À hue et à dIA

Quand je chemine cahin-caha sur les Internets au quotidien, je me note régulièrement des petits liens, et je continue à en collecter pas mal sur l’IA générative. Quelques trucs optimistes mais surtout énormément de peurs ou de méfiances parfaitement étayées par une intuition solide, des études scientifiques, et parfois la réalité des faits qui se déroulent sous nos yeux. Je ne vais pas vous en pondre un article tous les deux jours, et au contraire de l’immédiateté de nos informations, qui sont obsolètes à peu près deux heures après avoir été publiées, j’attends un peu de voir… pour voir.

Les thématiques autour de l’IA se diversifient, et je vois souvent des « sujets » qui émergent, fleurissent puis s’estompent. Cet été, j’ai lu des tas de choses sur les impacts de l’IA sur l’éducation, et c’est absolument flippant. D’un Monsieur Samovar qui est en pétards, à raison, à Spencer qui s’interroge sur le bienfondé de la technologie en s’aidant de la pensée de Jacques Ellul, et ce brillant papier qui résume parfaitement les choses, c’est une catastrophe qui gronde déjà. Et ce qui est fou c’est que ces phénomènes sociaux qui prenaient des décennies, ne prennent que des mois. On verra dans moins d’un an les impacts de l’usage massif de l’IA générative par nos têtes blondes dans l’éducation, mais également chez les adultes même si ce sera plus diffus.

Très concrètement, c’est Microsoft qui lancé les festivités en annonçant fièrement des licenciements liés aux usages de l’IA dans leurs opérations quotidiennes. C’est beaucoup plus discret chez nous évidemment, mais on le voit déjà par un effet « en négatif » avec des agences de com par exemple qui ont gelé les recrutements de rédacteurs ou de community managers, ou bien qui font faire le boulot de 3 ou 4 personnes par une seule.

Après, l’usage intensif des IA montre que c’est loin d’être la panacée. Entre les modèles qui nécessitent d’utiliser des tas d’humains (sous-payés dans des pays en développement bien sûr) pour les faire évoluer et empêcher des débordements ou hallucinations, mais aussi ces mêmes humains qui doivent modérer des contenus et en sortent traumatisés. Et sur l’usage même, je vois que les sources commencent à sacrément souffrir, on voit des citations de sites web qui sont complètement rédigés par des IA, et on a forcément une baisse de qualité à chaque régurgitation d’une information dont la qualité d’origine est douteuse. Mais ce qui se passe tout simplement, c’est que les créateurs de contenus dont le modèle de subsistance repose sur la publicité sont en train d’arrêter car l’IA ne fait qu’extraire de la valeur sans rien en rétribuer. Et apparemment le phénomène est déjà visible !

Sur le sujet des modèles qui s’épuisent par endogamie, on voyait récemment une recrudescence d’image générée avec un filtre sépia pourri. Et c’est sans doute lié à la mode des images générée avec le style Ghibli qui a inondé les Internets, et en retour cela influence les modèles qui statistiquement considère cela comme une norme à reproduire. Toutes ces limites sont saines et devraient nous permettre de prendre du recul, et de raison garder, mais la course à l’échalotte est bien trop folle pour cela.

Quand j’ai vu cette vidéo sur Mastodon, je me suis vraiment demandé mais ce n’est pas possible, c’est de l’IA non ? Et donc il me semble que c’est une vraie vidéo, mais impossible d’être catégorique. J’aurais tellement envie de m’en émerveiller candidement, mais au lieu de cela je doute… ^^

Et si l’on devait encore se convaincre de l’impact environnemental calamiteux pour l’IA générative, voilà un article pour ajouter de l’eau au moulin. Après c’est valable pour tellement et tellement d’autres choses du domaine du numérique, mais tout aussi globalement de notre modèle de consommation, et finalement du capitalisme tout court. Mais bon ça n’aide pas quoi…

Pour finir sur une note un peu différente mais connexe, j’ai évidemment jubilé à la lecture de ce texte de Karl.

