardable1. J’avais lu des avis assez partagés avec des critiques notamment du jeu de Lilly-Rose Depp, et donc j’y allais avec un peu d’a priori.

Mais force est de constater que j’ai beaucoup aimé le film. On est vraiment dans un respect profond pour l’œuvre d’origine avec un grand respect de l’histoire, mais aussi des plans et des décors d’origine. En revoyant celui de 1922 juste après, la filiation est absolument visible. On est donc dans un exercice de genre autant que dans un hommage, et il s’agit vraiment d’une réinterprétation avec des codes de cinéma et des techniques un peu plus modernes mais pas trop.

Donc le jeu est parfois un peu appuyé mais j’y vois simplement un style expressionniste assumé, et qui, à mon avis, passe vraiment bien, même en comparaison de nos standards. Là où ça peut peut-être pêcher, c’est qu’il n’y a pas du tout d’action. Le rythme est un peu lancinant, et le film de 1922 avait plus de scènes « percutantes » à cet égard. Mais ça ne m’a pas vraiment dérangé, et j’étais complètement dans le film du début à la fin.

J’ai vraiment aimé la direction artistique, la musique, et ce style gothique et expressionniste qui le rend aussi singulier et totalement hypnotisant pour moi. J’ai trouvé aussi que Lilly Rose-Depp était magnifique et plutôt bonne comédienne, avec quelques scènes de bravoure notables pour incarner cette Ellen/Mina. Pour Bill Skarsgård c’est carrément de la performance pure au vu de ce qu’il accomplit et comment il est transformé, mais c’est plutôt très convaincant.

Ce n’est vraiment pas aussi efficace, d’un point de vue purement cinématographique, que le Dracula de Coppola, mais je lui trouve un charme fou, et il réussit à alimenter une tension continue pendant deux heures. J’ai bien aimé aussi cette fin, plus conforme au Murnau, qui joue sur la faiblesse de Nosferatu vis à vis d’Ellen, et dont elle use pour sauver tout le monde. C’est encore une fois une scène d’action en moins en mode « allons tuer la bête », mais cela donne un moment d’horreur romanesque, angoissant et glam à la fois qui est assez incroyable.

Ce n’est pas un grand chef d’œuvre, mais j’ai vraiment bien aimé, et ça mérite un coup d’œil.

  1. Un peu comme ce film dont j’avais parlé et qui date de la même année. Vraiment les chefs d’œuvre ont un truc universel qui leur permet de traverser les époques. Après j’ai juste un bémol pour Nosferatu qui est la scène où il transporte lui-même son cercueil à travers la ville comme un benêt. C’est à mourir de rire, et la scène aussi où il se redresse de tout son long a tellement été pastichée que c’est difficile de ne pas sourire. ↩︎