Ne vous laissez pas désabusez par la commercialisation excessive, par la récurrence massive des robots d’indexation quelque soit leur nature : moteur de recherche, data scrapers, AI bots.

Tous ceux-ci peuvent bien indexer tout mon contenu, copier mon contenu, le réinterpréter. Ce n’est pas ce qui m’intéresse. Je trouve du plaisir dans les gens que je lis. J’espère que certains ont du plaisir à me lire. Le reste n’est pas important. Ce n’est pas la première merdification que je vois passer. Les framesets. Je suis encore là. Le flash. Je suis encore là. Les bandeaux publicitaires. Je suis encore là. Le Web 2.0. Je suis encore là. Les réseaux sociaux. Je suis encore là.

En ce moment tout le monde s’affole des bots IA. Je serais encore là après. L’important c’est ce que vous publiez et ce que vous lisez. Les moteurs de recherche peuvent bien mourir. Les bulles X et Y peuvent bien exploser. Les magazines de la tech insipides en ligne peuvent bien cesser de publier. Cela ne me concerne pas. Je lis au quotidien des gens formidables.

Extrait de l’article « laver le riz » par Karl (Les carnets Web de La Grange)

J’y ai pensé aussi. C’est vrai que depuis la petite lorgnette de ce site ouaibe écrit à la mimine, je vais continuer à publier mes élucubrations, et à nourrir qui voudra, humains et non-humains. ^^

Après avoir mis en sommeil mes comptes Twitter, Facebook, Whatsapp1 et Instagram, je constate que tout le monde y sévit encore exactement comme avant (et j’y retournerai aussi peut-être hein ^^ ). Et je vois l’hypocrisie des militants anticapitalistes qui disent que c’est essentiel pour toucher les gens, même s’ils nourrissent la bête immonde en passant. Et je vois la bêtise crasse des personnes qui comptent sur ces plateformes pour « tout bloquer », ou bien simplement une candeur insupportable et terriblement endémique d’une société qui est bien trop engluée dans ses rets pour s’en sortir. Thierry Crouzet décrit très bien tout ce qu’il fait pour sortir des algorithmes tout simplement, et c’est passionnant. Car on a tellement l’habitude qu’on nous donne les choses toute crues qu’en effet on est surpris quand on consulte un réseau comme Mastodon ou qu’on termine de lire ses flux RSS.

Bon bah, comme d’hab, j’ai digressé. ^^

  1. Le plus difficile à supprimer alors que les alternatives sont là, c’est insupportable. ↩︎

La sobriété en relation polyamoureuse

J’ai été très touché par cet article de Ruru Pepito qui fait le point sur quelques mois de sobriété « chemsex ».

C’était très cool quand même de retrouver des pd toutes les deux semaines à poil et de baiser et discuter comme s’il n’existait que nous sur cette terre confinés dans ces appartements obscurs et qui sentent la clope. Trop chiant que ce soit la drogue qui nous ait rassemblés.

[…] Ca m’a vraiment interrogé sur mes propres émotions quand j’étais défoncé. Parce que je n’arrive plus à me rappeler ce qui était réel et ce qui ne l’était pas. Je me rappelle bien par contre de ce plaisir immédiat et du vide absolu derrière.

Un autre copain sobre m’a dit récemment qu’il avait aussi rencontré un garçon qui lui rappelait cette sensation de high, de défonce, d’euphorie.

Mais moi plus je pense à la défonce et plus j’ai envie de fuir. Je crois que c’est devenu un red flag si quelqu’un réveille des sensations comme ça chez moi.

[…] La sobriété elle ne me met pas en danger, elle me donne de la sécurité, du confort. C’est de ça dont j’ai besoin. De me sentir entouré dans des bras à la fois forts et tendres qui me disent que ça va aller. J’ai besoin de me sentir en sécurité pour dire comment je me sens, être vulnérable, vu et entendu comme un être humain. Etre respecté être considéré. J’ai besoin de stabilité de me sentir ancré dans quelque chose.

[…] Je m’accroche aux bras, aux mots et aux regards de ceux qui me font oublier la drogue en ce moment parce qu’ils remplissent mon coeur d’autres promesses plus belles.

[Source] « Safety » par Ruru Pepito

On va tous mûûûûûrir !!

On voit fleurir depuis quelques jours une curieuse résurgence de 2014 dont je me rappelle fort fort bien avec Evelyne Dhéliat qui nous fait une météo de 2050. Et je me souviens qu’en effet, en cette époque lointaine, les températures présentées étaient surréalistes. Mais oui, dix ans plus tard nous y sommes déjà, et même pas en plein mois d’août. ^^

C’est Orphéus qui a fait l’article le plus intéressant selon moi et pour lequel je souscris à tous les niveaux. C’est triste et ça rejoint un peu ma série de posts neurasthéniques du moment, mais bon c’est la vie.

Commémomisération

Virgile joue régulièrement lors de commémorations dans sa ville, et il subit donc aussi les discours des édiles en question. Il raconte tout cela avec son habituel talent, clairvoyance et bon sens. ^^

La nation fracturée ? La faute à qui ? Le fond de la pensée de droite, et j’insiste là-dessus, c’en est vraiment une composante essentielle, c’est d’inventer constamment des critères pour déterminer qui est « in » et qui est « out ». La couleur de peau, la religion, l’orientation sexuelle, le corps (masculin contre féminin, valides contre invalides), la position sociale (travailleurs contre chômeurs), le moyen de transport favori (bagnolards contre cyclistes), la bouffe (viandards contre végétariens)… Tout est bon pour trier et classer les individus et jauger lesquels sont dignes d’être de bons citoyens et lesquels ne le sont pas. Le vrai problème, c’est que quand elle en a le pouvoir, la droite met en place les politiques qui découlent de cette obsession du classement : elle vote des lois contre l’immigration, elle invente Parcours Sup, elle manifeste contre le mariage pour tous, elle interdit les compétitions sportives aux trans, elle interdit aux cantines de servir des repas végétariens, elle déconventionne l’enseignement privé musulman pour des broutilles quand l’enseignement privé catho frappe et viole littéralement des enfants, elle favorise un urbanisme anti-étrangers, anti-invalides, anti-pauvres ; tout en se gargarisant de la Laïcité et de l’Universalisme À La Française qui garantissent une égalité de traitement pour tous.

Extrait de l’article « Schizophrénie commémorative » de Virgile.

Parurésistible

Je reçois régulièrement des emails de gougueule (lui-même) qui me fait une liste des articles qui sont indexés par le célèbre moteur de recherche, et surtout ceux qui ont bénéficié du plus de clics pour me faire du pôôôôgnon. Car le trafic c’est de la thunasse !!! Huhuhu. Je vous rassure je ne gagne rien, et cela au contraire me coûte quelques écus par an pour vous écrire, et ça me va fort bien comme cela. Mais on m’envoie ce mail pour m’insister par là-même à investir quelques roupies (de sansonnet) dans des liens payants pour faire venir plus de monde. Et donc c’est une bonne base de partir de ce qui fonctionne le mieux dans la recherche dite organique ou naturelle (non payante).

J’ai l’habitude ça, car c’est à peu près le même cinéma depuis vingt ans. Et personne ne sera surpris, bah c’est le cul qui vend le mieux !!! En réalité c’est aussi un effet très pernicieux (un de plus) des Internets d’aujourd’hui. En effet, les sites internet cherchent « du trafic » et donc ils rédigent plein de textes avec des mots ou des phrases qui vont les faire remonter dans les moteurs de recherche. Et le but c’est à la fois de faire du volume, mais aussi d’arriver à transformer les visiteurs en acheteurs. Donc il faut appâter le chaland avec des trucs que les gens cherchent (en faisant un peu sa biatch), mais pas non plus les faire atterrir sur n’importe quoi sinon les gens ne restent pas.

Or les sites internet font très fort en « link baiting » c’est à dire en essayant de vous mettre des liens hyper séduisants et intrigants qui donnent envie de cliquer, mais ils ne peuvent pas non plus parler de porno ou proposer des contenus olé-olé. Or le cul c’est ce que les gens cherchent sur les Internets, et donc il reste… moi. Mouahahahahah.

Evidemment j’aurais aimé qu’on se souvienne de moi pour ma culture, mon humour et mes talents divers et variés, mais force est de constater que ce sera pour ma vessie timide. Et globalement comme je parle beaucoup moins de cul qu’il y a vingt ans, les articles les plus plébiscités datent de loooooongtemps. Voilà la liste des articles en question dans l’ordre croissant de nombre de clics depuis (cumul sur 16 mois) :

Donc premier thème depuis une bonne quinzaine d’années, c’est la parurésie1 ! Et donc je vous ai trouvé cette photo en en-tête qui date de 2016 et que j’avais pris lors du concert d’Anohni à la Philharmonie. Je suis resté marqué par ce truc, car j’ai voulu aller pisser, et évidemment j’ai fait demi-tour immédiatement (avec toute la gêne de rentrer aux toilettes, puis de ressortir drapé dans ce qui vous reste de dignité). L’endroit était vraiment tout neuf, et j’ai pensé que les parois allaient peut-être venir ? En tout cas, j’ai été traumatisé, et je n’ai jamais vérifié par la suite qu’ils avaient enfin mis des séparations entre les urinoirs. (Pitié, faites que oui.)

Sachant que je n’ai vraiment jamais écrit pour les référencements, ou parfois en effet pour titiller les lecteurs que je savais réguliers, j’ai toujours écrit des histoires ou anecdotes réelles, et les gens cherchent beaucoup des témoignages ou des « histoires gay » comme cela est également reflété dans cette liste. Je suis tout de même étonné que mon très célèbre post de 2003 (un énorme hit pendant une dizaine d’années) sur les Dieux du Stade ne soit plus dans cette liste, il semblerait que ce truc soit enfin oublié !!

On retrouve aussi un article dont je n’aurais jamais deviné qu’il pourrait être aussi lu et commenté, lorsque j’ai éhontément kink-shamé un type qui hurlait son hétérosexualité et son envie irrémédiable de se faire mettre. Hu hu hu. Et bien sûr le classique du récit de « première fois » qui avait d’ailleurs fait quelques émules, et qui a touché d’une manière que jamais je n’aurais pu figurer avant de l’écrire.

Bon mais juste après c’est fou c’est le lien vers ma sélection de texte de Marc-Aurèle !! J’avoue que ça fait plaisir, même si je soupçonne que ça doit être un truc au programme au lycée en philo, et que les gens cherchent le bouquin en pdf ou encore mieux le résumé avec explication de texte pour gruger un devoir (râââââté !!).

Bon sinon c’est assez cool de voir que certains articles ont émergé que ce soit pour des bonnes raisons comme de célébrer Diane Segard ou Zaho de Sagazan, ou pour profiter de ma détestation d’un navet.

Je me dois de parler de mon petit Juju avec qui j’ai convolé quelques mois et qui m’a donné l’opportunité de deux articles qui caracolent toujours en tête du blog-office. Le fameux ma poubelle sent le sperme… Tu m’étonnes que je suis premier sur ces recherches gougueule, même Albal n’a pas osé ça pour vendre ses sacs anti-odeurs.

Mais il avait aussi contribué dans un article parmi une série écrite pour un site web de l’époque, très connu et visité, qui s’appelait le « journal du porn ». Cela avait été fascinant car ce fut un tollé énorme sur ce repaire d’hétéros obnubilé par le porno, et qui ont des réactions très fortes à mes articles.

Et cela me fait rire de voir que j’ai un article typique des trucs écrits aujourd’hui par IA pour ramasser du trafic facilement. A l’époque, j’avais écrit ça en toute sincérité, tout content d’avoir trouvé la réponse à Pourquoi trouve-t-on beaucoup de bars-tabacs « Le Narval » ? Ah ah, c’est marrant de voir autour des résultats de recherche tous les sites de presse qui ont rédigé des articles marronniers là-dessus juste pour récupérer quelques visites (on appelle ça « la longue traîne »).

Et sinon je vous le remets, car cela me fait toujours mourir de rire. Mais ce qui est dérangeant de me voir dans les cliqués sur cet article, c’est que c’est typiquement ce que je déteste dans le web. C’est à dire que je n’avais rien fait d’autre que de prendre sa vidéo sur Instagram (ce que je fais aujourd’hui beaucoup pour éviter de me retrouver dépourvu avec la fin de certains médias en ligne2) en la repostant ici pour la partager (beaucoup font la même chose pour en tirer des visites et ensuite les monétiser à leur compte). Après, il n’a même pas nommé sa propre vidéo sur Insta, et le référencement d’Insta est parfois très mauvais…

Vidéo d’Islem Sehili

Et voilà, cet article a remis au goût du jour tous ces liens en les recontextualisant avec un nouveau texte plus récent (gougueule aime ça). Donc je vais avoir encore plus de clics là-dessus. C’est un cercle vicieux3. *soupirs* Mais bon, j’ai le vice en moi, vous savez bien. ^^

  1. La parurésie (du latin : paruresis), urinophobie ou syndrome de la « vessie timide » est l’impossibilité ou une grande difficulté pour un individu d’uriner en présence d’autres personnes. ↩︎
  2. Oui j’ai l’audace de penser que je pourrais survivre à Instagram ou Youtube. J’ai bien survécu à Twitter, Vine, Woomp et d’autres… ^^ ↩︎
  3. Et je n’aurais pas mieux fait si j’avais été un de ces référenceurs en ligne qui tentent de générer du trafic sur des blogs à la con qui parlent de cryptotrucs. Mais moi c’est de la promo pour les pissotières et les poubelles odorantes, on devrait comprendre ma probité en la matière. ^^ ↩︎

Regrets

J’ai rencontré avec bonheur Madjid il y a quelques années à Tokyo. Et là il écrit un billet qui fait mouche, comme souvent d’ailleurs. Une de ces bouteilles à la mer qui trouvera j’espère bien des lecteurs. Il le mérite. ^^

Je veux ce billet rempli de regrets, du temps qui a passé sans que je ne m’en rende compte, de mes yeux fermés sur ce passé. Je veux ce billet comme la confession de Perceval, parti brusquement sans se retourner, ignorant de la tristesse et du déchirement de sa mère attendant un au revoir qui jamais ne viendra.
Perceval qui, tout rempli du regret qu’il feint d’ignorer, restera paralysé devant les miracles de sa quête. Perceval rempli d’avenir mais cédant sa place à Lancelot, pourtant bien moins pur, bien plus faillible. Perceval, perdu dans sa quête d’absolu, enfant attaché à sa mère et rempli du regret de la séparation.
[…]
Je veux ce billet plein de ces regrets de n’avoir fait, de n’avoir dit, d’avoir fait et d’avoir dit, d’avoir mal fait et d’avoir mal dit, je le veux plein des choix que j’ai faits, que je n’ai pas faits, que j’ai oubliés, que je n’ai pas respectés, que j’ai jeté aux quatre vents. Je veux ce billet rempli de l’amour que je n’ai su ni donner, ni recevoir.
[…]
Je veux ce billet comme une porte ouverte sur l’infini d’une mer à explorer et les flots d’amour qui la bercent.
Je veux ce billet comme la source d’un récit qui ne se tarit pas, rempli de la vie qui est encore là et qui coule en moi, qui m’irrigue et me guide. Je veux ce billet pour vous raconter je ne sais trop quoi, et je le veux ainsi.

Citations du billet « Regrets » de Madjid Ben Chikh

Cœur de Poupée

Le Roncier, qui est un blogueur cher à mon cœur, a longtemps blogué et milité et journalisé sur la lutte contre le VIH, et parfois son propre VIH à lui. Après des années à vivre avec le virus et forcément s’imaginer tous les impacts liés à cela, tout en étant de plus en plus relax à ce sujet, il se découvre aujourd’hui des problèmes cardiaques. Entre inquiétude, ironie du sort et remobilisation, il écrit un magnifique article de mise à distance et d’emplafonnement non simulé (en oxymoron donc ^^ ).

Ces derniers temps, j’avais oublié que j’étais un assemblage miraculeux de cordes, de tuyaux et de sentiments trop puissants, et qu’on ne guérit jamais d’être en vie, parce que la machine est le fantôme. Tout petit vaisseau de rien du tout, qu’on amarre du mieux que possible à la lumière des autres, une merveille éphémère, monstrueuse et sensible, terriblement fragile. Je sais qu’il n’y aura pas d’autre corps, il n’y aura que celui-là, avec son hôte dompté, avec ses douleurs et son gras, avec ses bulles dans les ventricules.

Le fantôme dans la machine (Le Roncier)

Iwak #19 – Crête (Ridge)

C’est encore une vue du cirque de Mafate depuis le Maïdo à la Réunion, car c’est ce qui m’est tout de suite venu en pensant au mot « crête ». Cela m’a fasciné de faire quelques randonnées en passant presque sur ces étroits chemins qui sont juste sur le fil de la montagne, avec des pentes des deux côtés. Mais la métaphore m’intéressait plus sur le coup. ^^

Et je pense aussi à ces blogueurs qui, nativement, viscéralement, sont arrivés sur le fil, et ont parcouru un chemin de crête qui ne pouvait être qu’éphémère. Briller très fort mais peu de temps, car l’un ne va pas sans l’autre. C’est aussi d’ailleurs en cela que je reconnais ma propre médiocrité1, condition sine qua non à une certaine longévité.

Je pense à des Mennuie, Paumé, Bradshaw ou plus récemment Gauthier et Quentin, qui se racontaient entiers et écorchés, et qui par définition ne pouvaient pas continuer à se promener sur la crête les yeux bandés indéfiniment. Cela a permis pendant quelques temps de nourrir le flot fertile et renouvelé de ces histoires et anecdotes qui passionnent les foules (parce que c’est passionné, c’est du cul et c’est une bonne dose de dopamine et sérotonine dans des Internets sous Prozac).

Mais j’ai mes propres petits plaisirs non coupables, ceux qui n’ont pas forcément fait l’unanimité ou qui ne sont légion que dans mes favoris et flux de syndication, et lorsqu’ils s’éteignent je suis seul à pleurer leur disparition dans mon coin. Surtout que souvent, ça se résume à un arrêt des publications, et que je réalise leur disparition au hasard de mes errements sur la toile, ou en revisitant des anciens articles.

Mawy ou son bédéblog Koudavbine2 en font clairement partie. J’ai adoré la lire toutes ces années, mais ça fait deux ans qu’elle ne publie plus, et les dernières fois c’était en partie pour fournir les explications. Ça sent le sapin !!! Mais j’adore son blog car c’est l’antithèse du truc web d’aujourd’hui. Elle dessine à la main et elle publie les scans, c’est une goudou reloue et assumée qui tire à boulets rouges, et ça se barre dans tous les sens avec de la caricature, des anecdotes, de vrais brûlots queer et furieux plutôt bien sentis, et vachement d’humour et de dérision dans tout cela.

Je ne me suis jamais remis de ses Pokémons. ^^

Des chats bien sûr, tels qu’on les connaît bien ces suppôts de Satan !!

Mais en pleine pandémie, des adaptations nécessaires, jusqu’aux principes ACAB bien inspiré à partir d’un black bloc. ^^

Le poké Lunacup avec l’attaque « bois mes règles » si c’est pas de l’humour de Xena la guerrière ça !! ^^

(Ses chats s’appellent Greta et Perli.)

L’Ado qui évolue en Booer avec l’attaque « Ouin ouin », c’est collector. Et Nucléair en Croissansverte juste avec une fleur !!!! Mein gott. ^^

Rien à voir, mais tout à voir, je viens de réaliser que Tto s’est barré aussi !!! Il n’a rien dit et ça fait, si j’en crois l’archive de ses flux RSS, plus de 6 mois qu’il a tiré sa révérence. Nan mais tout fout l’camp j’vous jure !! Me voilà encore en deuil. 🙁

  1. Qui veut juste littéralement dire « moyen », je ne me flagelle pas. Hu hu. ↩︎
  2. Koudavbine = could have been hein. ^^ ↩︎

Infection transgénérationnelle

Le génial David Madore se pose cette fois encore une question passionnante, et il nous entraîne dans une de ses magnifiques digressions mathématiques dont il a le secret !!

Suis-je (sommes-nous tous) un descendant direct de Charlemagne ?

Pour tenter d’y répondre, ou en tout cas essayer de se poser les bonnes questions pour cerner le problème, il utilise des modèles mathématiques épidémiologiques en se projetant dans une attaque virale qui remonterait les générations…

Parce que le truc de base c’est évidemment de se dire :

Nous avons tous 2 parents, 4 grands-parents, 8 arrière-grands-parents, 16 arrière-arrière-grands-parents, et, si on remonte 40 générations pour retomber à peu près à l’époque de Charlemagne, cela donne 1 099 511 627 776 ancêtres à ce niveau — mille milliards, soit quelque chose comme 4000 fois la population mondiale de l’époque (à la louche, 250 millions).

Mais on sait bien qu’on a tous beaucoup d’ancêtres en commun, et que c’est très contre-intuitif à quel point le phénomène est énoooorme. Donc sa proposition d’investigation est la suivante :

Imaginons que nous regardions l’histoire de l’Humanité à l’envers (je veux dire, en faisant couler le temps en sens inverse). J’imagine conceptuellement que je suis porteur d’une infection (l’infection avoir David Madore dans sa descendance) et que cette infection se transmet (en remontant le temps, donc) à mes deux parents, qui la transmettent eux-mêmes à leurs parents, etc. Nous avons là un modèle épidémiologique dont le nombre de reproduction R₀ (ou, comme j’aimais bien le noter dans mes articles de vulgarisation à ce sujet, κ) vaut 2. (Pour être un peu plus précis sur la comparaison, les individus sont considérés comme « susceptibles » à partir de leur mort — je rappelle que je joue le temps à l’envers, donc on commence par mourir —, ils sont « infectés » à partir de la naissance d’un enfant infecté, et ils le restent jusqu’à leur propre naissance, laquelle transmet l’infection à leurs propres parents.)

A lire à tête reposé… ^^

Une question d’air

J’ai toujours aimé son style et ces petits posts qui sont autant de délicates touches sur une peinture impressionniste qui représente maintes années de blogging. Il poste peu aujourd’hui, mais quand c’est pour nous régaler d’articles de cet acabit, bah ça vaut le coup d’attendre. ^^

C’est le matin. Un matin d’été en Bourgogne. Je viens de me lever, d’ouvrir la porte. Un café, je suis sorti. Dehors, le haut des arbres est dans un reste de brume. Le coq chante, il est, avec d’autres oiseaux qui pépient, seul à animer la campagne qui dort encore. L’air est humide et se dépose sur les arbres, les plantes, en gouttelettes transparentes. Pour la première fois, j’ai vu de la vapeur sortir de ma bouche en expirant, et réalisé que sur cette petite terrasse, à constater le réveil de ce petit monde, j’avais froid. J’aime la fin du mois d’août, quand les chaleurs d’été cèdent la place aux aurores fraîches de septembre. J’aurai aimé qu’au chant du coq, s’ajoute un léger souffle, derrière moi. Ça aurait été toi. Tu m’aurais rejoint, tu aurais collé ton torse à mon dos, tu m’aurais entouré de tes bras, mains sur mon cœur, tu aurais posé le bas de ton visage sur le haut de mon épaule, tu aurais joint ton souffle au mien et on serait resté là à vivre le moment en communion. Alors tu aurais frissonné, j’aurais souri, et tu aurais murmuré : “vient, retournons au lit”. Et j’aurais été le plus heureux des hommes.

« Juste un peu d’air » par RAL3020